<34>là. Les troupes ont fait tout ce que de braves gens ont pu faire; mais il n'était pas dans le pouvoir humain de pouvoir prendre un ouvrage de la nature de celui-là l'épée à la main. De là, j'ai vu le fort de la Münde, qui s'est rendu le plus lâchement du monde. Ensuite l'on m'a mené à l'endroit où les trois bataillons français ont si lâchement capitulé,a action inouïe, et qui fera honte à la nation française jusqu'à nos arrière-neveux. Ensuite je me suis promené sur la mer, et je me suis diverti à voir comme elle ballottait notre navire. Il n'y avait aucun danger, mais cependant les vagues étaient fort émues du vent. L'on nous assure que Seckendorff fait le petit César au Rhin,b et qu'il veut se donner des airs avec Belle-Isle. J'avoue que je suis curieux de savoir ce qui en sera, et si l'on fera toujours la guerre sans coup férir. J'aimerais bien y être, et moi qui ne suis point chargé du fardeau pesant du bien d'un pays ou d'un État, je pourrais, sans que personne y perdît, m'y trouver, quitte à risquer ma cervelle. Le sort m'en veut cependant; car moi qui brûle d'ardeur pour le métier, je ne saurais parvenir à voir la moindre chose. Mais baste. Il suffit que je sente la peine que cela me fait, sans que j'en aille incommoder les autres. Adieu, mon très-cher frère; mes compliments à l'aimable accouchée. Je vous prie de lui dire que ses coups d'essai sont des coups de maître.c Je suis avec toute l'estime et tout l'attachement possible,



Mon très-cher frère,

Votre très-parfaitement fidèle ami,
cousin et frère,
Frederic.


a Voyez t. I, p. 189.

b L. c., p. 193.

c Voyez t. XXVII. I, p. 34.