<90> trouvait la cour de Vienne. Ces ministres étaient dans le camp du Roi, et il paraissait singulier que le lord Hyndford donnât plus d'ombrage au sieur Schwicheldt que le maréchal de Belle-Isle, d'autant plus que ce Hanovrien recommandait sur toute chose qu'on fît un mystère de ses négociations au ministre d'Angleterre.

Ces Anglais et ces Hanovriens qui flattaient le Roi dans son camp, ne voulaient que l'endormir : ils n'en agissaient pas de même dans les autres cours de l'Europe. En Russie, Finch, ministre anglais, y soufflait la guerre; les intrigues du comte de Botta et les charmes du beau Lynar perdirent ce brave maréchal Münnich. Le prince de Brunswic, général en chef de la Russie, poussé par sa grand'mère, par l'Impératrice douairière, et par ces ministres étrangers, qui étaient autant de boute-feux, allait incessamment engager la Russie à déclarer la guerre à la Prusse. Les troupes s'assemblaient déjà en Livonie; le Roi en était informé, et c'est ce qui lui inspirait de la méfiance pour les Anglais, dont il découvrait la duplicité. Les intrigues anglaises avaient également extorqué du grand pensionnaire de Hollande une lettre déhortatoire28 pour engager le Roi à retirer ses troupes de la Silésie.

Toutes ces machinations des Anglais, et surtout ce qu'on prévoyait en Russie, déterminèrent enfin le Roi à signer son traité avec la France,a aux conditions dont il était convenu avec le maréchal de Belle-Isle. On y ajouta les deux articles suivants : que les Français commenceraient leurs opérations avant la fin d'août; et que ce traité serait tenu secret jusqu'à ce que sa publication ne pût plus porter de préjudice aux intérêts des Prussiens. On ne perdit pas de temps pour conclure cette alliance; il fallait se presser : on voyait éclater la mauvaise volonté des Russes; on voyait aux troupes hanovriennes, qui campaient déjà depuis le mois d'avril, joints six mille Danois et six mille Hessois auxquels l'Angleterre donnait des subsides; les Saxons,


28 Présentée par Ginkel le 15 juin.

a C'est le traité de Breslau du 5 juin 1741.