<326> n'étant pas nés dans le temps de la bonne musique, n'ont l'oreille accoutumée qu'au nouveau charivari, qui leur paraît beau parce qu'il fait beaucoup de bruit; et il en arrive en ceci comme en bien des choses, que ce qui étourdit surprend l'esprit, et l'empêche de sentir ce qui est essentiellement bon. J'ai chanté à mon clavecin avec un plaisir nouveau le premier air que j'ai chanté dans ma vie; c'est le premier air de Cléofide, de Hasse, Che legge spietata,a et j'ai, à cette occasion, renouvelé de cœur et d'âme mon serment de fidélité à l'ancienne musique. Comme elle vous a pour protecteur, Sire, je ne doute point qu'elle ne triomphe à la fin en Allemagne comme en France, où l'on tâche déjà de l'imiter.

Je finis une lettre qui n'est déjà que trop longue, par les vœux que je ne cesse de faire pour la conservation de votre précieuse santé, et par l'hommage de l'admiration sans bornes et de la haute estime avec laquelle je suis, etc.

200. A L'ÉLECTRICE MARIE-ANTONIE DE SAXE.

(Potsdam) 5 mars 1777.



Madame ma sœur,

Je remercie Votre Altesse Royale du regard plein de bonté et d'indulgence qu'elle daigne jeter sur les Obotrites; j'ose croire toutefois que si jamais quelqu'un eût dit aux Épaminondas, aux Aristide, aux Eschyle qu'ils pourraient être comparés aux barbares habitants des


a Cet air, dont nous transcrivons fidèlement le titre, ne se trouve dans aucune des partitions de l'opéra de Cléofide conservées en manuscrit, soit à Dresde, soit à Berlin.