<57>Adieu, lauriers trompeurs, couronnes des héros,
Il n'en coûte que trop pour vivre dans l'histoire;
Souvent quarante ans de travaux
Ne valent qu'un instant de gloire
Et la haine de cent rivaux.
Adieu, grandeurs, adieu, chimères;
De vos bluettes passagères
Mes yeux ne sont plus éblouis.
Si votre faux éclat dans ma naissante aurore
Fit trop imprudemment éclore
Des désirs indiscrets, longtemps évanouis,
Au sein de la philosophie, École de la vérité,
Zénon me détrompa de la frivolité
Qui fait l'illusion du songe de la vie,
Et je sus avec modestie
Rejeter les poisons qu'offre la vanité.
Adieu, divine volupté,
Adieu, plaisirs charmants qui flattez la mollesse,
Et dont la troupe enchanteresse
Par des liens de fleurs enchaînant la gaîté,
Compagnes dans notre jeunesse
De la brillante puberté,
Qui fuyez de nos ans l'insipide vieillesse,
Les arides glaçons de la caducité.
Ah! que l'Amour me le pardonne,
Plaisirs, si je vous abandonne;
Ma muse ne sait point flatter.
Quand neuf lustres complets m'annoncent mon automne,
Plaisirs, je vous voyais tous prêts à me quitter.