<2> était forte de soixante et seize mille hommes,a dont à peu près vingt-six mille étrangers; ce qui prouve que c'était un effort, et que trois millions d'habitants ne pouvaient pas fournir à recruter même cinquante mille hommes, surtout en temps de guerre. Le feu roi n'était entré en aucune alliance, pour laisser à son successeur les mains libres sur le choix le plus avantageux à ses intérêts, et pour former des alliances selon le temps et l'occasion.

L'Europe était en paix, à l'exception de l'Angleterre et de l'Espagne, qui se faisaient la guerre dans le nouveau monde pour deux oreilles anglaises que les Espagnols avaient coupées,b et qui dépensaient des sommes immenses pour des objets de commerce peu proportionnés aux grands efforts que faisaient ces deux nations. L'empereur Charles VI venait de faire la paix avec les Turcs à Belgrad, par la médiation de M. de Villeneufve, ministre de France à Constantinople. Par cette paix, l'Empereur cédait à l'empire ottoman le royaume de Servie, une partie de la Moldavie,c et l'importante ville de Belgrad. Les dernières années du règne de Charles VI avaient été si malheureuses, qu'il s'était vu dépouiller du royaume de Naples, de la Sicile, et d'une partie du Milanais, par les Français, les Espagnols, et les Sardes. Il avait de plus cédé à la France, par la paix de 1737,d le duché de Lorraine, que la maison du duc son gendre avait possédé de temps immémorial. Par ce traité, l'Empereur donnait des provinces; et la France, de vaines garanties, à l'exception de la Toscane, qui doit être envisagée comme une possession précaire. La France


a A la mort du roi Frédéric - Guillaume Ier, l'armée était forte de quatre-vingt-trois mille quatre cent soixante-huit hommes. Voyez la note du t. I, p. 201, et le Militair-Wochenblatt. Berlin, 1840, p. 52.

b En 1738, on accusa les Espagnols d'avoir coupé les oreilles au matelot anglais Jenkins, comme coupable de contrebande.

c Aucune partie de la Moldavie ne fut cédée aux Turcs; l'Auteur veut dire la Valachie autrichienne.

d La paix préliminaire fut conclue à Vienne le 3 octobre 1735; et la paix définitive, le 18 novembre 1738.