<18> lieu d'espérer qu'ils feront une justice que le lieutenant criminel aurait faite à leur place. Ainsi la cause de M. de Voltaire devient la cause commune, et c'est en effet celle de tous les honnêtes gens.

On m'avait trompée en me mandant que Thieriot avait envoyé le libelle à V. A. R., et je voudrais bien que tous ses torts dans cette affaire ne fussent pas plus réels; mais il s'est très-mal conduit, et je ne l'attends au point où les sentiments de reconnaissance qu'il doit à M. de Voltaire auraient dû toujours le tenir que quand V. A. R. le lui aura ordonné. Il a eu l'imprudence de me mander qu'il avait envoyé à V. A. R. une lettre qu'il m'a écrite, et dont j'ai été très-offensée. Je ne sais trop sous quel prétexte il a cru pouvoir m'écrire une lettre ostensible, et comment il a osé envoyer cette lettre à V. A. R., qui devait lui paraître une énigme, si elle ne connaissait point la Voltairomanie. Ce qui est bien certain, c'est que Thieriot ne devait jamais, sans ma participation, montrer cette lettre à personne; or, non seulement il l'a presque rendue publique sans ma permission, mais il l'a envoyée à V. A. R. Je ne me soucie point du tout que le public soit informé que Thieriot m'écrit, et il ne lui convenait en aucune façon d'oser me compromettre. C'est ainsi qu'il a réparé les torts qu'il avait avec M. de Voltaire. Je ne m'attendais pas à être obligée d'écrire un factum sur Thieriot à V. A. R.; mais l'imprudence de ses démarches m'y a forcée. Il faut encore que vous me permettiez, monseigneur, de vous envoyer la copie de la lettre que madame la présidente de Bernières a écrite à M. de Voltaire sur cette malheureuse affaire; elle fera voir à V. A. R. à quel point les hommes peuvent porter la méchanceté et l'ingratitude, et combien Thieriot est coupable de n'en avoir pas usé avec M. de Voltaire comme a fait madame de Bernières, qui cependant lui doit bien moins.

Je suis désespérée de penser que je vais ce printemps dans un pays où V. A. R. était l'année passée; cependant je me console par l'idée que ce voyage me rapproche de V. A. R. et des pays qui sont sous la