<386> l'abbé Jérusalem a son mérite, et me paraît écrit avec vérité, modestie et pureté. Il y applaudit, en général, aux raisons que V. M. allègue du peu de progrès de la langue allemande, savoir aux guerres qui pendant deux siècles ont désolé l'Allemagne, et au manque de protection des souverains; et il avoue que l'éloquence du barreau et de l'Église ne pourra jamais devenir aussi brillante en Allemagne qu'en France, à cause de la constitution et des principes de religion, sur quoi il dit des choses assez mémorables. Il convient que la langue allemande cède à la langue française en harmonie; mais il soutient qu'elle la surpasse en force, et qu'elle est tout aussi harmonieuse que la langue grecque, qui avait autant de consonnes et plus de diphthongues. Il soutient enfin que, depuis le règne de V. M. et depuis le grand exemple qu'elle a donné à toute l'Europe de la culture de toutes les sciences, la littérature et la langue allemande avait pris un essor qui lui promettait en peu la préférence sur celles des autres nations. Enfin ce prélat appuie son sentiment par des raisons et des exemples qui rendent ce mémoire d'autant plus intéressant, qu'il s'accorde pour l'essentiel avec celui de V. M.

J'ai cru devoir exposer à V. M. mon faible sentiment sur cette pièce, autant que mon état présent me le permet. Je suis avec le plus profond respect, etc.

[Frédéric à M. de Hertzberg, Berlin, 4 janvier 1781]

Le Roi répondit à cette lettre par la suivante :

Berlin, 4 janvier 1781.

J'ai reçu par votre lettre d'hier la traduction de l'écrit de l'abbé Jérusalem sur la littérature allemande, que je vous renvoie avec bien des remercîments des peines que vous vous êtes données à ce sujet. Je dois cependant vous prier de vous ménager encore beaucoup, et de laisser tout ouvrage qui demanderait une tension d'esprit trop