<182> visiblement sous nos sens; les autres n'en existent pas moins, mais ils demandent plus d'application d'esprit et plus de méditation pour être découverts.

9o Les désirs et la volonté sont deux choses qu'il ne faut pas confondre, j'en conviens; mais le triomphe de la volonté sur les désirs ne prouve rien en faveur de la liberté. Ce triomphe ne prouve autre chose sinon qu'une idée de gloire qu'on se présente en supprimant ses désirs. Une idée d'orgueil, quelquefois aussi de prudence, nous détermine à vaincre ces désirs; ce qui est l'équivalent de ce que j'ai établi plus haut.

10o Puisque, sans Dieu, le monde ne pourrait pas avoir été créé, comme vous en convenez, et puisque je vous ai prouvé que l'homme n'est pas libre, il s'ensuit que, puisqu'il y a un Dieu, il y a une nécessité absolue, et, puisqu'il y a une nécessité absolue, l'homme doit par conséquent y être assujetti, et ne saurait avoir de liberté.

11o Lorsqu'on parle des hommes, toutes les comparaisons prises des hommes peuvent cadrer; mais, dès qu'on parle de Dieu, il me paraît que toutes ces comparaisons deviennent fausses, puisque en cela nous lui attribuons des idées humaines, nous le faisons agir comme un homme, et nous lui faisons jouer un rôle qui est entièrement opposé à sa majesté.a

Réfuterai-je encore le système des sociniens, après avoir suffisamment établi le mien? Dès qu'il est démontré que Dieu ne saurait rien faire de contraire à son essence, on en peut tirer la conséquence que tout ce qu'on peut dire pour prouver la liberté de l'homme sera toujours également faux. Le système de Wolff est fondé sur les attributs qu'on a démontrés en Dieu; le système contraire n'a d'autre base que des suppositions évidemment fausses. Vous comprenez que tous les autres s'écroulent d'eux-mêmes.


a Ce 11o article, omis dans l'édition de Kehl, se trouve dans les Œuvres posthumes, t. VIII, p. 334.