<416> à radoter, et un théologien le peut en bonne conscience, car personne n'exige de lui le sens commun. Vous trouverez, en lisant ma lettre, qu'il ne m'en reste guère; mais j'ai l'esprit si inquiet et la tête si remplie, qu'il doit y paraître, quand même je voudrais le dissimuler. Adieu, mon cher marquis; ne purgez plus, portez-vous bien, et réjouissez-moi cet hiver par votre présence.

278. DU MARQUIS D'ARGENS.

Berlin, 31 octobre 1762.



Sire,

J'allais écrire à Votre Majesté pour la remercier des bontés qu'elle m'a fait l'honneur de me témoigner dans sa dernière lettre, lorsque j'apprends la victoire éclatante que le prince Henri, digne frère de Frédéric le Grand, vient de remporter sur vos ennemis.a Permettez-moi, Sire, de vous faire à ce sujet le plus sincère et le plus agréable compliment, auquel j'espère faire succéder bientôt celui que je vous écrirai sur la prise de Dresde. Sans être grand calculateur, je vois vingt mille Autrichiens de moins dans quinze jours, dix mille pris dans Schweidnitz, six mille dans la bataille que le prince Henri vient de gagner, et quatre mille tués ou blessés sur le champ de bataille. Je crois que vous serez pourtant content de cette campagne. La Fortune n'est plus une déesse esclave des caprices des Autrichiens; elle s'est affranchie du joug sous lequel ils semblaient l'avoir soumise. Que dira Bute et toute sa clique, qui voulait si lâchement nous abandonner?


a A Freyberg, le 29 octobre 1762. Voyez t. V, p. 236-238.