<287>Il fait ici le plus beau temps du monde, un peu plus froid que chez vous; il gèle les nuits, mais on peut se promener quatre heures par jour sans se plaindre du froid.

Je ne sais de quoi je m'avise de vous entretenir de la pluie et du beau temps. Soyez sûre, ma chère sœur, que de toutes les nouvelles que vous m'écrirez, celle de votre santé me sera la plus agréable, étant avec la plus parfaite tendresse, ma très-chère sœur, etc.

285. A LA MÊME.

Le 26 décembre 1754.



Ma très-chère sœur,

J'ai eu le plaisir de recevoir une lettre de votre part, datée d'Avignon. Je m'étonne, ma chère sœur, que vous y souffriez du froid; c'est un climat bien doux, et qui, de plus, est béni par le pape. Je suis fort étonné de tout ce que vous me dites dans votre lettre; on voit cependant partout que plus un État est grand, et moins il peut être bien administré en détail. Le vieux proverbe est assez vrai, qui dit que le monde va par des abus. Comment est-il possible que le gouvernement, qui se trouve à Versailles, soit informé de toutes les déprédations des fermiers généraux qui sucent le peuple? Comment peut-il porter un remède à tant d'abus, lorsque ceux qui devraient les examiner ne sont ni à l'abri des corruptions, ni intègres? Une des sources des maux que vous remarquez en France est, sans contredit, la considération que les richesses donnent dans ce pays; on fait cas de ceux qui ont du bien, qui font une grande dépense, et personne ne s'enquiert par quelle infamie ils ont acquis ces richesses.