<193>Voici des vers qui sont venus au bout de ma plume je ne sais comment, et que vous trouverez, je crois, très-mauvais.

Ce sont les bons qui me sont difficiles;
Pour les mauvais, ils ne me coûtent rien.
Tous les auteurs ne sont pas si habiles
Que l'est Jordan Tindalien.
Les Muses sont quinteuses, indociles,
Lorsque la cour on ne leur fait pas bien;
Et moi, qui cours par les camps, par les villes,
Comme un bandit, comme un maître vaurien,
J'y perds mon temps et tous mes soins futiles.

Ainsi n'est pas favori du dieu qui veut; il faut être son courtisan assidu, et avoir par-dessus tout une physionomie sémillante et un certain je ne sais quoi du goût d'Apollon.

Adieu, mon cher; je n'ai pas le temps de vous dire d'autres pauvretés.

116. DE M. JORDAN.

Le 12 (17?) avril 1742, le second beau jour de l'année.



Sire,

J'ai reçu la lettre dont il a plu à Votre Majesté de m'honorer, qui était de Prossnitz. Comme je porte ordinairement en poche la Silésie, la Moravie, la Bohême, l'Autriche, la Bavière, la Hongrie et la Turquie, je suis toujours à portée de suivre l'armée redoutable de V. M.

Je crains qu'augmentant vos conquêtes,
Il ne faille grossir un peu trop mon atlas,
Et que tous les progrès qu'heureusement vous faites
Ne soient pour vous de séduisants appas.