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ŒUVRES DE FRÉDÉRIC LE GRAND TOME XXVII. SECONDE PARTIE.

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ŒUVRES DE FRÉDÉRIC LE GRAND TOME XXVII. SECONDE PARTIE. BERLIN IMPRIMERIE ROYALE (R. DECKER) MDCCCLVI

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CORRESPONDANCE DE FRÉDÉRIC II ROI DE PRUSSE TOME XII. SECONDE PARTIE. BERLIN IMPRIMERIE ROYALE (R. DECKER) MDCCCLVI

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CORRESPONDANCE TOME XII. SECONDE PARTIE.

<><I>

AVERTISSEMENT DE L'ÉDITEUR.

Cette seconde partie du vingt-septième volume renferme la suite de la correspondance de Frédéric avec ses parents, c'est-à-dire, les lettres qu'il a échangées avec sa grand' tante la margrave douairière Albert, avec ses oncles les margraves Henri et Charles, avec ses beaux-frères, ses neveux et ses nièces, avec son cousin le prince Guillaume IV d'Orange, enfin, avec la landgrave Caroline de Hesse-Darmstadt, belle-mère du Prince de Prusse : en tout douze groupes, comprenant cent soixante et dix lettres, dont cent cinquante et une du Roi.

I. CORRESPONDANCE DE FRÉDÉRIC AVEC MARIE-DOROTHÉE, VEUVE DU MARGRAVE ALBERT DE BRANDEBOURG. (16 et 20 avril 1741.)

La princesse Marie-Dorothée, fille de Frédéric-Casimir, duc de Courlande, née le 23 juillet 1684, épousa, le 30 octobre 1703, le margrave Albert-Frédéric, fils du Grand Électeur. Elle lui donna six enfants, entre autres les margraves Charles, Frédéric et Guillaume, qui se distinguèrent tous trois à la guerre. Les deux cadets moururent au champ d'honneur, l'un à la bataille de Mollwitz et <II>l'autre au siége de Prague. Quant à l'aîné, voyez ci-dessous, article III. Le 31 janvier 1712, la margrave Marie-Dorothée porta en grande pompe Frédéric, son petit-neveu, des appartements de la Princesse royale à la chapelle du château, où il fut baptisé. Veuve depuis le 21 juin 1731, elle mourut au château de Berlin le 17 janvier 1743.

Les deux lettres que nous présentons au lecteur reproduisent exactement les originaux conservés aux Archives de la maison royale.

II. CORRESPONDANCE DE FRÉDÉRIC AVEC LE MARGRAVE HENRI. (4 novembre 1782 - 24 septembre 1740.)

Le prince Henri-Frédéric, fils de Philippe, premier margrave de Brandebourg-Schwedt, et petit-fils du Grand Électeur, naquit le 21 août 1709, à Schwedt, où il mourut le 12 décembre 1788. Il succéda en 1771 à son frère Frédéric, et fut le dernier des margraves de Brandebourg-Schwedt. Dans sa jeunesse, il était l'ami intime de Frédéric;2_II-a mais il fut irrévocablement disgracié depuis la bataille de Mollwitz. Voyez t. V, p. 227; t. VI, p. 251; t. IX, p. 43; t. XVI, p. 91 et 291; t. XXVI, p. 636; et ci-dessous, p. 29. Voyez aussi les Mémoires de Wilhelmine, margrave de Baireuth, t. II, p. 192-194, et les Beiträge zur Geschichte und Statistik der Stadt und Herrschaft Schwedt (par M. de Probst), Schwedt, 1824, p. 61.

Nous imprimons quatre lettres de Frédéric au margrave Henri, dont trois en allemand; nous les avons toutes copiées sur les autographes, qui appartiennent à M. le général de Gansauge. La lettre du Margrave à Frédéric est tirée de l'ouvrage, Versuch einer historischen Schilderung der Residenzstadt Berlin (par M. König), t. V, partie II, p. 109.

<III>

III. CORRESPONDANCE DE FRÉDÉRIC AVEC LE MARGRAVE CHARLES. (17 octobre 1781 - février 1753.)

Frédéric-Charles-Albert, fils du margrave Albert de Brandebourg, naquit le 10 juin 1705. Il mourut à Breslau, le 22 juin 1762, après quarante-huit ans de service dans l'armée. Depuis la prise de Glogau, en 1741, jusqu'à la fin de sa carrière, il prit part à toutes les guerres où la Prusse fut engagée, et y déploya la même bravoure que ses deux frères cadets, les princes Frédéric et Guillaume, qui, comme nous l'avons dit, trouvèrent une mort glorieuse sur le champ de bataille.2_III-a

Le margrave Charles, grand-maître de l'ordre de Malte dans les États prussiens depuis 1731,2_III-b général d'infanterie depuis le 24 mai 1747, et blessé aux batailles de Mollwitz, de Hochkirch et de Torgau, est souvent mentionné de la manière la plus honorable dans les Œuvres de Frédéric, par exemple, t. III, p. 117 à 119, où le Roi, racontant la brillante affaire de Jägerndorf, du 22 mai 1745, s'exprime en ces termes : « Le Margrave donna dans cette journée des marques de valeur dignes du sang de son grand-père l'électeur Frédéric-Guillaume. » ..... « Il était nécessaire d'exalter dans l'armée la glorieuse action de Jägerndorf. Le Margrave, le général Schwerin, et ceux qui s'y étaient signalés, furent reçus comme en triomphe. » Cependant Frédéric, se fondant sur un ancien usage, refusa à ce prince, en 1762, la dignité de feld-maréchal, qu'il avait demandée lorsque les généraux comte de Gessler et Hans de Lehwaldt avaient passé devant lui.2_III-c A la nouvelle de sa mort, le Roi, qui l'avait toujours beaucoup aimé,2_III-d écrivit au prince Henri, le 28 juin 1762 : « Le pauvre margrave est mort; je le regrette du fond de mon cœur; c'était un bien honnête homme, bon patriote, et mon bon et ancien ami; »2_III-e au marquis d'Argens, le 4 juillet 1762 : <IV>« Mon pauvre margrave Charles est mort; j'en suis sensiblement affligé; c'était bien le plus honnête homme du monde. »2_IV-a

Comme on le voit par ce qui précède, c'est ajuste titre que ce prince a obtenu une place sur le piédestal de la statue équestre de Frédéric, par Chrétien Rauch.

Les dix premières lettres de Frédéric au margrave Charles que nous donnons ici sont tirées de l'Officier-Lesebuch (publié par C.-D. Küster), Berlin, 1796, t. IV, p. 68-92. Nous nous sommes borné à y rectifier quelques noms de personnes et trois dates inexactes. Le numéro 11 se trouve dans l'ouvrage de M. de Schöning, Der siebenjährige Krieg, t. III, p. 370 et 371. Les trois lettres qui suivent sont extraites de notre Urkundenbuch zu der Lebensgeschichte Friedrichs des Grossen, t, I, p. 25, 102, 108 et 109. Enfin, les trois lettres écrites par Frédéric en 1752 ont été copiées sur les originaux, aux Archives royales, ainsi que la lettre du Margrave, du 31 janvier 1753, et la réponse du Roi.

IV. CORRESPONDANCE DE FRÉDÉRIC AVEC LE DUC CHARLES DE BRUNSWIC. (26 octobre 1735 - 1er octobre 1745.)

Charles-Guillaume-Ferdinand, duc de Brunswic-Lunebourg, naquit le 1er août 1713. Il épousa, le 2 juillet 1733, la princesse Charlotte de Prusse, troisième sœur de Frédéric. Il succéda en 1735 à son père, le duc Ferdinand-Albert, et il mourut le 26 mars 1780. Frédéric rend aux qualités de ce prince le témoignage le plus flatteur dans le dernier paragraphe de son Testament, du 8 janvier 1769 : « Je nomme, dit-il, pour mon exécuteur testamentaire le duc régnant Charles de Brunswic, de l'amitié, de la droiture et de la probité duquel je me promets qu'il se chargera de faire exécuter ma dernière volonté. »2_IV-b Nous devons à la direction des Archives du duché de Brunswic les dix-sept lettres que nous imprimons, dont seize sont de Frédéric, et une seule, le no 13, du Duc.

<V>

V. CORRESPONDANCE DE FRÉDÉRIC AVEC LE PRINCE FRÉDÉRIC DE BRUNSWIC. (Octobre 1763 - 19 juin 1786.)

Frédéric-Auguste, duc de Brunswic (-Oels), fils puîné2_V-a du duc Charles et de la princesse Charlotte de Prusse, naquit à Brunswic le 29 octobre 1740.2_V-b A l'âge de dix-neuf ans, il entra dans l'armée de son père, et mérita déjà dans la campagne de 1761 les éloges du Roi, qui parle de lui en ces termes, dans son Histoire de la guerre de sept ans : « Ce jeune prince, plein d'honneur et d'une noble ambition, pour son coup d'essai força le poste que les ennemis avaient au village d'Oelper, se jeta dans Brunswic, en fit lever le siége, et hâta l'évacuation de Wolfenbüttel. Ainsi Alexandre, au sortir de l'enfance, dans l'armée de son père Philippe, battit les Athéniens avec l'aile de cavalerie qu'il commandait. »2_V-c Le prince Frédéric entra au service de la Prusse2_V-d le 1er octobre 1763, et fut nommé lieutenant-général, par brevet daté du 11 mars 1762. Il passa dès lors la plus grande partie de son temps auprès du Roi, qui aimait sa conversation et recherchait sa société.2_V-e Le 6 septembre 1768, il épousa, à Breslau,2_V-f la princesse Frédérique-Sophie-Charlotte-Auguste, fille et héritière du dernier duc régnant de Würtemberg-Oels. Le 22 mars 1773, il soumit son invention des baguettes cylindriques à l'approbation du Roi, qui les introduisit aussitôt dans toute son armée. Il fut élevé, le 21 mai 1787, au grade de général d'infanterie, et mourut à Weimar, le 8 octobre 1805.

On trouve de plus amples détails sur la vie et principalement sur les campagnes de ce prince distingué, dans l'ouvrage très-rare intitulé : Militärische Ge<VI>schichte des Prinzen Friedrich August von Braunschweig-Lüneburg, Königlich Preussischen Generals der Infanterie, Mitgliedes der Akademie der Wissenschaften, nunmehrigen regierenden Herzogs zu Braunschweig-Oels und Bernstadt. Oels, 1797, quatre cent quatre-vingt-dix-huit pages in-4, avec seize planches et un portrait. Cet ouvrage a été composé, d'après le journal du prince, par le capitaine prussien de Langwehr, son aide de camp dans la campagne de 1793 contre les Français.

Les Œuvres du Roi renferment deux Épîtres, l'une, du 20 février 1765,2_VI-a intitulée : A mes neveux les princes Frédéric et Guillaume de Brunswic, et l'autre, de 1774 :2_VI-b Au prince Frédéric de Brunswic.

Des seize lettres de Frédéric au prince que nous imprimons, nous en tirons huit2_VI-c des Archives du duché de Brunswic, et six2_VI-d des Archives de l'État, à Berlin; le numéro 5 est la reproduction de la pièce et le numéro 6 celle du fac-similé qui se trouvent dans l'ouvrage du général d'Etzel, Beschreibung der Saekular-Feier der Aufnahme Friedrichs des Grossen, Königs von Preussen, in den Freimaurer-Bund. Berlin, 1838, p. 127 et suivantes.

VI. CORRESPONDANCE DE FRÉDÉRIC AVEC LE DUC FERDINAND DE BRUNSWIC (8 octobre 1750 - 2 avril 1762.)

Nous avons donné dans les volumes précédents des détails suffisants sur la vie de ce prince célèbre, un des grands capitaines de la guerre de sept ans.2_VI-e Il était beau-frère de Frédéric, qui l'éleva au grade de feld-maréchal, et dès 1740, il fut son élève dans la carrière militaire, son compagnon d'armes, son ami. Peu d'an<VII>nées après la paix de Hubertsbourg, le prince Ferdinand se retira du monde pour s'adonner à la vie contemplative, et dès lors Frédéric n'eut que rarement la satisfaction de voir, soit à Brunswic, soit à Sans-Souci, son digne parent, qu'il honora toujours comme le méritaient ses brillants faits d'armes et ses qualités morales.2_VII-a Le Roi s'est plu à immortaliser dans ses ouvrages historiques les victoires de ce prince aussi infatigable à la guerre que distingué par ses vertus privées, et il a composé pour lui l'Ode au prince Ferdinand de Brunswic sur la retraite des Français en 1758.2_VII-b Il existe en manuscrit une volumineuse collection de lettres officielles échangées, de 1743 à 1786, par Frédéric et son beau-frère, et écrites soit en français, soit en allemand. Les volumes qui contiennent les originaux du Roi et les minutes du prince se trouvent aux Archives du grand état-major de l'armée, et celles qui renferment les originaux du prince et les minutes du Roi, aux Archives de l'État. Le grand état-major a publié des extraits fort instructifs de cette collection si précieuse pour l'historien, dans les Denkwürdigkeiten für die Kriegskunst und Kriegsgeschichte, Berlin, 1819 et 1820, in-8 : le quatrième cahier renferme, p. 90-171, la correspondance du 16 août 1756 au 26 octobre 1757; et le sixième cahier, p. 1-95, la correspondance du 24 novembre 1757 au 7 juillet 1758. Cet intéressant travail a été continué par les mêmes éditeurs dans le Militair-Wochenblatt, dont les numéros 1-5 de l'année 1841 présentent la continuation de la campagne de 1758, et les numéros 6-10 de l'année 1838, la campagne de 1759.

