<267>Comme j'allais continuer cette petite Épître, j'en reçois une de V. M. Celle-là prouve bien mieux encore l'immensité des richesses de votre génie. Ni vous ni personne n'a jamais rien fait de si bien, ou du moins de mieux que ces vers :

Des grandeurs et des petitesses,
Quelques vertus, plus de faiblesses, etc.

Je sens, à la lecture de cette lettre, que, si j'avais un peu de santé, je partirais sur-le-champ, fussiez-vous à Königsberg. Vous daignez demander Oreste; je vais le faire transcrire. Mais que V. M. ne s'attende pas à voir un Palamède. Il n'y en a point dans Sophocle.

A l'égard du prétendu Testament politique du cardinal de Richelieu, je réponds bien que madame d'Aiguillon n'en aura jamais l'original. Sire, on n'a jamais vu l'original de tous ces testaments-là. Indépendamment des misères dont ce livre est plein, je trouve qu'Armand est bien petit devant Frédéric.

........... Ceux dont l'imprudence
Dans d'indignes mortels a mis sa confiance.a

L'imprudence met sa confiance. L'imprudence ne mettent pas. Mais l'imprudence pourrait à toute force mettre leur confiance, en rapportant ce leur au dont. Ce serait une licence qui, en certains cas, serait permise.

Mon chancelier d'Olivet dirait le reste. Mais, quand j'écris au plus grand homme de notre siècle, je ne connais que le sentiment de l'admiration. L'enthousiasme fait oublier la grammaire. A vos genoux.


a Épître (de Frédéric) à Podewils. Voyez t. X, p. 180.