<171> chers. Elle devrait être, Sire, imprimée chez vous et sous les auspices de V. M., pour réunir dans le frontispice les deux noms les plus illustres de notre siècle.

Je suis avec le plus profond et le plus tendre respect, etc.

220. A D'ALEMBERT.

Le 22 juin 1780.

Nous croyions vous voir arriver d'un moment à l'autre, lorsque je reçus votre lettre. Quoiqu'elle m'ait fait plaisir, elle n'a pas remplacé la satisfaction de vous voir en personne; cependant les raisons qui vous ont empêché de faire le voyage sont si décisives, que je suis obligé d'y souscrire. Par quelle fatalité la gravelle va-t-elle se fourrer dans les reins d'un philosophe? Ne pouvait-elle pas se loger dans le corps d'un sorboniste, d'un fanatique, d'un capucin, ou d'autres animaux de cette espèce? Cette maladie est une des plus douloureuses dont la pauvre humanité soit affligée. Je vous conseille de vous servir d'un remède de madame Stephens; ici bien des personnes s'en sont trouvées soulagées, et quoique les Anglais soient en guerre avec les Français, je crois qu'un Français peut calculer avec Newton, penser avec Locke, et se guérir par madame Stephens. Voilà donc, mon cher Anaxagoras, ma sentence prononcée, et je ne vous reverrai plus que dans la vallée de Josaphat, s'il en est une. Pour Voltaire, je vous garantis qu'il n'est plus en purgatoire; après le service public pour le repos de son âme, célébré dans l'église catholique de Berlin,a le


a Ce service solennel fut célébré le 30 mai. M. Thiébault en a donné dans les journaux du temps une relation qu'il a aussi insérée dans ses Souvenirs de vingt ans de séjour à Berlin, quatrième édition, t. V, p. 298 et 299, en la faisant précéder de ces mots : « De retour (de la cérémonie) chez moi, j'expédiai pour le Roi, pour les gazetiers de la ville, pour le Courrier du Bas-Rhin et quelques journaux étrangers, des copies toutes préparées d'avance de la relation qui suit. »