Notre recueil se compose de dix-sept lettres, dont seize de Frédéric. Nous les avons extraites nous-même des Archives du grand état-major, et nous les donnons comme un échantillon des relations de ces deux princes éminents, qui d'ailleurs n'entretinrent pas de correspondance purement amicale et familière.

<VIII>

VII. CORRESPONDANCE DE FRÉDÉRIC AVEC GUSTAVE III, ROI DE SUÈDE. (11 avril 1771 - 27 octobre 1783.)

Gustave III, roi de Suède, né le 24 janvier 1746, était fils d'Adolphe-Frédéric, mort le 12 février 1771, et de la princesse Louise-Ulrique de Prusse, cinquième fille de Frédéric-Guillaume Ier. Il mourut, le 29 mars 1792, des suites de l'attentat commis sur sa personne.

Ce prince déplaisait à Frédéric, qui le juge souvent avec sévérité, surtout dans quelques lettres inédites à son frère Henri. Il dit entre autres, dans celle du 19 mai 1778 : « Tous ces enfants2_VIII-a ne m'ont jamais plu, et j'avoue que je n'ai rien senti pour eux. »

Nous tirons des Archives royales de Stockholm les dix-huit lettres de Frédéric que nous présentons au lecteur; quant aux deux lettres du roi de Suède (les numéros 10 et 14), nous les avons extraites de la Correspondance inédite relative à l'histoire de Suède 1772-1780, publiée à Stockholm, en 1843, par M. le baron de Manderström.

VIII. LETTRES DE FRÉDÉRIC A LA PRINCESSE SOPHIE-ALBERTINE DE SUÈDE. (12 janvier 1772 - 9 novembre 1782.)

La princesse Sophie-Albertine, sœur de Gustave III, roi de Suède, naquit le 8 octobre 1753. Elle fut élue abbesse de Quedlinbourg le 15 octobre 1787. Elle résigna cette charge en 1816, et vécut dès lors au château de Tulgarn en Suède, où elle mourut le 17 mars 1829. Après la mort de son père, la princesse Sophie-<IX>Albertine accompagna la reine Ulrique à Berlin; ces deux augustes personnes y arrivèrent le 3 décembre 1771, et retournèrent chez elles le 4 août de l'année suivante.2_IX-a

Nous imprimons les quatre lettres adressées par Frédéric à la princesse, d'après des copies exactes que nous devons à M. Gustave Andersson, vice-recteur de l'école principale (Kathedralschule) de Lund. Une copie également fidèle de la troisième de ces lettres, du 11 août 1782, nous avait été communiquée auparavant par les Archives royales de Stockholm.

IX. LETTRES DE FRÉDÉRIC AU PRINCE GUILLAUME V D'ORANGE. (18 octobre 1767 - 1772.)

Guillaume V, prince d'Orange, naquit le 8 mars 1748. Il épousa, le 4 octobre 1767, Frédérique-Sophie-Wilhelmine, fille unique du Prince de Prusse défunt, née le 7 août 1751, dont Frédéric faisait beaucoup de cas.2_IX-b En 1751, après la mort de son père Guillaume IV, il devint stadhouder héréditaire des Pays-Bas, et il mourut à Brunswic le 9 avril 1806. Nous avons tiré des Archives du duché de Nassau nos quarante lettres de Frédéric à ce prince. Huit de ces pièces, les numéros 2, 9, 10, 12, 14, 16, 20 et 36, font partie du recueil de M. Friedemann, intitulé : Zeitschrift für die Archive Deutschlands, Gotha, 1846, 1er cahier, p. 65-70.

<X>

X. LETTRE DE LA PRINCESSE WILHELMINE D'ORANGE A FRÉDÉRIC. (23 juillet 1769.)

Cette princesse, dont il a été fait mention dans l'article précédent, mourut à Loo, le 9 juin 1820. Nous tenons sa lettre, du 29 juillet 1769, de feu madame la comtesse d'Itzenplitz-Friedland.

XI. LETTRES DE FRÉDÉRIC AU PRINCE GUILLAUME IV D'ORANGE. (12 janvier 1735 et 27 mars 1740.)

Guillaume IV Charles-Henri-Friso, prince d'Orange et stadhouder héréditaire des Pays-Bas, naquit le 1er septembre 1711, et mourut le 22 octobre 1751. Il avait épousé, le 25 mars 1734, la princesse Anne, fille de George II, roi d'Angleterre, née le 2 novembre 1709. Il était ainsi cousin par alliance de Frédéric, qui l'honorait d'une amitié particulière.2_X-a

Les deux lettres que nous présentons au lecteur nous ont été fournies par les Archives du duché de Nassau. Elles se trouvent aussi dans le recueil Friedemann ci-dessus mentionné, Ier cahier, p. 64 et 65.

Nous avons imprimé dans notre t. XXV, p. 453 et 454, une lettre de Frédéric au même prince d'Orange, de Ruppin, 8 février 1736.

<XI>

XII. CORRESPONDANCE DE FRÉDÉRIC AVEC LA LANDGRAVE CAROLINE DE HESSE-DARMSTADT. (30 octobre 1757 - 27 mars 1774)

Henriette-Christine-Caroline-Louise, princesse de Deux-Ponts-Birkenfeld, née le 9 mars 1721, épousa, le 12 août 1741, le prince héréditaire, depuis le 17 octobre 1768 landgrave régnant Louis IX de Hesse-Darmstadt, qui servit dans l'armée de Frédéric de 1743 à 1757, et fut chef du régiment d'infanterie no 12 (t. IV, p. 131), tenant garnison à Prenzlow en temps de paix,2_XI-a En 1769, le Prince de Prusse épousa en secondes noces la princesse Frédérique, fille de la Landgrave, et sœur de la princesse Wilhelmine qui devint grande-duchesse de Russie en 1773. Ces diverses relations de famille amenèrent plusieurs fois la landgrave Caroline à Potsdam et à Berlin. Elle mourut le 30 mars 1774, très-estimée de Frédéric, qui fit élever un monument sur sa tombe, dans le jardin du château de Darmstadt.

La correspondance du Roi avec la landgrave Caroline se compose de vingt-cinq lettres, dont dix-huit de Frédéric. Elle est tirée des Archives de la maison royale, qui conservent les autographes de la Landgrave et des copies exactes des lettres de Frédéric, communiquées par le gouvernement du grand-duché de Hesse. Les deux lettres de la Landgrave à son mari, ajoutées en appendice, sont également la reproduction de copies qui se trouvent aux Archives de la maison royale.

Il a souvent été fait mention de la landgrave Caroline et de sa famille dans les volumes précédents, par exemple t. VI, p. 25, 63 et 134; t. XX, p. XII, art. IX, et p. 205 et 206; t. XXIV, p. 189, 192, 297 et 666.

Nous regrettons de ne pas posséder d'autres correspondances familières de Frédéric avec ses parents. On trouve t. XIII, p. 194, une lettre qu'il a adressée <XII>à son beau-frère le margrave de Baireuth. Notre ouvrage, Friedrich der Grosse, eine Lebensgeschichte, renferme, t. II, p. 367, un billet de lui au prince héréditaire de Brunswic. Quant à son neveu le Prince de Prusse, nous ignorons si le Roi lui a jamais écrit.

Berlin, 6 janvier 1854.

J.-D.-E. Preuss,
Historiographe de Brandebourg.

<1>

I. CORRESPONDANCE DE FRÉDÉRIC AVEC MARIE-DOROTHÉE, VEUVE DU MARGRAVE ALBERT DE BRANDEBOURG. (16 ET 20 AVRIL 1741.)[Titelblatt]

<2><3>

1. A LA MARGRAVE ALBERT.

Quartier général d'Ohlau, 16 avril 1741.



Madame ma tante,

C'est avec une sensibilité extrême que je me vois obligé d'entretenir Votre Altesse sur le déplorable sujet de la mort inopinée du brave prince Frédéric son digne fils, qui vient de nous être enlevé dans la bataille de Mollwitz.2_3-a Je comprends une partie de la vivacité de votre douleur par celle que cette perte irréparable m'a causée; et plus j'ai connu et estimé ses belles et grandes qualités, plus je trouve de sujet de m'affliger avec V. A. d'un coup si fatal pour elle, pour moi et pour toute notre maison. Cependant vous agréerez, s'il vous plaît, que, en partageant votre juste tristesse, je l'envisage comme l'effet de la sainte volonté du suprême arbitre de la vie, en le suppliant de vouloir répandre sur le cœur accablé de V. A. ses consolations divines et efficaces, afin de la soutenir dans ces circonstances infortunées. Je ferai tout ce qui dépendra de moi pour vous convaincre de la sincérité de ma compassion, et de la parfaite amitié avec laquelle je suis,



Madame ma tante,

de Votre Altesse
le très-bon et très-fidèle cousin,
Federic.

<4>

2. DE LA MARGRAVE ALBERT.

Berlin, 20 avril 1741.



Sire,

S'il y a quelque chose au monde qui puisse arrêter le cours de mes larmes et me donner de la consolation, c'est sans doute la très-gracieuse part que Votre Majesté daigne prendre à la douloureuse perte que j'ai faite d'un fils que j'aimais tendrement. Ces marques des bontés royales que V. M. me témoigne dans cette occasion, jointes aux réflexions d'une entière résignation aux ordres de la Providence, m'engageront à modérer ma tristesse et à adorer ses arrêts impénétrables. C'est cette Providence que j'invoque aussi avec confiance pour la conservation de V. M. et pour tout ce qui peut combler ses désirs; et, pénétrée de la plus vive reconnaissance des hautes grâces et bienveillances de V. M., je la supplie de daigner me les continuer, de même qu'aux deux fils qui me restent, et d'être persuadée de la très-respectueuse soumission avec laquelle je suis,



Sire,

de Votre Majesté
la très-humble et très-obéissante servante,
Marie-Dorothée, M. d. B.

<5>

II. CORRESPONDANCE DE FRÉDÉRIC AVEC LE MARGRAVE HENRI (4 NOVEMBRE 1732 - 24 SEPTEMBRE 1740.)[Titelblatt]

<6><7>

1. AN DEN MARKGRAFEN HEINRICH.

Wusterhausen, den 4. November 1732.



Mein lieber Bruder,

Eben erfahre die betrübte Zeitung, dass Du Dir hast das Bein gebrochen. Ich bin herzlich betrübt darüber und kann mich nicht zufrieden geben. Um Gottes willen, befiehl doch Asseburg, dass er mir schreibe, wie es mit Dir stehet und ob es was zu sagen hat. Lasse doch meinen Regimentsfeldscheer kommen, um dass er das Bein wieder curiren möge. Wäre ich zu Hause, so säumte ich nicht einen Augenblick, bei Dir zu kommen. Ich versichere Dir, dass ich vom Grunde meines Herzens betrübt bin, und dass kein Mensch in der Welt und kein Bruder Dich lieber haben kann wie ich. Adieu.

Friderich.

Lasse doch Asseburg durch Stafetten antworten, auf dass ich bald erfahre wie es mit Dir ist.

2. AN DENSELBEN.

Ruppin, den 21. October 1733.



Mein lieber Bruder,

Ich habe mit dem grössten Leidwesen von der Welt durch Grützmacher erfahren das Unglück, das Dich getroffen, und bin so be<8>stürzt darüber, dass nicht weiss, was dazu sagen soll. Du kannst versichert sein, dass mein Tage nicht vergessen werde, was ein Freund gegen einen anderen und ein Bruder gegen den anderen schuldig ist. Ich bin aber von der Sache nicht informiret, dass also nicht weiss, wie sie aneinander hängt; also kann auch nicht wissen, wie sie der König aufgenommen hat. Was Dir aber aus aufrichtigem Herzen zu rathen ist, wäre, wenn die Sache verhört wird, jederzeit die reine Wahrheit, ohne nichts zu verhalten, zu sagen, indem durch geringe Excusen die Sachen immer schlimmer gemacht werden, und den König auf's demüthigste gebeten und auf das allersubmisseste, Dir Deine Fehler zu verzeihen. Ich bin gewiss versichert, dass Du es nicht werdest aus Malice gethan haben, und solches dem Könige geschrieben, ihm dabei vorgestellt, dass Du diese und noch mehr Strafen werth wärest, aber bätest den König ganz submisse, aus besonderer Clemence Dir dieses nicht so schlimm zuzurechnen, ja, Du unterwürfest Dich aller Strafe, wenn er Dir nur nicht möchte ungnädig werden. Indessen beklage vom Grunde meiner Seele das Unglück, wo Du drein gerathen, und versichere Dir, dass wie ein ehrlicher Kerl gegen Dich mich verhalten werde, so dass Du jederzeit mich für meines lieben Bruders ganz ergebensten Freund, Bruder und Diener wirst erkennen.

