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5. DU CHEVALIER DE CHASOT.

Lübeck, 16 juin 1761.



Sire,

J'ai l'honneur d'annoncer à Votre Majesté l'arrivée de la petite recrue que j'ai pris la liberté de lui offrir d'avance, il y a trois mois. C'est un gros garçon que M. le baron de Hecht,a son ministre, a tenu sur les fonts de baptême, et à qui il a donné (en présence de madame la chambellane d'Albedyhl de la part de la reine de Suède et du sénat de Lübeck) le nom de Frédéric-Ulric. Si ce garçon me ressemble, Sire, il n'aura pas une goutte de sang dans les veines qui ne soit à vous.

Le prince Ferdinand de Brunswic m'a envoyé de la part de V. M. un lieutenant des volontaires de Prusse, nommé Behrenkreutz, qui a fait dans une semaine vingt-sept des plus belles recrues; et si les plaintes de MM. de Raaben et Chambeaux ne l'interrompent pas, je vois qu'il pourra compléter ici un bataillon.

Le comte de Saint-Germain est passé par ici pour aller commander l'armée danoise; il a le cœur ulcéré de tous les torts qu'on a voulu lui faire en France, et de la façon dont on a interprété quelques lettres de V. M. qu'on a trouvées en arrêtant ses papiers. Les ennemis du comte ont fait mention de cette correspondance en public, sans expliquer qu'elle avait eu lieu avant cette dernière guerre.

Je me recommande, Sire, aux bontés de V. M.; je lui souhaite une bonne campagne, une parfaite santé, et que Dieu vous fasse bientôt jouir en paix, à Berlin, du fruit de vos travaux. Vous avez assez fait dans ce monde pour songer à vous reposer sous vos lauriers. J'espère avoir encore le bonheur de vous y faire ma cour, et de vous


a Frédéric, parrain de l'enfant, se fit représenter au baptême par le conseiller intime Jean-Jules de Hecht, son ministre résident dans le cercle de la Basse-Saxe.