<31>L'audace couronnée, avide de louange,
N'attirera jamais, si mon cœur ne s'y range
L'odeur de mon encens.

Et comment célébrer ces fardeaux de la terre,
Fantômes qu'à leur honte on arma du tonnerre,
Sur le trône engourdis,
Ou caresser l'orgueil de ces âmes altières,
Vivant dans la mollesse, inflexibles et fières,
Dignes de nos mépris?

On ne me verra point par des soins si frivoles
Trahissant ma raison, aux pieds de ces idoles,
Parer leurs vains autels;
Malgré ma probité, malgré ma conscience,
Par d'infidèles poids peser sur ma balance
La vertu des mortels.

Ah! ne profanons point les sons de l'harmonie
Et le charme enchanteur qui rend la poésie
Le langage des dieux.
Loin de prostituer les accords de ma lyre,
Je laisse déchirer aux dents de la satire
Les vices odieux.

Mais lorsque la vertu s'offre avec la victoire,
En brûlant d'élever un trophée à la gloire,
J'entonne mes concerts;
Charmé de son éclat, ses beautés immortelles
Raniment de mon feu les vives étincelles,
Et m'inspirent des vers.