FRIDERICH.

<9>

3. AU MÊME.

Berlin, 26 novembre 1733.



Mon très-cher frère,

C'est demain un très-grand jour pour vous, et que vous devez considérer comme un des plus grands de votre vie, vous tirant d'un très-mauvais pas où vous vous êtes trouvé embarrassé. Comme votre ami, vous pouvez compter que j'ai fait tout ce qui a dépendu de moi pour votre élargissement. A la fin, grâces au ciel, on y a réussi. Pensez donc bien à ce que vous avez à faire, et permettez-moi qu'en vrai ami je vous conseille ce qu'il me semble qui serait à propos et nécessaire.

Premièrement, dans l'entretien que vous aurez avec le Roi, je crois que ce sera dans sa chambre, il faut donc faire de grandes soumissions et vous mettre à genoux, remercier le Roi de la grâce qu'il vous vient de faire, l'assurer que vous reconnaissez vos fautes comme vous le devez, et que vous en avez un vrai regret; que vous protestiez au Roi que jamais de la vie il n'entendrait rien parler de vous qui pût lui déplaire, et que le bon Dieu vous avait fait la grâce de vous faire reconnaître toutes vos fautes, et que vous aviez eu le temps de les regretter.

Pour ce qu'il s'agit de votre conduite, plus elle sera retirée, et mieux ce sera, car il n'y a que ce moyen-là de redresser le passé. Enfin, après tout, permettez-moi de vous dire, mon très-cher frère, que les choses qui se sont passées n'ont pas été tout à fait dans l'ordre, et que, si j'ose vous le dire, il y a eu même de la brutalité dans votre fait. Je crois que vous avez eu le temps de voir les tristes conséquences que de pareilles choses attirent après soi. Enfin je suis bien persuadé que vous saurez une autre fois vous modérer plus que vous n'avez fait par le passé, et imposer de justes bornes à la joie, afin<10> qu'elle ne dégénère pas en excès. Voilà les conseils que l'amitié que j'ai pour vous me dicte, mon très-cher frère. J'espère que vous voudrez les prendre de cette façon, comme venant d'un ami qui se fera un plaisir et un devoir de vous témoigner, en quelque occasion que ce soit, qu'il est avec tout l'attachement et l'amitié du monde,



Mon très-cher frère,

Votre fidèle cousin et serviteur,
Frederic.

4. AN DENSELBEN.

Ruppin, den 23. Februar 1734.



Mein lieber Bruder,

Ich habe durch den Lieutenant Asseburg Dein Schreiben mit vielem Plaisir erhalten, und kann Dir zur Antwort geben, dass der König jetzt recht gut von Dir zu mir gesprochen hat, und glaube, dass es keinen übeln Effect thun werde, wenn Du bei dem Könige anfrügest, um auch mit den zehntausend Mann, so der König nach dem Rhein schicket, mit zu gehen, und die Campagne am Rhein als Volontaire verrichten thätest. Ich gehe mit selbigem Corps mit; also zweifle nicht, der König werde Dir es erlauben. Ich nehme mir die Freiheit, Dir hiermit einige Bouteillen Ungerischen und Champagner-Wein zu schicken, wünsche dass er Dir sehmecken möge, bin übrigens mit vieler Amitié,



Mein lieber Bruder,

Dein ganz ergebener Diener und Bruder,
Friderich.

<11>

5. VON DEM MARKGRAFEN HEINRICH.

Potsdam, den 24. September 1740.



Allerdurchlauchtigster, etc.,

Ew. Königliche Majestät haben allergnädigst befohlen, dass mich künftighin in Berlin aufhalten soll und in meiner Mutter Hause wohnen. Ich werde diesen allergnädigsten Befehl, wie alle andern, mit allerunterthänigstem Gehorsam befolgen,2_11-a um so viel mehr mir derselbe die allererwünschteste Gelegenheit giebt zu der Ehre, Ew. K. M. täglich meine allerunterthänigste Devotion persönlich zu bezeigen. Ew. K. M. sind aber meine Umstände mehr als zu wohl bewusst, wie ich in Prenzlow2_11-b bisher meine Menage als eine Privat-Person sehr genau führen müssen, und nicht standesmässig zu leben gehabt habe. Nun lässt mir zwar Ew. K. M. Gnade und Huld, so Allerhöchstdieselben jederzeit gegen mich blicken lassen, nicht den geringsten Zweifel zurück, Ew. K. M. werden meinen Bedürfnissen allergnädigst abhelfen und mich hinlänglich väterlich versorgen; ich habe aber dennoch meiner Schuldigkeit zu sein erachtet, Ew. K. M. gegenwärtig darum allerunterthänigst zu bitten, und zugleich zu ersuchen, an meine Mutter, wegen des Hauses so ich bewohnen soll, allergnädigst schreiben zu lassen. Ich verharre mit allem ersinnlichen Respect bis an mein Ende



Ew. Königlichen Majestät
etc. etc.

Heinrich.

<12><13>

III. CORRESPONDANCE DE FRÉDÉRIC AVEC LE MARGRAVE CHARLES. (17 OCTOBRE 1731 - FÉVRIER 1753.)[Titelblatt]

<14><15>

1. AU MARGRAVE CHARLES.

Carzig, 17 octobre 1739 (1731).



Monsieur mon très-cher cousin,

J'ai appris avec bien du chagrin que votre fièvre continuait toujours; mais permettez, cher prince, de vous dire qu'il y a aussi un peu de votre faute à ce que vous ne vous portez pas mieux. Vous négligez trop ce qui peut contribuer à votre guérison, et de la nature dont vous dites que votre fièvre est, l'on ne peut y prendre assez de précautions. Quoi! voudriez-vous donc que votre belle vie fût tranchée dans un âge et dans un temps qui nous promet tant pour le futur? Faudra-t-il perdre l'espérance de voir en vous un prince qui est parfaitement égal à feu son grand-père de glorieuse mémoire, et qui le surpasse par beaucoup d'endroits? Voudriez-vous me priver d'un ami sur l'amitié duquel et sur le mérite duquel je fais tant de cas? Voudriez-vous me causer le mortel chagrin de me faire pleurer à jamais votre perte, la perte de la personne du monde que j'estime le plus? Mais je vous fais tort; je sais, mon cher prince, que vous avez trop d'amitié pour moi pour ne vous pas ménager plus que vous ne faites. Vous êtes trop chrétien et trop raisonnable pour vouloir omettre aucun des moyens requis pour votre convalescence; et afin que je n'aie aussi rien à reprocher à mon amitié, permettez-moi de vous dire que je crois absolument nécessaire, dans l'état où vous êtes, que vous vous serviez d'un médecin, et même des plus habiles; un chirurgien, tout habile qu'il est, ne peut jamais si bien guérir des maladies que des médecins, et quand une fois ces fièvres dégénèrent en fièvres malignes, ces maux enracinés sont très-difficiles et toujours<16> très-périlleux à guérir. Je suis persuadé que vous n'interpréterez pas ce conseil à mal, et que vous aurez assez d'amitié pour moi pour le suivre. Je ferai, de mon côté, les vœux les plus ardents pour votre parfaite guérison, que personne ne souhaite plus passionnément que celui qui a l'honneur de se dire,



Monsieur mon très-cher cousin,

Votre très-parfait et fidèle ami,
cousin et serviteur,
Frideric.

2. AU MÊME.

Massin,2_16-a 19 octobre 1731.



Monsieur mon très-cher cousin,

J'ai reçu avec beaucoup de plaisir la lettre que vous eûtes la bonté de m'écrire hier. J'espère que l'état de votre précieuse santé ira de mieux en mieux, et que nous en serons quittes, pour le coup, pour les cruelles alarmes que votre maladie nous a causées. J'ai été hier à la chasse du cerf,2_16-b et j'en ai tiré quelques-uns avec l'arquebuse, dont je prends la liberté de vous en envoyer un. Vous verrez par là, mon cher prince, combien je pense à vous, quoique c'est bien plus que je le puis marquer ou dire. J'espère que Bardeleben me rendra ce témoignage; il peut le rendre en bonne vérité, car je ne le vois jamais que je ne l'entretienne de mon cher prince. Je l'aime, parce qu'il vous appartient, et par l'attachement sincère qu'il a pour vous.<17> C'est l'unique voie par où l'on peut se recommander chez moi, n'ayant personne que j'aime si tendrement que celui dont je serai jusqu'au tombeau, etc.

3. AU MÊME.

Cüstrin, 19 décembre 1739 (1731).



Monsieur mon très-cher frère,

J'ai reçu avec bien du plaisir votre honorée du 18; mais, à vous parler franchement, j'y trouve un peu trop de compliments. Vous m'aviez promis, cher frère, de couper court là-dessus; et permettez que, malgré cela, je vous dise que vous ne tenez pas tout à fait parole, ce qui me fait craindre que, quand j'aurai le plaisir de vous voir à Soldin, nous ne nous consumions en compliments. Je vous prie, si vous m'aimez, n'en faites point; cela est si guindé parmi des parents, et principalement insupportable quand on les hait comme moi. J'espère que vous m'épargnerez ce chagrin, et que, au lieu de trouver un maître des cérémonies à Soldin, j'y trouverai un cher frère qui sera parfaitement persuadé que je serai jusqu'au tombeau

Votre parfait ami, frère et serviteur.
Vale.
Frideric.

<18>

4. AU MÊME.

Ruppin, 17 décembre 1733.



Monsieur mon cousin,

Je vous ai bien de l'obligation de l'attention que vous témoignez avoir pour moi, par rapport au capitaine de Keyserlingk; et je vous prie, monsieur, de vouloir bien faire tout ce qui dépendra de vous afin qu'il obtienne la croix,2_18-a ce qui me fera infiniment de plaisir, et je ne laisserai pas de vous marquer en toute occasion mon amitié et la passion très-sincère avec laquelle je suis,



Monsieur mon cousin,

Votre parfaitement affectionné
ami et cousin,
Frederic.

5. AU MÊME.

Ruppin, 14 avril 1735 (1734).



Monsieur mon cousin,

Comme je vois par votre lettre du 11 de ce mois que vous n'avez pas besoin d'un More, je crois que chacun de nous fera bien en gardant ce qu'il a. Au reste, vous me ferez la justice, monsieur mon cousin, d'être entièrement persuadé qu'il n'y a rien qui me donne plus de plaisir que de pouvoir vous rendre quelque service pour vous convaincre de l'amitié et de l'estime avec laquelle je suis, etc.<19> J'ai demandé au Roi pour aller en campagne;2_19-a ne voulez-vous pas demander aussi?2_19-b

6. AU MÊME.

Ruppin, 11 novembre 1735.



Monsieur mon cousin,

Il y a encore à Berlin un domestique du feu margrave Louis,2_19-c nommé Jänichen; et comme il a été jusqu'ici sans emploi et dans l'incertitude quel parti prendre, je ne saurais m'empêcher de vous prier, monsieur mon cousin, de vouloir bien le prendre en service jusqu'à ce qu'il s'offre une occasion favorable pour le bien placer. Je suis entièrement persuadé, monsieur mon cousin, que vous ne me le refuserez pas, en qualité d'héritier du feu margrave; et si vous me trouvez capable de vous rendre quelque service en échange de celui que je viens de vous demander, ce sera à vous, monsieur mon cousin, de disposer librement de mes forces, puisque je montrerai partout l'amitié et l'estime avec laquelle je suis, etc.

<20>

7. AU MÊME.

Rheinsberg, 3 décembre 1737.



Monsieur mon cousin,

Je vous suis infiniment obligé des poissons marinés que vous m'avez fait le plaisir de m'envoyer, et je vous prie, mon cher prince, d'être entièrement persuadé que je serai toujours charmé de trouver quelque occasion pour vous faire plaisir, étant avec bien de l'amitié et de l'estime, etc.

8. AU MÊME.

Ruppin, 4 septembre 1738.



Monsieur mon cousin,

Il y a, à ce qu'on m'a dit, dans la compagnie de Spiess de votre régiment un soldat, nommé Lamcke, qui est très-savant en médecine. Je vous prie, mon cher prince, de vouloir bien permettre qu'il vienne ici pour quelque temps, en cas qu'il n'y ait rien à craindre pour la désertion. Je profite de cette occasion pour vous assurer de l'amitié et de l'estime avec laquelle je suis très-parfaitement, etc.

