<119>On nourrira ce cadavre livide
De restaurants, de bouillons et de vin,
Le piquera par une cantharide,
Pour rappeler son esprit clandestin.
« Je vais, dit-il, confondre l'incrédule,
Et l'esprit fort, encor plus ridicule;
Ces scélérats crèveront de chagrin,
Voyant le mort ressusciter demain. »
L'invention fut partout applaudie,
Et tout s'empresse alors dans la maison :
L'une à la hâte apporte l'eau d'Hongrie,
L'autre, en courant, du baume d'Arabie,
Là, près du feu, on réchauffe un bouillon.
Dans la maison c'était beau carillon :
Tous les parents chez le mort s'empressèrent,
Si rudement des coudes se choquèrent,
Qu'à terre on vit sauter plus d'un flacon,
Et qu'en leurs mains maints verres se brisèrent.
Comme au rivage on voit après le flux
Dans peu de temps succéder le reflux,
On vit ici se presser par la porte
D'un peuple fou la nombreuse cohorte;
Il entre, il sort, et par le défilé,
Lassé de voir, il s'était écoulé.
Le saint alors dévotement s'avance :
« Ne perdez point, leur dit-il, patience,
Tout doit à gré dans peu nous réussir;
Pour le présent, laissons, par bienséance,
Au pauvre mort le loisir de dormir;
Sortons, demain il faudra revenir. »
Après qu'au mort on eut ouvert la bouche,