<564> le massacre de Mérindol,a et vous trouverez sur votre chemin des bûchers encore fumants, où tant de malheureux ont perdu la vie, dévorés par les flammes. Ah! que l'Italie était préférable à la Provence! Le cordelier Ganganelli est tout accoutumé au mouvement de la terre, il consent tacitement qu'elle tourne, et vous n'auriez point eu à craindre à Rome le sort de Galilée. Mais enfin, tout philosophe que vous êtes, gardez-vous bien de résister à la Faculté; les médecins sont infaillibles autant que le pape à la tête d'un concile œcuménique. Je vous prie de vous bien imprimer cette vérité, afin que, s'ils vous ordonnent le voyage de Berlin pour vous rétablir l'estomac, vous ne manquiez pas de l'entreprendre, et surtout de ne vous point raviser, arrivé en Westphalie. Sur ce, etc.

89. AU MÊME.

(Novembre 1770.)

Je vous remercie des Mélanges de littérature que vous m'avez envoyés; puisque je ne puis pas avoir votre personne, je suis au moins bien aise d'avoir vos ouvrages. J'attends avec beaucoup d'impatience les nouveaux détails dont vous ornerez vos Essais de philosophie,b per-


a Allusion aux persécutions exercées contre les Vaudois. Le président de Thou en parle dans son Histoire universelle, publiée à la Haye, 1740, in-4, t. I, p. 542, chap. VI, année 1550. - Voici ce qu'en dit Daniel, dans son Histoire de France, année 1545 : « Les deux cantons de Mérindol et de Cabrières furent entièrement désolés; il y eut jusqu'à vingt-deux bourgs ou villages saccagés et brûlés, et quelques-uns de ces malheureux, qui avaient évité la mort, furent envoyés aux galères. »

b Frédéric veut parler des Éléments de philosophie, ouvrage qui forme le quatrième volume des Mélanges littéraires cités ci-dessus, p. 523, et qu'il nomme aussi Essais dans sa lettre à Voltaire, du 17 février 1770. Voyez t. XXIII, p. 169.