<21>

9. AU MÊME.

Rheinsberg, 15 septembre 1749.



Mon cher cousin,

Je vous suis fort obligé du soin que vous avez bien voulu vous donner touchant l'inscription de mes deux pages de Möllendorff. J'aurai soin de faire dessiner leurs quartiers de la manière que vous l'exigez, et de la façon que l'usage le requiert. Pourrais-je vous prier en même temps de prendre sous votre protection les intérêts du pauvre président de Münchow, à qui j'apprends qu'on intente de nouveau des chicanes? Je vous en aurais une obligation particulière, car cet honnête homme est mon bienfaiteur.

Je vous prie de croire d'ailleurs que je suis avec une parfaite estime, etc.

10. AU MÊME.

Ruppin, 10 mai 1740.



Mon cher prince,

C'est pour vous faire ressouvenir de la parole que vous m'avez donnée de faire un petit tour ici que je vous écris. Comme les choses sont toujours mal à Potsdam, je pense que vous ne risquez pas la moindre chose. Je me flatte donc d'avoir le plaisir de vous voir ici jeudi ou vendredi; nous irons alors ensemble à Remusberg, et, si vous le jugez à propos, nous resterons ensemble jusqu'au dimanche. Je me fais un véritable plaisir de vous embrasser et de vous assurer de vive voix de la parfaite estime avec laquelle je suis, etc.

<22>Si vous voulez amener avec vous quelque officier, vous me ferez plaisir.

11. AU MÊME.

Camenz. 23 mai 1745.



Mon cher prince Charles,

Je suis dans la joie de mon cœur à l'égard de la relation que vous venez de me faire.2_22-a Baisez Schwerin2_22-b mille fois de ma part, et dites-lui que je n'oublierai, tant que je vivrai, ni sa bravoure, ni sa conduite, que j'aurai soin de tous les officiers de ce régiment, et que je veux les distinguer dans toute l'armée. Dites qu'ils doivent me dire en quoi je puis leur témoigner mon estime et ma reconnaissance, et faites à tous ceux qui se sont distingués les compliments de ma part les plus obligeants que vous puissiez imaginer. Donnez mille louanges aux simples soldats; enfin dites-leur que je suis content au delà de l'expression. En un mot, je suis dans la joie la plus grande de mon cœur que tout cela se soit passé sous vos ordres; je ne doute point des troupes, car il ne s'agit que de les mener vigoureusement.

Vous resterez aux environs de Neustadt jusqu'à nouvel ordre. Ayez soin des troupes, et faites-leur à tous mes compliments, mais surtout à Schwerin.

Adieu, mon cher frère; je souhaite de tout mon cœur de vous revoir en bonne santé, et suis. etc.

<23>Schweinichen2_23-a vous contera comment Winterfeldt a battu Nadasdy le même jour que vous avez eu votre affaire.

12. AU MÊME.

Potsdam, 28 octobre 1746.



Mon cousin,

J'ai été un peu surpris du choix que vous voulez faire pour remplacer le poste de votre maréchal de la cour. L'intérêt que je prends à ce qui vous regarde me porte à vous faire souvenir que ce poste me semble demander une personne de naissance, capable de le remplir avec dignité, ce qui ne cadre nullement à de Thile. Ainsi je vous prie d'y réfléchir mûrement et de vous déterminer plutôt pour quelqu'un d'une famille ancienne, qui ait les qualités requises pour faire l'ornement de votre cour. Sur ce, je prie Dieu qu'il vous ait, mon cousin, en sa sainte et digne garde.

<24>

13. AU MÊME.

Potsdam, 29 septembre 1747.



Mon cousin,

Votre lettre m'a été rendue, par laquelle vous me demandez la permission que votre fille la comtesse de Schönbourg2_24-a puisse faire la cour aux Reines lorsqu'elles la tiennent plénière. Mais en y réfléchissant bien, vous comprendrez vous-même que cela ne se peut pas. En toute autre occasion, je serai bien aise de vous faire tout le plaisir possible. Sur quoi, etc.

14. AU MÊME.

Potsdam, 3 octobre 1747.



Mon cousin,

J'ai vu par votre lettre du 1er de ce mois combien vous prenez à cœur que je ne saurais consentir que votre fille la comtesse de Schönbourg puisse paraître lorsque les Reines tiennent cour plénière. Mais vous vous souviendrez bien que, lorsque j'ai accordé de certaines distinctions à vos enfants naturels, ce fut dans l'intention que vous vous mariassiez. Or, comme vous ne l'avez pas fait ensuite, je ne me crois pas aussi tenu à rien de ce que j'ai promis à cet égard, et ainsi je ne saurais plus me mêler en aucune façon de ce qui regarde votre-<25>dite fille. Comme au reste je crois certainement que le grand dérangement de vos affaires pourrait aisément changer, si vous preniez encore le parti de vous marier, je ne puis que vous le conseiller encore, et vous pouvez être très-persuadé que j'ai et aurai toujours pour vous une estime et amitié très-particulière. Mais il y a des choses que ni moi ni personne ne peut approuver, et desquelles je souhaiterais bien vous voir revenu. Sur ce, etc.

15. AU MÊME.

Potsdam, 27 janvier 1732.



Mon cousin,

J'ai bien reçu votre lettre du 25 de ce mois. Vous devez assez connaître ma manière de penser sur tout ce qui peut vous intéresser, pour être persuadé de l'estime et de la considération que j'ai toujours pour vous. Il m'est donc bien sensible d'apprendre que la nomination faite en dernier lieu des généraux Gessler et Lehwaldt au grade de feld-maréchaux2_25-a vous ait pu causer de la peine et vous inspirer des doutes sur la confiance que je mets en votre personne. Bien loin de vous avoir voulu causer le moindre préjudice, je n'ai fait que suivre en ceci ce qui a été pratiqué en tout temps à ce sujet dans la maison royale de Prusse, où les margraves n'ont jamais aspiré au grade de feld-maréchal, mais se sont bornés à celui de généraux : et<26> vous vous souviendrez sans doute de ce qui s'est pratiqué à l'égard du feu margrave votre père, qui, se contentant de son rang, n'a jamais prétendu à celui de feld-maréchal, où il a vu passer tranquillement et sans s'émouvoir d'autres honnêtes gens. Je me flatte donc que vous voudrez bien vous prêter à ce que la coutume a introduit,2_26-a et me rendre la justice d'être persuadé des sentiments d'estime avec lesquels je serai invariablement, mon cousin, etc.

16. AU MÊME.

Potsdam, 31 janvier 1752.



Mon cousin,

Les sentiments de zèle et de dévouement que vous avez encore bien voulu me marquer par votre lettre du 29 de ce mois m'ont été des plus agréables. J'en ai des preuves trop éclatantes pour pouvoir douter de leur sincérité. Je reconnais parfaitement toutes les obligations que je vous ai des services distingués que vous m'avez rendus dans<27> les dernières guerres, et la satisfaction que j'en ai ressentie ne me permettra pas de les mettre jamais en oubli. Cependant je vous crois trop équitable pour ne pas apercevoir et convenir combien il est difficile et préjudiciable même, par les conséquences qui en résulteraient, de faire des changements à ce qu'une longue coutume a établi dans ma maison, où depuis tout temps, selon ce que vous alléguez vous-même, aucun prince du sang n'a eu le caractère de feld-maréchal général, quoiqu'il y en ail eu qui ont commandé en chef des corps de troupes, et que ce n'est pas sans bonne raison que je continue, dans le cas présent, ce que l'usage a introduit dans ma maison. C'est par cette seule raison-là que je me suis vu obligé de faire mes arrangements tels que je les ai faits. Il n'y entre ni mécontentement, ni quoi que ce soit contre vous. Vous pouvez être persuadé qu'on pratiquera à votre égard tout ce que l'on a pratiqué à l'égard de feu M. votre père, et vous continuerez sans exception dans toutes les prérogatives dont il a joui. Au surplus, vous devez être assuré de l'amitié sincère et de la considération parfaite avec laquelle je suis, mon cousin, etc.

17. AU MÊME.

Potsdam, 5 février 1762.



Mon cousin,

J'ai été véritablement touché des sentiments de zèle et d'attachement que vous avez bien voulu encore me témoigner par votre lettre du 2 de ce mois, et je vous prie d'être bien persuadé que j'y répondrai toujours par tous les sentiments d'estime que vous avez droit d'attendre de ma part, et que vos intérêts me seront toujours chers.<28> Mais, malgré toute ma bonne volonté pour vous, je me vois cependant nécessité, dans le cas en question, de me régler sur ce qui a été observé de tout temps dans ma maison, où jamais aucun prince du sang n'a prétendu au rang de feld-maréchal général; et je me persuade que vous y acquiescerez aisément, d'autant plus que cette usance ne vous regarde pas vous seul, mais aussi les autres princes du sang, et même mes frères, qui s'y soumettent volontiers. J'ai tout lieu d'espérer que vous voudrez également vous y conformer et vous tranquilliser là-dessus. Je suis avec l'amitié et l'estime la plus parfaite, mon cousin, etc.

18. DU MARGRAVE CHARLES.

Berlin, 31 janvier 1753.



Sire,

Je me suis rendu entièrement aux volontés de Votre Majesté dans l'affaire qui regardait ce point de grade, que je comptais avoir mérité par la ferveur de mon service, et ce, dans la seule idée de mériter le retour de ses grâces et de sa confidence, comme il lui avait plu de me le promettre.

Il m'est donc bien sensible, avec tout ceci, de voir que V. M. me tienne seul peu mériter de tous les généraux de la garnison d'être initié dans les mystères de l'Instruction militaire2_28-a qu'elle vient de distribuer aux commandeurs des régiments de Berlin, un chacun d'eux<29> étant même autorisé, comme je l'apprends, hormis le colonel de Bardeleben, de faire part de ce livre à leurs chefs; car ce dernier m'est venu dire de son propre mouvement2_29-a qu'il n'osait me le montrer, et qu'il lui était très-expressément défendu d'en rien révéler à personne, mais que le major d'Eckart avait ordre de le communiquer au feld-maréchal de Kalckstein.

Une preuve aussi évidente de la méfiance marquée qu'il plaît à V. M. de mettre autant dans ma personne que dans ce qui regarde le service militaire ne peut que m'être des plus douloureuses, et je ne saurais dissimuler qu'il m'est plus dur que la mort même de servir en parallèle avec mes deux cousins,2_29-b dans le temps que je tiens avoir mérité une meilleure destinée. Enfin j'en remets la décision à la droiture des sentiments de V. M., et suis avec une dévotion inaltérable,



Sire,

de Votre Majesté
le très-humble et très-obéissant serviteur,
Charles.

19. AU MARGRAVE CHARLES.

(Février 1753.)

Que Sa Majesté avait vu avec surprise ce que le Margrave lui avait voulu marquer du chagrin de ce qu'elle ne lui avait pas envoyé un<30> de ces livres que S. M. avait donnés à quelques-uns de ses officiers, à Berlin; que, bien éloignée de ces sentiments peu favorables au Margrave qu'il voudrait tirer de cette omission, S. M. l'assurait tout au contraire de l'estime qu'elle lui portait et de la confiance qu'elle lui continuerait à jamais; mais quant au susdit livre, S. M. voulait bien lui dire que, comme son contenu ne regardait que des choses pour la plupart assez connues de tous ceux qui avaient commandé des troupes, et que c'était à tort que le colonel de Bardeleben lui en avait parlé, S. M. priait ainsi le Margrave de se tranquilliser parfaitement là-dessus, et qu'il lui ferait un plaisir de ne marquer plus du chagrin à ce sujet, mais de supprimer plutôt tout ce qu'il en avait laissé apercevoir peut-être, et qu'au reste S. M. voulait bien lui réitérer les sentiments de la parfaite estime avec lesquels elle était, etc.2_30-a

<31>

IV. CORRESPONDANCE DE FRÉDÉRIC AVEC LE DUC CHARLES DE BRUNSWIC. (26 OCTOBRE 1735 - 1er OCTOBRE 1745.)[Titelblatt]

<32><33>

1. AU DUC CHARLES DE BRUNSWIC.

Danzig, 26 octobre 1735.



