<341> mon cher marquis; patience, car tout ceci est pour moi une école de patience où ma vivacité s'est éteinte. Je ne vaux plus rien qu'à végéter, l'huile de ma lampe s'est usée avant le lumignon; tout au plus serais-je bon à faire un chartreux. Voyez, après cela, à quelle sauce vous me mettrez, si la paix se fait jamais, à broyer les couleurs pour la marquise ou à copier des notes pour votre viole de gambe. Enfin tranquillisez-vous, mon cher; que ma santé ne vous inquiète plus, et mandez-moi les nouvelles que vous pourrez, surtout les littéraires. Adieu, mon cher; je vous embrasse.

231. DU MARQUIS D'ARGENS.

Berlin, 3 avril 1762.



Sire,

Votre dernière lettre, dans laquelle vous me faites la grâce de m'apprendre que vous n'avez plus de fièvre, a achevé de me tranquilliser; car, Catt étant allé à Wittenberg pour voir son parent, je ne savais ce que c'était que cette fièvre, et il me venait sans cesse les idées les plus tristes en pensant à celles qui avaient régné à Breslau l'hiver que j'y étais.a Heureusement le comte de Hordt, qui partit deux jours après la lettre que vous m'aviez fait l'honneur de m'écrire, dit ici que vous n'aviez eu qu'une fièvre de rhume. Ce fut le comte de Reuss qui me donna cette bonne nouvelle, et vint exprès chez moi. Je l'aimais beaucoup auparavant, parce que c'est un bon et excellent citoyen, qui vous est dévoué de cœur et d'âme; mais je l'aime encore davantage aujourd'hui, et, s'il m'avait donné cent mille écus, il ne m'aurait pas fait le quart du plaisir qu'il me fit.


a Voyez, t. IV. p. 206.