<278>Car les pandours, ce jour, faisaient débauche.
Hors des grands brocs coulaient des flots de vin;
Chacun avait près de lui sa catin.
Au maudit son d'un violon qui jure,
Et durement criait dessous l'archet,
Le petit camp, ayant bien bu, dansait,
Même au grand jour l'impudique aventure
Cyniquement devant chacun faisait,
A rafle, aux dés, de bons ducats jouait,
Et du pillage et de mainte capture
En moins de rien tout le profit perdait.
Fallut partir; Franquin, quoique à regret,
De ces plaisirs interrompant les charmes,
Leur dit : « Amis, que l'on prenne les armes;
Chez le Lorrain nous mènerons Darget. »
Tout aussitôt, sur leurs pourpoints cinabres,
Tous les pandours ceignent leurs courbes sabres;
Dessus l'épaule ils roulent leurs manteaux,
De longs fusils s'étant chargé le dos;
Et puis, dessus plus de cent Charlots,
Par les goujats tout le butin se charge;
De gros ballots pesants on les surcharge.
Les essieux gémissent sous le poids,
Et dix grands bœufs, tous animaux de choix,
Traînent à peine au travers de l'ordure,
D'un pas tardif, la tremblante voiture.
On part ainsi, prenant quelques détours,
Au preux Lacy l'on donne l'avant-garde;
Et par les flancs détachant des pandours,
De tous côtés l'on guette et l'on regarde.