Mon très-cher frère,

Personne ne prend plus de part que moi à l'heureuse délivrance de S. A. R. ma sœur. Je suis charmé, mon cher frère, qu'elle vous ait fait papa de si bonne grâce. Je crains bien que vous n'en resterez pas là, que vous allez peupler le monde, et que l'on va voir naître de votre aimable race. Je n'ai qu'à leur faire un seul souhait, qui est qu'ils ressemblent à père et à mère de corps et d'esprit; ce leur sera toujours un gage sûr de mon amitié et de ma parfaite estime. Au moins pardonnez-moi, mon très-cher frère, si je ne vous ai pas fait mes félicitations plus tôt; mais je ne fais que d'arriver des fonds de la barbarie,2_33-a et, ayant été chargé d'un nombre innombrable de commissions auxquelles je n'entendais pas grand' chose, il m'a été impossible de penser ni d'écrire. Je vous crois à présent seuls et défaits de votre illustre Gast;2_33-b l'on dit qu'il est charmé de la réception que vous lui avez faite. J'ai bien cru qu'il serait satisfait, car comment pourrait-on ne le pas être en votre agréable compagnie? J'ai vu ici tous les travaux des Russiens, et l'on m'a fait l'histoire de l'assaut du Hagelsberg.2_33-c J'ai été sur les lieux, et j'avoue que j'avais meilleure opinion de M. de Münnich pour l'avoir cru capable d'une entreprise aussi déraisonnable, mal conçue et mal exécutée que celle-<34>là. Les troupes ont fait tout ce que de braves gens ont pu faire; mais il n'était pas dans le pouvoir humain de pouvoir prendre un ouvrage de la nature de celui-là l'épée à la main. De là, j'ai vu le fort de la Münde, qui s'est rendu le plus lâchement du monde. Ensuite l'on m'a mené à l'endroit où les trois bataillons français ont si lâchement capitulé,2_34-a action inouïe, et qui fera honte à la nation française jusqu'à nos arrière-neveux. Ensuite je me suis promené sur la mer, et je me suis diverti à voir comme elle ballottait notre navire. Il n'y avait aucun danger, mais cependant les vagues étaient fort émues du vent. L'on nous assure que Seckendorff fait le petit César au Rhin,2_34-b et qu'il veut se donner des airs avec Belle-Isle. J'avoue que je suis curieux de savoir ce qui en sera, et si l'on fera toujours la guerre sans coup férir. J'aimerais bien y être, et moi qui ne suis point chargé du fardeau pesant du bien d'un pays ou d'un État, je pourrais, sans que personne y perdît, m'y trouver, quitte à risquer ma cervelle. Le sort m'en veut cependant; car moi qui brûle d'ardeur pour le métier, je ne saurais parvenir à voir la moindre chose. Mais baste. Il suffit que je sente la peine que cela me fait, sans que j'en aille incommoder les autres. Adieu, mon très-cher frère; mes compliments à l'aimable accouchée. Je vous prie de lui dire que ses coups d'essai sont des coups de maître.2_34-c Je suis avec toute l'estime et tout l'attachement possible,



Mon très-cher frère,

Votre très-parfaitement fidèle ami,
cousin et frère,
Frederic.

<35>

2. AU MÊME.

(Berlin, janvier 1740)



Mon cher duc,

Le Roi est à l'extrémité. On vous écrira pour nous envoyer Keck. Dites à ce médecin, je vous prie, et ordonnez-lui de ne dire la vérité de l'état du Roi qu'à la Reine et à moi. Préparez ma sœur à l'événement que nous devons attendre, et demandez-lui si elle veut voir son père, en cas qu'il fût plus mal. Si elle le veut, je commanderai des chevaux, en lui dépêchant un exprès. Pour l'amour de Dieu, ayez soin d'elle, et ne l'effrayez point. Vous pouvez juger de l'état dans lequel nous sommes. Je sais à peine ce que je vous écris. Soyez persuadé que je suis tout à vous.

3. AU MÊME.

Berlin, 7 février 1740.



Mon très-cher frère,

Keck est arrivé, dont je vous fais mes remercîments. Il a trouvé le Roi très-mal, et plus dangereusement malade qu'il ne l'avait cru. Si cela augmente, et qu'on appréhende une fin prochaine, je ne manquerai point d'en avertir ma sœur à temps. Nous sommes tous dans une si grande confusion et dans une si parfaite incertitude de ce qui doit arriver, que nous en sommes tout confus. Je vous demande pardon si ma lettre est courte et sans ordre; mais il est impossible<36> d'être maître de soi en pareilles occasions. Soyez persuadé que je suis avec une très-parfaite tendresse,



Mon très-cher frère,

Votre très-fidèlement affectionné ami,
cousin et frère,
Federic.

4. AU MÊME.

Berlin, 14 février 1740.



Mon cher frère,

La maladie du Roi va fort en empirant depuis quelques jours. Il est beaucoup plus mal qu'il n'a été, et l'on craint beaucoup que cela ne durera guère. J'attendrai encore quelques jours avant que d'en avertir ma sœur. Si elle n'est pas enceinte, elle me fera grand plaisir de venir ici. Je vous prie de la bien préparer à ce qui doit arriver, car assurément nous n'avons plus lieu de nous flatter de rien, et Keck, qui, dans les commencements, nous donnait encore quelque ombre d'espérance, ne nous promet plus rien à présent.

Adieu, mon cher frère; je vous prie de ne me point oublier, et d'être persuadé de la tendresse parfaite avec laquelle je suis, etc.

<37>

5. AU MÊME.

Berlin, 6 mars 1740.



Mon très-cher frère,

J'ai reçu votre lettre avec bien du plaisir. Je n'ai guère de bonnes nouvelles à vous apprendre. L'hydropisie du Roi va son train. Il n'y a pas d'apparence encore de convalescence, mais cela peut durer encore un bout de temps. Est-ce vous ou est-ce le Roi qui rendez ma sœur malade? Je présume qu'elle reprend ses incommodités de foie, qui lui sont périodiques depuis son mariage, et auxquelles vous avez toujours eu la plus grande part.

Je serais fort embarrassé, mon cher frère, que vous dire, sinon que M. Keck, voulant hier tâter le ventre du Roi, fit la culbute le plus galamment du monde. Il l'aurait pu faire, à la vérité, avec plus d'adresse, car il cassa un des pieds du lit du Roi. Le médecin tombé ne se contenta pas de sa chute, mais il roula encore sa lourde masse à travers la chambre, à peu près comme un boulet de canon qui, bondissant faiblement, se roule encore par les dernières impressions qu'il sent des mouvements imprégnés par la force de l'air et de la poudre. Nous trouvâmes la chose très-plaisante. Ces sortes d'histoires perdent toujours, par le récit, du comique qu'elles ont dans leur réalité.

Adieu, mon cher frère; je vous prie de baiser et d'embrasser ma sœur de ma part. Croyez-moi tous les deux, je vous prie, avec une estime et une tendresse infinie, mon très-cher frère et ma très-chère sœur, etc.

<38>

6. AU MÊME.

Remusberg, 7 avril 1740.



Mon cher frère,

Comme les médecins ont un peu tranquillisé le Roi, j'ai saisi ce moment avec empressement pour partir pour Remusberg. Mon séjour n'y sera pas long, mais l'air ne laissera pas de m'y faire beaucoup de bien. On nous donne une dilation de quelques mois. La Faculté varie beaucoup avec ses pronostics, et je ne sais, en vérité, ce qui en deviendra.

Aimez-moi toujours, mon très-cher frère, et soyez persuadé de la tendresse infinie avec laquelle je suis, etc.

7. AU MÊME.

Charlottenbourg, 13 juin 1740.



Mon très-cher frère,

L'amitié et l'inclination que j'ai toujours eue pour vous m'ont rendu plus sensible au refus que vous venez de me faire que si ce refus était émané de tout autre endroit.2_38-a Le proverbe dit que c'est dans le besoin que l'on connaît ses amis. Que voulez-vous que je juge de vous, mon cher frère, et que voulez-vous que je fasse pour vous en pareil cas? S'il est vrai qu'une main doit laver l'autre, il faut assuré<39>ment que tout soit mutuel dans l'amitié. Je suis dans ce cas; j'attends un plaisir de votre part, et je vous assure que je ne serai pas paresseux à vous le rendre. Vous devez connaître vos intérêts. Je ne sais lequel pourra vous être plus utile, d'un empereur ruiné et dont la mort plongera l'Europe dans une guerre sanglante, ou d'un beau-frère voisin, puissant dans l'Empire, et dont l'alliance pourra vous et re utile à plus d'une chose et dans plus d'une occasion. C'est à vous à connaître vos intérêts, et à moi à vous aimer personnellement, quelque parti que vous preniez.

Acceptez la bagatelle que je vous envoie,2_39-a et soyez persuadé de l'estime avec laquelle je suis, etc.

8. AU MÊME.

Charlottenbourg, 16 juin 1740.



Mon très-cher frère,

L'arrivée de Duhan, dont vous avez eu soin jusqu'à présent,2_39-b et dont je vous fais mille remercîments, m'a fait tout le plaisir imaginable. Je n'ai jamais douté de votre amitié, mon cher frère, et je vous prie de compter sur la mienne. Mais j'avoue que si vous me voulez faire plaisir dans les circonstances où je suis, vous obligerez un frère qui vous aime tendrement, et qui ne manque pas de reconnaissance.

Vous me flattez du plaisir de vous voir et de vous embrasser. Vous pouvez compter que vous me trouverez plein d'amitié, d'estime<40> et de tendresse pour vous. Quant à ma personne, je le serai toujours, et je vous prie de me fournir les moyens pour pouvoir cimenter cette amitié d'une façon ferme et solide. Je ne demande pas mieux de mon côté, et je vous prie de croire que je suis à jamais, avec toute la tendresse imaginable, mon cher frère, etc.

9. AU MÊME.

Charlottenbourg, 18 juin 1740.



Mon cher frère,

Je vous suis infiniment obligé du plaisir que vous voulez bien me faire de lever le monde convenable pour le régiment de votre frère Ferdinand. Je vous assure, mon cher frère, que je ne négligerai aucune occasion pour vous en témoigner ma reconnaissance.

Il ne dépendra que de vous, mon cher frère, d'envoyer un officier tel que vous le jugerez à propos pour avoir soin de tout, et pour ajuster les mesures nécessaires à prendre pour mettre la dernière main à vos bonnes intentions et au plaisir que vous voulez bien me faire.

Vous apprendrez dans peu les raisons qui m'ont obligé de vous importuner si fort pour ce régiment. Vous pouvez cependant être persuadé qu'elles sont valables.

S'il y a quelque moyen de vous obliger ou de vous faire plaisir, je ne négligerai rien pour y contribuer autant qu'il dépendra de moi, afin de vous convaincre de la véritable amitié, tendresse et estime avec laquelle je suis, mon très-cher frère, etc.

<41>

10. AU MÊME.

(Juin 1740.)2_41-a



Mon cher frère,

J'ai été très-fâché d'apprendre les excès que l'on a faits sur mes frontières2_41-b Avant que vous m'en ayez écrit, j'en ai été informé, et j'ai pris de bonnes mesures pour que de pareilles choses ne se fassent plus envers un cher voisin que j'aime de tout mon cœur, et à qui je ne tâcherai que de faire toujours tout le plaisir qu'il dépendra de moi. Soyez tranquille, mon cher frère; je prends cette affaire sur moi, et vous n'aurez plus lieu de vous plaindre.

Vous ne viendrez jamais trop tôt pour l'impatience que j'ai de vous embrasser et de vous réitérer de vive voix les sentiments de tendresse et d'estime avec lesquels je suis à jamais, mon très-cher frère, etc.

Mille compliments à ma chère sœur.

11. AU MÊME.

Charlottenbourg, 30 juin 1740.



Monsieur mon frère,

C'est avec plaisir que j'ai vu par les dernières lettres la continuation de votre cher souvenir, et combien vous êtes satisfait de la manière<42> dont j'ai redressé l'excès commis, malgré moi, contre un de vos sujets. Quant à l'affaire principale, touchant le régiment à faire, et que je destine au prince Ferdinand, comme je m'aperçois qu'il y a encore quelques obstacles, j'ai ordonné à mon lieutenant-général de Marwitz de vous faire sa cour, et de vous dire ce que je pense là-dessus. Il pourra peut-être indiquer des moyens d'aplanir les difficultés, et concerter avec vous ce qui sera convenable pour finir heureusement cette affaire. Je vous prie d'y vouloir apporter toute la facilité, et de croire que je suis avec une très-parfaite amitié, monsieur mon frère, etc.

12. AU MÊME.

Rheinsberg, 28 octobre 1740.



