<XVII> nous les avons fidèlement copiés sur les autographes de Frédéric. La Margrave ne respecte pas davantage la vérité lorsqu'elle parle du traité conclu par son mari avec l'empereur Charles VII, et rompu peu de temps après.a « Depuis ce moment, dit-elle, la guerre fut déclarée; je ne reçus que des lettres très-dures du Roi, et j'appris même qu'il parlait de moi d'une manière fort offensante, et me tournait publiquement en ridicule. »b Ce passage est réfuté par les nos 117 et suivants de notre recueil. En réalité, ce n'est pas l'insignifiant traité de 1742 qui fut cause de la brouillerie de la princesse avec son auguste frère, brouillerie qui dura du 6 avril 1744 au 29 mars 1746. La vraie raison, la voici. La Margrave, voulant se débarrasser de mademoiselle de Marwitz sa rivale et autrefois son amie, l'avait mariée, ainsi que nous l'avons dit, à un officier autrichien. Comme elle avait toujours fait mystère au Roi de ses chagrins domestiques, il se sentit offensé par un acte dont il ne pouvait s'expliquer les motifs, et qui constituait une véritable violation des lois de la Prusse. De là naquirent des récriminations assez amères, et un long refroidissement. En cherchant à donner le change au lecteur de ses Mémoires sur la véritable cause de sa brouillerie avec Frédéric, la Margrave s'est privée de la faculté d'écrire la suite de cet ouvrage, qu'elle a annoncée quatre fois.c En effet, elle aurait dû commencer cette continuation par une rétractation de ce qu'elle avait dit de « la guerre déclarée en 1742. » Les Mémoires sont d'ailleurs contredits sur ce point par la correspondance de la Margrave avec son frère, tout aussi cordiale dans la période de 1742 au 6 avril 1744 qu'elle l'avait été auparavant,d

Tout ce que nous venons d'exposer montre donc, d'un côté, qu'une partie essentielle des Mémoires de la Margrave fut composée entre les années 1744 et 1746, temps où cette princesse cherchait à se distraire ainsi de ses chagrins domestiques, et où elle était aigrie contre son frère; de l'autre, qu'on ne peut, par cette dernière raison, accorder qu'une confiance limitée à un ouvrage dont l'auteur a, comme nous l'avons vu, altéré la vérité sur des faits importants.


a Mémoires, t. II, p. 317 et suivantes (1742).

b L. c., p. 324.

c L. c., p. 4, 227, 228 et 278.

d Voyez ci-dessous, p. 119-142, nos 155-142.