<23>Les médecins m'ont promis que dans quinze jours la fièvre ferait divorce avec moi, et je leur ai promis de les payer comme un roi catholique payerait en pareille occasion un pape qui lui donnerait dispense.

M. de Beauvau a du feu au c.., qui le presse de venir ici. Il croit quitter Berlin au plus tôt; mais je suis sûr qu'il n'en bougera pas les premiers six mois. Voltaire arrivera ici dans quinze jours. Émilie est à Fontainebleau, et lui, il part de la Haye. Ne pouvant aller en France, la Prusse sera le pis aller.

J'attends toujours que vous vouliez vous déclarer sur votre sort. Dites-moi, je vous prie, ce qu'il vous faut, et ce que vous voulez pour que composition se fasse, et que je puisse voir jour à votre établissement. J'attends le tout avec impatience, vous assurant que je suis tout à vous.

13. AU MÊME.

Remusberg, 2 novembre 1740.

Mon cher Algarotti, dans ce temps de crise je n'ai guère eu le temps de vous écrire. Les grandes nouvelles qui, depuis huit jours, se succèdent si promptement donnent de l'occupation à la politique, et les affaires commencent à prendre un train si sérieux, qu'il ne suffit pas d'une prudence ordinaire pour se conduire, et que, pour bien faire, il faudrait percer dans l'avenir, et lire dans le livre des destins les conjonctures et les combinaisons des temps futurs.

La première de vos lettres n'est pas l'hymne d'un cygne mourant, mais c'est le chant d'une sirène, qui, étant trop flatteur, séduirait