Monsieur mon frère,

Quoique j'aie eu de la répugnance de me séparer sitôt de la compagnie du prince Ferdinand, il m'a fallu céder à la tendre impatience qu'il a de vous revoir. Il s'acquittera en même temps de la commission que je lui ai confiée de vous donner de nouvelles assurances de mes sentiments d'amitié. Cependant vous agréerez, s'il vous plaît, que je réitère mes instances au sujet de la prompte livrance des deux bataillons en recrues dont nous sommes convenus, et je vous assure que vous ne me sauriez faire un plus grand plaisir que de finir bientôt cette affaire. D'ailleurs, je serais ravi si vous pouviez vous résoudre à me laisser encore pour mon service quelques-uns de vos bataillons avec les officiers, moyennant des subsides et des conditions raisonnables; et si vous vouliez y ajouter un des régiments de vos<43> dragons, pour des subsides, ce serait augmenter ma satisfaction et les obligations que je vous en aurais. Je vous prie d'y réfléchir et de me réjouir d'une prompte réponse, que vous pourriez découvrir au général de Marwitz, qui vous fera sa cour. Je suis avec une constante et très-sincère amitié, monsieur mon frère, etc.2_43-a

Je vous aurais écrit moi-même, mais j'ai la fièvre. Je vous demande excuse.2_43-b

13. DU DUC CHARLES DE BRUNSWIC.

Le 4 novembre 1740.

Je me tiendrais heureux si je me pouvais défaire de quelques bataillons et de mes dragons pour les offrir à Votre Majesté. Mais, Sire, je supplie V. M. de se souvenir que je n'ai en tout que six bataillons, dont deux sont entièrement ruinés par un fatal engagement que j'ai dû accomplir sans l'avoir contracté. Ce peu de monde suffit à peine au plus nécessaire dans Brunswic et Wolfenbüttel. Mes dragons ne font que quatre compagnies, et sont à peine suffisants pour empêcher dans le pays l'inondation des mendiants, les défraudations des contrebandiers du blé, et les désordres amenés par la disette ....

<44>

14. AU DUC CHARLES DE BRUNSWIC.

Ruppin, 28 novembre 1740.



Monsieur mon frère,

Votre lettre du 20 de ce mois m'a été rendue, et j'ai été sensible aux plaintes que vous me faites connaître sur la défense de la sortie du blé de Prusse. Je suis fâché de ce que vous en aurez quelque dommage à cause de l'achat que vous en avez fait auparavant; mais vous me rendrez la justice de réfléchir sur le besoin que j'en ai moi-même dans ce temps de calamité, et il me faudra faire examiner avant tout si je pourrais trouver moyen de pourvoir à la nécessité pressante de mes troupes et autres sujets, avant que de pouvoir songer à vous aider. Quant à ce qui regarde la qualité des recrues que vous m'avez voulu envoyer pour le régiment de votre frère, il faut vous dire la vérité, que, pour une grande partie, ils ne sont pas à beaucoup près tels que je les ai attendus. J'ai donné ordre au major-général d'Einsiedel de vous envoyer le détail des gens incapables et invalides qu'on y a trouvés. Comme j'apprends aussi que le colonel de Hohnstedt2_44-a a trouvé à propos d'en écarter les meilleurs, je vous laisse à juger combien peu je dois être édifié de cette manière d'agir, peu conforme à l'amitié qui subsiste entre nous. Je suis avec une très-constante considération et cordialité, monsieur mon frère, etc.2_44-b

<45>

15. AU MÊME.

(Décembre 1740.)



Mon cher frère,

J'ai vu par votre lettre que vous paraissez étonné que je n'aie point trouvé le monde bien conditionné, que vous m'avez envoyé pour le régiment du prince Ferdinand. Je n'ai cependant pas pu dire les choses autrement qu'elles ne sont, et, sans vous en accuser, mon cher frère, je ne puis vous dire à qui en est la faute.

Indépendamment du peu de bonne volonté que vous me témoignez, je songe cependant à ce qui peut être de l'intérêt de votre maison; et comme le duché de Courlande est devenu vacant depuis le malheur du duc Biron, il se pourrait faire qu'on procurât ce duché à votre frère Louis.2_45-a Il serait temps d'y songer et d'y faire une attention sérieuse. Si vous vous concertiez avec moi, je crois que j'aurais beaucoup de moyens pour faciliter cette affaire à présent, d'autant plus qu'elle est en quelque façon dépendante de la Pologne. Vous me manderez ce que vous en pensez, et vous verrez par ceci et dans d'autres occasions qu'il y a plus de sincérité dans l'amitié que j'ai pour vous que dans la vôtre envers moi.

Je suis avec bien de l'estime, mon cher frère, etc.

<46>

16. AU MÊME.

Berlin, 9 décembre 1740.



Monsieur mon frère,

Vos deux lettres du 5 et du 6 de ce mois m'ont été rendues, et je vous suis obligé de ces marques de votre souvenir, et des nouvelles touchant les surprenantes catastrophes de la Russie. J'étais déjà informé des circonstances qui viennent d'humilier l'usurpateur orgueilleux et d'élever la régente et le digne prince votre frère.2_46-a Comme j'admire cet ouvrage de la Providence, dû au mérite de ces illustres personnes, j'y prends toute la part imaginable, et je vous en félicite très-cordialement, en souhaitant à la nouvelle régence un bonheur ferme et accompli.

Quant à la marche de mes régiments,2_46-b où vous trouvez tant de difficultés, je m'en rapporte à ce que je vous ai répondu sur ce chapitre, et je me flatte que vous ne me refuserez pas d'y avoir égard, ce que je reconnaîtrai en temps et lieu. Au reste, l'arrivée du prince Ferdinand m'a été très-agréable; et comme je connais les bonnes qualités qu'il possède, et qui promettent beaucoup, je m'efforcerai toujours de les cultiver et d'avoir un soin tout particulier de lui et de son bonheur. Je suis avec une très-parfaite amitié, monsieur mon frère, etc.2_46-c

<47>

17. AU MÊME.

Soor, 1er octobre 1745.



Mon cher frère,

Je suis bien lâché de vous apprendre la nouvelle désagréable de la mort de votre frère Albert.2_47-a Il était trop brave. J'ai écrit souvent à ma sœur que je craignais quelque accident pour lui. Mais je puis vous assurer en même temps qu'il n'a point fait honte à sa famille. Le prince Ferdinand s'est surpassé, et je lui dois la louange qu'il a beaucoup contribué au gain de cette bataille.

Je vous prie de me conserver votre précieuse amitié, et d'être bien persuadé de la vive tendresse avec laquelle je suis, mon cher frère, etc.

<48><49>

V. CORRESPONDANCE DE FRÉDÉRIC AVEC LE PRINCE FRÉDÉRIC-AUGUSTE DE BRUNSWIC. (OCTOBRE 1763 - 19 JUIN 1786.)[Titelblatt]

<50><51>

1. AU PRINCE FRÉDÉRIC-AUGUSTE DE BRUNSWIC.

(Octobre 1753.)



Mon cher neveu,

Votre frère vient d'arriver.2_51-a Je voudrais volontiers que vous vinssiez lui tenir compagnie, pour que le feu de votre jeunesse, assaisonnant l'insipidité de ma vieillesse, lui rendît ce séjour plus supportable. Si aucun empêchement physique ne s'oppose à votre voyage, je vous attends demain à midi, accompagné de votre gaîté accoutumée, et je suis jusqu'à l'honneur de vous le dire de bouche,



Mon cher neveu,

Votre fidèle oncle, ou, si vous l'aimez mieux,
votre très-humble serviteur,
Federic.

2. AU MÊME.

Le 11 mai 1766.



Mon cher neveu,

J'ai toujours appris dans ma jeunesse qu'il valait mieux corriger ses fautes que de les justifier; j'ai les yeux assez routines pour voir que<52> ni votre régiment ni celui de Puttkammer ne sont en ordre. Vos officiers sont la négligence même; ils ne savent pas tenir leur distance, ils ne sont ni corrigés, ni instruits de ce qu'il leur convient de faire, et il faut absolument que cela change. Il n'y aura pas une pensée d'avancement dans ce régiment. J'ai déjà fait un choix d'officiers que j'y placerai; les vôtres ne méritent rien, parce qu'ils se sont mal conduits à la guerre, et qu'ils négligent leur devoir pendant la paix, et je ne suis pas assez grand seigneur pour entretenir des régiments mal disciplinés. Le peu de troupes que j'ai, il faut qu'elles soient bonnes. Voilà, mon cher neveu, quelle est ma façon de penser. Vous êtes nouveau dans ce service; vous avez fait la guerre avec un ramas de troupes où il n'y avait point d'ordre à apprendre. Ce service-ci veut être étudié depuis ses premiers principes, ou ceux qui ne s'y appliquent pas ainsi ne s'en acquittent que de travers. Voilà une assez longue lettre. Je suis avec bien de l'amitié, mon cher neveu, etc.

Votre mère est tout à fait mieux.

3. AU MÊME.

(Décembre 1766.)



Mon cher neveu,

Je vous envoie le berceau que je vous dois depuis longtemps. Toutefois, comme on se trompe souvent à juger des choses par l'extérieur, je vous prie de l'examiner. Je n'ai pu y mettre un enfant; c'est à vous à le remplir quand vous serez marié. Je vous souhaite le bonsoir.

<53>

4. AU MÊME.

(1772.)2_53-a

Je viens de recevoir une lettre de l'empereur du Mogol, qui me charge, monseigneur, de vous remettre le subside présent pour vous tranquilliser et vous empêcher de le détrôner. J'espère que vous recevrez avec votre bénignité ordinaire l'offre qu'il vous fait, et que vous le laisserez jouir en paix de son trône d'or, des balances où les grands le pèsent, et de son éléphant blanc;2_53-b et pour moi, je me recommande à la protection de ce prince, la terreur du Grand Mogol, l'épouvantai! de l'Asie, et le plus aimable et le plus sociable des hommes.

5. DU PRINCE FRÉDÉRIC-AUGUSTE DE BRUNSWIC.

Berlin, 29 janvier 1777.



Sire,

Votre Majesté ayant créé elle-même une société de maçons2_53-c qui, par sa haute protection, s'est soutenue pendant trente-sept ans, j'ose lui présenter ci-joint un discours qui a été lu le jour de son anniversaire, et que nous regardons comme le jour primitif, parce qu'il a fait naître celui qui a donné la naissance à cet institut.

<54>Elle verra par là avec quel zèle les maçons ont été animés de bénir particulièrement dans ce jour leur bienfaisant instituteur comme père de la patrie. Heureux si ces sentiments mis publiquement dans leur vrai jour lui font apercevoir que le zèle qui les inspire a pour base l'empressement de former de fidèles sujets et de bons patriotes, et que V. M., touchée par ces principes, daigne, comme elle en a été l'instituteur, servir dorénavant à cette société encore comme protecteur. Combien mettrait-elle le sceau à cette bonté en l'honorant de son portrait, qui, exposé à la face de tous les maçons qui tirent de vous, Sire, leur naissance, leur prouvera de nouveau que partout où la vertu, les bonnes mœurs et le patriotisme se rencontrent, V. M. s'y présente comme père et comme protecteur!

En attendant avec empressement cette grâce distinguée de sa part, j'ose l'assurer que les cœurs maçonniques voueront un nouvel autel à sa splendeur et à ses vertus, et que la reconnaissance la plus vive les pénétrera. J'ose l'assurer aussi en mon particulier que les sentiments de respect et de soumission qu'elle me connaît lui en sont les plus sûrs garants, de même que l'ardeur avec laquelle je ne cesse d'être toute ma vie.



Sire,

de Votre Majesté
le très-humble et très-obéissant
serviteur et neveu,
Frédéric-Auguste,
Pr. de Br.

<55>

6. AU PRINCE FRÉDÉRIC-AUGUSTE DE BRUNSWIC.

Potsdam, 30 janvier 1777.



Monsieur mon neveu,

Le zèle que la loge des trois globes a manifesté de nouveau par le discours qui a été lu dans son assemblée le jour de l'anniversaire de ma naissance m'a fait plaisir. Je ne puis qu'applaudir infiniment à l'esprit qui anime tous ses membres à former de bons patriotes et de fidèles sujets; et sous un maître aussi éclairé que Votre Altesse Sérénissime, qui joint à des talents supérieurs le plus tendre attachement pour ma personne, je ne puis que me promettre les plus heureux succès de ses soins empressés d'avancer la vertu et le vrai patriotisme dans le cœur de tous mes sujets. V. A. S. pense que mon portrait placé dans cette loge animerait encore davantage tous ces maçons à remplir leurs devoirs, et il sera à son service. Mais ne lui semble-t-il pas que, portant l'empreinte de mon âge avancé, il pourrait plutôt servir, dans son jardin,2_55-a d'épouvantail pour chasser les oiseaux2_55-b que donner de l'émulation à une société de sages? Toutefois il sera un nouveau monument que je ne puis rien refuser à un neveu chéri, qui, par son mérite, est digne de ce tendre et inaltérable attachement avec lequel je serai tant que je vivrai, monsieur mon neveu, etc.

Vous allez donc devenir le grand prieur des francs-maçons à Berlin, comme le prince Ferdinand l'est dans le Saint-Empire romain.2_55-c

<56>

7. AU MÊME.

Potsdam, 17 février 1777.



