<297> que la guerre est aussi bien que déclarée entre la France et l'Angleterre, qu'il y a une révolte assez considérable en Hongrie, que le prince héréditaire de Hesse s'est fait catholique, que, etc., choses dont je pense que vous vous souciez aussi peu que moi. Je vais demain à Berlin voir notre chère mère et lui donner la fête pour son jour de naissance, qu'elle a voulu différer, pour que la dévotion des âmes pieuses n'en souffrît point. Nous aurons l'opéra d'Ezio. Ceux qui l'ont entendu disent que c'est un chef-d'œuvre; je vous en dirai des nouvelles après la représentation. Que vous dirai-je encore? Je fais bâtir à Sans-Souci une galerie de tableaux,a autre folie, si vous voulez; mais le monde ne va que par là, et si l'on ne voulait extraire de la vie des hommes que leurs actions raisonnables, l'histoire serait très-courte. Je connais, ma chère sœur, votre support et la condescendance que vous avez pour moi; cela me rend hardi à vous confier mes sottises.

J'ai vu le prince Frédéric,b qui revient de chez son frère. Il m'assure que le Duc vit assez bien avec son épouse; du moins garde-t-il tous les dehors de la bienséance, et c'est tout ce qu'on peut exiger d'un mari prince. Il dit que son frère fait une dépense épouvantable, sans avoir le sou en poche. Je l'ai prié de m'apprendre ce secret; si la guerre devient générale, je pourrais en avoir besoin. J'ai vu aussi le prince François,c qui m'a dit que ma sœur de Brunswic se portait à merveille, et que ses enfants devenaient grands comme des perches. Voilà à peu près où s'étend ma sphère pour les nouvelles que je puis vous donner, car c'est quelque chose de très-vieux que la tendre amitié et la parfaite considération avec laquelle je suis, etc.


a Voyez H. L. Manger's Baugeschichte von Potsdam, p. 221 et suivantes.

b Voyez ci-dessus, p. 264 et 282.

c Voyez t. IV, p. 242.