<274>cutent, m'ont souvent causé des distractions dont je n'ai pas été maître. Ne m'oubliez point, mon cher marquis; écrivez-moi tant que les chemins seront libres, et soyez persuadé de toute l'amitié que j'ai pour vous. Adieu.

184. DU MARQUIS D'ARGENS.

Berlin, 19 juillet 1761.



Sire,

Voilà enfin l'invincible Broglie battu, et le chanceux Soubise malheureux pour la seconde fois.a Si cet événement ne produit rien sur les négociations entamées à Londres, toute ma pauvre politique est en déroute.

Si je ne savais pas, Sire, depuis vingt ans que j'ai l'honneur d'être à votre service, que vous êtes aussi tranquille au milieu des camps et du bruit des armes que vous l'êtes dans votre bibliothèque, à Sans-Souci, je n'aurais pu comprendre comment vous avez pu faire l'extrait et le jugement que vous m'avez fait la grâce de m'envoyer sur la philosophie de Gassendi. Vos décisions sont également justes et précises. Il y a cependant une chose qu'il faut mettre sur le compte de Bernier plutôt que sur celui de Gassendi : c'est la préférence qu'il semble donner au système de Ptolémée sur celui de Copernic. Bernier est seul coupable de cette préférence peu judicieuse. Il est vrai que Gassendi, qui a voulu relever la philosophie d'Épicure, a donné au système de Ptolémée, suivi par Lucrèce,b toute la vraisemblance qu'il a pu; mais d'ailleurs, il pensait comme Copernic, dont il a écrit


a Le prince Ferdinand battit ces deux maréchaux fiançais à Vellinghausen, le 16 juillet 1761. Voyez t. V, p. 161 et 162.

b Lucrèce vivait bien avant Ptolémée.