Mon cher neveu,

J'ai reçu de ma sœur de Brunswic cette estampe singulière de l'impression que l'imagination des femmes grosses peut opérer sur leur fruit. Je vous l'envoie pour vous en amuser; elle donnera lieu à de belles dissertations avec les médecins et les chirurgiens. Je vous prie, mon cher neveu, de vous donner tous les soins possibles pour qu'il n'arrive pas à madame votre épouse de prendre des impressions qui pourraient être fatales à sa postérité; vous pourrez juger par l'estampe combien elles sont fâcheuses. Je suis avec toute l'affection possible, mon cher neveu, etc.2_56-a

Préservez bien, mon cher, la princesse qu'elle ne voie ni cerf ni chevreuil, car ce serait un cas épouvantable si vous alliez devenir le père d'un chevreuil.2_56-b

<57>

8. AU MÊME.

(1778.)



Mon cher neveu,

Comme vous m'avez assuré que la guerre allait se faire, et qu'à Berlin cela était résolu, j'ai d'abord pensé à faire mon testament. Je vous lègue vingt mille écus, que j'ai placés à la compagnie maritime, à dix pour cent. En voilà quinze mille que je vous envoie; les cinq mille restants suivront le mois qui vient. Vous en jouirez jusqu'au jour que vous parviendrez à la régence d'Oels; alors cela retombera sur le petit Léopold.2_57-a Voilà donc mon testament fait et exécuté; je m'en battrai de meilleur cœur, n'ayant plus rien qui puisse me causer des inquiétudes. Je vous embrasse, mon cher, en vous assurant de la tendresse avec laquelle je suis, etc.

9. AU MÊME.

Le 23 décembre 1780.



Mon cher neveu,

Le Christ m'est apparu la nuit, et m'a dit : Remets ceci à ton neveu. Et j'ai dit : Monsieur Christ, ta volonté soit faite au ciel comme à la terre. Et je remets à mon neveu ce dont le Christ m'a chargé. Voilà, mon cher neveu, une révélation franc-maçonnique dont je vous fais part; vous voyez que les esprits se communiquent aux incrédules<58> mêmes, et qu'il ne faut désespérer du salut de personne. Je suis avec toute la tendresse possible, mon cher neveu, etc.

10. AU MÊME.

(Le 2 D. 1782.)2_58-a

Ne manger que de la soupe et rien d'autre, boire ou de l'eau, ou des liqueurs de jus de groseilles ou de jus de cerises, rester au lit, beaucoup transpirer, et ne pas sortir que l'enflure du pied ne soit entièrement tombée : voilà une recette sûre et certaine dont il ne faut pas s'écarter à moins de risque, et par laquelle cette maladie sera sûrement guérie. Mais les neuf premiers jours, hors le bouillon, point de viande ni de vin.

11. AU MÊME.

Potsdam, 31 mars 1783.



Monsieur mon neveu,

Une marchande de modes Pagelle, à Paris, m'a adressé la note jointe des marchandises livrées à une princesse Frédérique depuis 1767 jusqu'à la fin de 1778, qui monte à quatorze mille cinq cent trente-huit livres dix-neuf sous deux deniers, accompagnée d'une autre de trois<59> mille quatre cent cinquante-huit livres, que la Mossi prétend lui être due de la part de cette même princesse. Comme ni l'une ni l'autre ne désignent pas plus particulièrement leur débitrice, je ne saurais me dispenser de mettre cette note également sous les yeux de Votre Altesse Sérénissime, afin que, au cas qu'elle regardât ma nièce son épouse,2_59-a elle puisse prendre des arrangements pour son acquit. Je profite, au reste, de cette occasion pour renouveler à V. A. S. ce vrai et tendre attachement avec lequel je suis invariablement, monsieur mon neveu, etc.

12. DU PRINCE FRÉDÉRIC-AUGUSTE DE BRUNSWIG.

Berlin, 31 mars 1783.



Sire,

J'ai l'honneur de lui renvoyer très-humblement le compte qu'elle a daigné me communiquer, comme il ne concerne en rien la princesse mon épouse, qui n'a pas été en négoce avec ces femmes marchandes de Paris, ayant fait les achats de ces frivolités d'usage ici ou quelquefois à Brunswic, quand le hasard a fait qu'elle s'y est trouvée en temps de foire. Au reste, comme elle ne doit à aucun créancier de cette espèce, j'ose avouer que j'ignore quelle peut être la princesse que ces marchandes veulent désigner. Je saisis cette occasion pour me renouveler de nouveau dans le précieux souvenir de V. M., et<60> pour la supplier de me croire avec tout le respect et toute la soumission possible, Sire, etc.

13. AU PRINCE FRÉDÉRIC-AUGUSTE DE BRUNSWIC.

Potsdam, 6 avril 1788.



Monsieur mon neveu,

Le prince Charles de Hesse doit avoir un secret pour endurcir la porcelaine, et faire en sorte qu'elle ne se casse pas. Je vous avoue que je serais bien aise d'en faire l'épreuve. Vous m'obligerez donc de lui en parler. Peut-être aura-t-il la bonté de me le confier, ou bien d'en faire faire un essai. C'est en vous assurant de la persévérance de mes sentiments d'amitié et de considération que je suis, monsieur mon neveu, etc.2_60-a

Vous me ferez plaisir d'arranger cette petite affaire; c'est pure curiosité de ma part.2_60-b

<61>

14. AU MÊME.

(Le 24 décembre 1783.)



Mon cher neveu,

Voici une goutte d'eau versée sur une pierre chaude. La sécheresse de l'année m'empêche de rendre la rosée plus abondante, car les ravages des rivières au printemps, les incendies de l'automne, les sauterelles de Goeuren2_61-a m'ont si fort épuisé, qu'à peine il me reste la vie. Que la vôtre soit heureuse, et que vous me comptiez toujours au nombre de vos plus fidèles adulateurs, étant,



Mon cher neveu,

de Votre Altesse Sérénissime2_61-b
le fidèle oncle et ami,
Federic.

<62>

15. AU MÊME.

Potsdam, 15 novembre 1785.



Monsieur mon NEVEU,

Oserais-je vous engager à passer quelque temps avec moi? Je n'abuserai point de votre complaisance, et si vous voulez bien me faire l'amitié de venir ici le 18 de ce mois, dès que le carnaval commencera, je ne vous retiendrai plus. En attendant d'avoir le plaisir de vous embrasser, persuadez-vous, je vous prie, de l'attachement invariable et de la tendre estime avec laquelle je suis, monsieur mon neveu, etc.

16. AU MÊME.

Potsdam, 19 juin 1786.



Monsieur mon NEVEU,

La présente n'est que pour vous prier de me faire le plaisir de venir passer quelques jours ici, chez moi, et de recevoir par écrit à cette occasion, en attendant que je puisse vous les réitérer de bouche, les assurances de l'amitié et de la considération parfaite avec laquelle je suis, monsieur mon neveu, etc.

<63>

VI. CORRESPONDANCE DE FRÉDÉRIC AVEC LE DUC FERDINAND DE BRUNSWIC. (8 OCTOBRE 1750 - 2 AVRIL 1762.)[Titelblatt]

<64><65>

1. AU DUC FERDINAND DE BRUNSWIC.

Potsdam, 8 octobre 1750.



Mon cousin,

Je saisis avec bien de la joie l'occasion que vous me fournissez de pouvoir vous témoigner combien je suis prêt à condescendre à tous vos désirs. Je vous accorde bien volontiers la permission que vous me demandez, par votre lettre du 7 de ce mois, de pouvoir faire un tour à Brunswic pour le temps que vous vous prescrivez vous-même, quoique vous me feriez un plaisir bien réel de vous arranger de sorte que vous ne partiez d'ici que le 14 ou 15 de ce mois; et comme je suis tout à fait persuadé de vos sentiments tendres et sincères pour moi, vous pourrez aussi, à votre tour, être très-assuré de l'amitié inaltérable et sans bornes que je vous porte et porterai à jamais. Je vous regarde comme mon ami le plus intime et le plus estimable; point d'ennemi n'oserait ni ne pourrait altérer cette amitié ou vous noircir dans mon esprit; et, supposé que vous ayez des envieux, croyez fermement qu'aucun ne pourra jamais vous nuire, et que ma plus grande satisfaction sera toujours de vous témoigner combien je suis, etc.

<66>

2. AU MÊME.

Breslau, 2 janvier 1758.

Permettez-moi de vous parler franchement et de vous dire que je vois avec regret que votre expédition est manquée,2_66-a et que vous vous êtes laissé séduire par le sieur de Schulenbourg et par d'autres Hanovriens. Il ne fallait point aller à Celle, mais sur Nienbourg. De pareilles opérations veulent être menées avec vigueur. A présent l'affaire est gâtée; celle de Lehwaldt en Poméranie ira mieux. Il fallait attaquer l'ennemi et lui tomber vertement sur le corps. Le temps que vous perdez, l'ennemi l'emploiera utilement à se renforcer, et ensuite vous aurez double peine et double risque. Voilà ce que c'est que d'avoir suivi de mauvais conseils.2_66-b

Rien ne pouvait venir plus mal à propos que ce que vous avez fait. Voilà tout ce que la douleur me permet de vous dire.2_66-c

3. AU MÊME.

Breslau, 26 janvier 1758.

Je suis obligé de me régler sur vous pour mon projet de campagne. Pour l'amour de Dieu, faites que vos coïons mordent bien. Le prince<67> de Holstein2_67-a vous mène dix escadrons de dragons et cinq de hussards; mais ces gens en valent trente de l'ennemi. Le prince de Holstein est un excellent général de cavalerie, auquel vous pouvez confier tout ce que vous ne pouvez pas exécuter vous-même. Si ce que vous savez réussit, je pourrai, dès que je serai débarrassé des Suédois, vous épauler davantage. Mais vous devez comprendre que je me dois primo débarrasser de ces gens-là, pour n'avoir ni ne laisser rien à dos, ce qui serait très-imprudent.

4. AU MÊME.

Breslau, 30 janvier 1758.

Vous m'accusez d'impatience. Ce n'est pas cela, mais je crains que, dans un mois, ce qui est facile ou possible aujourd'hui ne devienne impraticable. Je crains ce que pourraient faire vos ennemis, s'ils sont sages, et tout cela me fait juger qu'il n'y a pas un moment à perdre. Les Russes sont à Königsberg, autre belle nouvelle pour moi. Enfin je me persuade pourtant que si vous aiguillonnez vos pleutres, vous en tirerez parti, non pas par la bonté intrinsèque, mais par le nombre, la seule façon dont vous puissiez les mettre en œuvre.2_67-b

<68>

5. AU MÊME.

Grüssau, 4 avril 1758.

Vive mon cher Ferdinand! Cela va à merveille. Voyez-vous, l'offensive vaut mieux que la défensive.2_68-a Vous comblez de honte le Cumberland, qui, avec les mêmes troupes que vous commandez, n'a fait que des coïonneries. Vous aurez beau jeu des Français; mais, arrivé au Rhin, il faut que vous deveniez un Fabius pour les projets et les dispositions, et un Annibal pour les rodomontades.

6. AU MÊME.

Opotschna, 21 juillet 1758.

Vous pouvez juger facilement de la douleur que me Cause la mort de mon frère.2_68-b Vous connaissez trop ma façon de penser pour en douter. J'ai ici cinq armées contre moi, et cela, de tous les côtés.

<69>

7. AU MÊME.

Liegnitz, 12 août 1758.

Vous sentez, mon cher, comme vous le devez nos pertes; je souhaite que vous n'en fassiez jamais d'aussi sensibles. Toutes les calamités fondent sur nous. Celles de la mort de nos proches sont irréparables; pour les autres, avec beaucoup de courage et de persévérance on en vient à bout, et l'on n'en a que les soins et la peine, choses qu'il ne faut pas mettre en compte lorsqu'il s'agit du bien et du salut de la patrie.

8. DU DUC FERDINAND DE BRUNSWIC.

Dülmen, 2 septembre 1758.

Votre Majesté a manifesté actuellement à presque tous ses ennemis sa valeur, sa prudence et son activité dans les manœuvres de la guerre, jointes à ce talent supérieur qu'elle possède au-dessus de tous les ennemis dans l'exécution de ses projets. Le ciel combat visiblement pour elle, et embrasse sa juste cause. Elle ne veut être que le soutien et le libérateur de sa patrie, et elle s'est dignement acquis ces noms flatteurs. Le ciel daigne sans cesse verser ses plus précieuses bénédictions sur sa personne, et la combler de toutes les félicités imaginables! Sa valeur et sa persévérance opéreront à la fin ce salutaire ouvrage d'une paix générale et honorable. La défaite de ses<70> barbares ennemis2_70-a doit avoir causé une perplexité très-grande parmi l'armée soubisienne.2_70-b Ut in litteris.

Ferdinand, d. d. B. et d. L.

9. AU DUC FERDINAND DE BRUNSWIG.

Elsterwerda, 8 septembre 1758.



