<83>Régit, du Vatican, les intérêts des deux,
D'anathèmes sacrés fait gronder le tonnerre,
Et confond dans ses droits le ciel avec la terre.
On voit à ses côtés la folle ambition,
L'artifice, l'erreur, la superstition,
L'intérêt tout-puissant, l'avarice rusée
Ordonner de la foi de la terre abusée,
Et l'inquisition, barbare tribunal,
Leur fournir au besoin son secours infernal.
Cet infâme sénat, de sa voix insensée,
Condamne l'innocent, et juge la pensée.
Le bûcher est le prix d'un bon raisonnement,
Il consume à la fois l'auteur et l'argument;
Et l'Europe aveuglée, au pontife soumise,
Adore ses décrets, et forme son Église.
Cent rois, cent nations de son sceptre d'airain
Ont reconnu chez eux le pouvoir souverain;
Mais ce chef dangereux, leur donnant des entraves,
De libres qu'ils étaient, en fit autant d'esclaves.
Voyez-vous dans Madrid ces bûchers solennels
Où pour l'amour de Dieu l'on brûle les mortels?
Écoutez dans Paris ces querelles frivoles,
Ces docteurs acharnés aux guerres de paroles;
Voyez le fanatisme, attroupant tous les sots,
Contre l'homme pensant animer les bigots.
L'esprit libre français, l'éloquence hardie
Sous le joug monacal languit abâtardie.
Observez ces Germains soumis à leurs pasteurs,
D'Ignace et d'Augustin aveugles sectateurs;
Leur César malheureux, fugitif en Hongrie,
Fuit le dieu des combats, en implorant Marie,