Monsieur mon cousin,

J'ai vu par la lettre de Votre Altesse, du 2 de ce mois, que Sa Majesté Britannique vient de lui accorder une pension annuelle de deux mille livres sterling. J'ai été charmé de voir que la reconnaissance ait porté ce prince à s'acquitter par là en quelque sorte envers elle des obligations essentielles qu'il a à V. A., qui certes a bien mérité, par les services qu'elle a rendus à Sa Majesté Britannique, la susdite pension, et même une plus forte. Je lui en fais, en attendant, mon compliment, et je suis avec cette estime qu'elle me connaît pour elle, monsieur mon cousin, etc.

<71>

10. AU MÊME.

Schönfeld, près de Dresde.
15 septembre 1758.



Monsieur mon cousin,

J'ai reçu la lettre de Votre Altesse, du 8 de ce mois, et tout ce qu'elle m'y marque touchant ma cavalerie qui se trouve actuellement auprès de son armée est bien fondé. Mais, d'un autre côté, elle voudra bien considérer la situation épouvantable dans laquelle je me trouve à présent, ayant partout des ennemis dans mon pays et devant moi, et que les Russes, quoique battus d'importance, ayant tiré à eux tout ce qu'ils pouvaient de troupes de la Pologne, se sont postés sur la frontière de la Nouvelle-Marche, s'y étant retranchés au possible, de façon que je suis obligé de laisser vis-à-vis d'eux le comte Dohna avec son armée pour les y observer de près. Les Suédois, d'autre part, ont pénétré par la Marche-Ukraine, qu'ils tâchent d'abîmer, faisant mine de vouloir marcher droit en avant sur Berlin, de sorte que je ne saurais me dispenser d'y détacher quelques troupes pour m'opposer à eux, pendant un temps où j'ai ici toutes les mains pleines à faire contre les Autrichiens. Je ne saurais donc rien changer, vu ma situation présente, à la déclaration que j'ai faite antérieurement à V. A., savoir, que, au cas qu'elle jugeât qu'il pourrait y avoir encore une bataille contre l'armée française qu'elle a devant elle, elle garde ma cavalerie pour s'en servir à ce but pendant la bataille, mais que, au cas qu'il ne puisse être question chez vous d'autre chose, sinon que les armées restent tranquilles l'une vis-à-vis de l'autre, elle ait la bonté de me renvoyer la cavalerie qui m'appartient, et dont j'ai moi-même un grand besoin; d'autant plus que V. A. ne saurait retirer aucun avantage de dix escadrons de dragons de plus ou de moins, pendant qu'on ne ferait que s'entre-regarder. Mais autre chose serait si V. A. était résolue de donner la bataille, et en ce cas ma cavalerie<72> ne la quitterait qu'après ladite bataille. Vous pouvez compter que dès que je me serai débarrassé ici de mes ennemis les plus pressants, ce sera avec plaisir que je vous renverrai non seulement ladite cavalerie, mais plus de troupes encore. Veuillez, en attendant, seulement prendre en considération ma situation présente.

Au reste, vous avez sagement fait de ne point entier en matière avec le commissaire français en question, puisqu'il ne se serait agi tout au plus que de chipotages incertains et de propositions vagues et captieuses. Je suis avec l'estime que j'ai vouée à V. A. à jamais, monsieur mon cousin, etc.

11. AU MÊME.

Landeshut, 21 avril 1739.

J'ai reçu, mon cher Ferdinand, votre lettre de Windecken. Je suis très-mortifié que vous n'ayez pas réussi autant que moi et tous les honnêtes gens l'avons souhaité. Mais que cela ne vous rebute pas; vous avez fait, selon ce que j'ai pu comprendre par le chasseur, des dispositions très-bonnes et excellentes; vous avez mené vos troupes en bon et brave général; le reste n'est pas votre faute, et il ne faut pas que cela vous décontenance en rien. Pour vous parler franchement, mon cher, la seule chose que je trouve à redire à votre armée, et à laquelle je vous conseille de penser sérieusement, c'est le gros canon; dans cette maudite guerre, il est impossible de réussir sans en avoir un grand train, ainsi que d'obusiers. Vous saurez les projets de mon frère; ainsi je ne vous en parle pas. Je ne sais pas non plus ce que vous méditez à présent : mais, s'il vous est impossible de<73> prendre le magasin de Fridberg, je crois qu'avec un petit détachement vous pourriez faciliter à mon frère le moyen de chasser les cercles et les Autrichiens de Bamberg. Cela sera bon pour la Hesse et pour moi. Je crois que mon frère vous en écrira de même, car cette bataille2_73-a n'est qu'une affaire de bibus,2_73-b un village attaqué que l'on n'a pas pu forcer. Il faut traiter la chose en bagatelle; alors elle le devient effectivement. Adieu, mon cher; je vous embrasse; il faut tenter fortune une autre fois sous de plus heureux auspices et avec du gros canon. Je suis avec bien de l'estime, mon cher Ferdinand, etc.

12. AU MÊME.

Reich-Hennersdorf, 26 juin 1759.

Nous sommes ici les bras croisés, tant qu'il plaira à cette bénite créature que j'ai vis-à-vis de moi; mais au premier mouvement, il y aura de bons coups de donnés. Adieu, mon cher; je vous embrasse.2_73-c

<74>

13. AU MÊME.

Le duc Ferdinand soumettait tous ses plans d'opérations à l'approbation du Roi, qui a mis les réponses suivantes au bas des projets du 27 et du 31 octobre 1760 :

(Novembre 1760.)

Tout cela est bien et conforme aux idées que je vous ai communiquées, et que j'ai approuvées parfaitement.

(Novembre 1760.)

J'en suis infiniment content; vous avez parfaitement saisi mes idées, et il n'y manque pas la moindre chose.

14. AU MÊME

Breslau, 20 janvier 1762.

Vous serez déjà sans doute informé de la nouvelle peu attendue de la mort de l'impératrice de Russie, qui, selon mes lettres de Varsovie, est arrivée le 5 de ce mois. C'est toujours un grand événement pour moi, qui, de quelque façon que les choses tournent, ne saurait que m'être favorable. Quoique je ne saurais pas encore juger proprement sur la manière que cela se dénouera du côté de l'orient, j'ai, jusqu'à présent, toute espérance d'une bonne réussite, tant qu'on la saurait avoir, de sorte que, tout combiné et pris ensemble, je dois<75> présumer que je saurais donner de bonnes nouvelles bientôt à V. A. à ce sujet.

Le ciel commence à s'éclaircir, mon cher; bon courage!2_75-a

15. AU MÊME.

Breslau, 17 février 1762.

L'empereur de Russie m'a demandé mon ordre; ce n'est certainement pas un signe de haine ni de prévention. J'en ai profité comme vous pouvez croire ....

16. AU MÊME.

Breslau, 5 mars 1762.

J'espère que dans peu notre correspondance deviendra plus intéressante. Il y a apparence que j'aurai de bonnes nouvelles à vous donner. Le ciel nous assiste, mon cher, nous en avons encore grand besoin, et qu'il confonde les pèlerinages de Marienzell,2_75-b les reliques de Sa Majesté Catholique, et les p...... de Sa Majesté Très-Chrétienne!2_75-c

<76>

17. AU MÊME.

Breslau, 2 avril 1762.

Je vous confie sous le sceau du plus grand secret, même vis-à-vis de l'Angleterre, que nous allons faire une alliance avec la Russie, touchant le Holstein; tout sera conclu le 15 ou le 16 du mois d'avril. Si les Danois ont eu l'imprudence de prendre Lübeck, je donne passage aux Russes, qui nous en déferont à coup sûr; mais je ne crois pas que les Danois le tentent.

<77>

VII. CORRESPONDANCE DE FRÉDÉRIC AVEC GUSTAVE III, ROI DE SUÈDE. (11 AVRIL 1771 - 27 OCTOBRE 1783.)[Titelblatt]

<78><79>

1. AU ROI DE SUÈDE.

Le 11 avril 1771.



Monsieur mon frère,

Je suis infiniment sensible aux marques d'amitié que Votre Majesté me donne en traversant un bout de mes États. J'ai partagé sa douleur et la perte; qu'elle vient de faire d'un père tendrement aimé, et je souhaite que ce soit le dernier chagrin qu'elle éprouve de sa vie. Si ses nouvelles de Suède sont conformes à mes vœux, elles me procureront la satisfaction d'embrasser un neveu dont la renommée m'a dès longtemps prévenu, qui se fait estimer de tous ceux qui l'approchent, et dont le moment présent me procurera la connaissance, ou bien à laquelle il faudra renoncer pour jamais. Je conçois combien ma sœur désire de revoir de dignes fils qui désormais seront son unique consolation. Je sens que tous les mouvements qui précèdent une diète extraordinaire peuvent exiger la présence d'un prince qui s'y trouve si étroitement intéressé; cependant je me flatte encore qu'un jour qui prolongera le retour de V. M. ne sera pas assez important pour me priver du bonheur de l'embrasser. J'attends les nouvelles que V. M. voudra me donner entre l'incertitude et l'espérance, la priant de me conserver les sentiments d'amitié qu'elle vient de me témoigner, et de me croire avec une tendresse mêlée d'estime et de considération,



Monsieur mon frère,

de Votre Majesté
le bon frère et oncle,
Federic.

<80>

2. AU MÊME.

Le 16 avril 1771.



Monsieur mon frère,

Rien ne pouvait me faire plus de plaisir que l'agréable nouvelle que V. M. m'annonce dans sa lettre. J'aurai donc la satisfaction de l'embrasser, et, la connaissant personnellement, de joindre mes applaudissements à ceux que l'Europe lui a prodigués à si juste titre. Le chemin naturel conduira V. M. ici, à Potsdam; elle sera toujours la maîtresse d'aller à Berlin, car il faut passer ce lieu pour y aller, venant de Brunswic. Personne ne serait plus disposé que moi à rendre à V. M. tout ce qui lui est dû, si elle le permettait; mais ses volontés seront des règles pour moi, et elle sera comte de Gothland autant qu'elle jugera à propos de l'être; et bien loin de la gêner en quoi que ce soit, je me ferai une règle de prévenir ses désirs autant qu'il sera en moi. Les nouvelles de Stockholm m'apprennent que ma pauvre sœur commence à se remettre tant soit peu de la cruelle affliction dans laquelle elle a été plongée. L'espérance de rassembler dans peu sa famille y contribue, et je devrai encore à V. M. la conservation d'une si tendre sœur, par la consolation qu'elle trouvera dans le sein d'un fils bien-aimé. Je fais des vœux pour que le temps favorise le voyage de V. M., en l'assurant qu'en aucun endroit elle n'a été attendue avec autant de désirs et d'impatience qu'ici, étant avec tous les sentiments de considération et de tendresse, etc.

<81>

3. AU MÊME.

Le 5 mai 1771.



Monsieur mon frère,

J'ai bien regretté que Votre Majesté n'ait pas passé ici dans des circonstances plus favorables pour lui faire passer son temps plus agréablement. Pour moi, qui perds mes forces et mes facultés journellement, il ne me reste qu'un cœur sensible et une âme reconnaissante. J'ai été charmé de l'apparition que V. M. vient de faire ici, et j'en conserverai un souvenir pour la vie. Mais qu'il est dur de penser à un congé éternel! Il semble que V. M. ne s'est montrée que pour se faire regretter davantage; il faut l'aimer quand on a la satisfaction de la connaître, et en même temps il faut renoncer à la revoir jamais. Je ne doute point que V. M. ne soutienne la haute idée qu'elle a donnée ici, et partout où elle s'est arrêtée, de sa personne. Elle trouvera sans doute beaucoup d'obstacles à combattre dans le pays où elle va régner; mais qu'elle se souvienne que le monde attache le mérite aux difficultés vaincues. C'est une consolation quand on en trouve, et la seule peut-être dans la carrière dure et épineuse des gouvernements que nous avons à remplir. Si j'ai parlé avec franchise à V. M. de ses affaires de Suède, ce n'est, en vérité, que le tendre intérêt que je prends à sa personne qui m'a engagé à le faire; mes vœux ne sont que pour sa prospérité, et j'ai cru devoir lui indiquer les écueils qu'il y avait à redouter pour elle dans la situation délicate et critique où elle va monter sur le trône. Je ne doute point que sa sagesse saura lui faire éviter tout ce qu'il y a de dangereux, et que sa modération n'ajoute un nouveau lustre à sa gloire; j'aurai le plaisir d'applaudir à ses succès. En lui souhaitant toutes les bénédictions dont l'huma<82>nité est susceptible, je la prie de me croire avec l'estime la plus distinguée et la plus tendre, etc.

4. AU MÊME.

Le 28 juin 1771.



Monsieur mon frère,

Je vois, par les lettres que Votre Majesté a bien voulu me faire communiquer, qu'elle se trouve bien embarrassée de concilier les différents partis, et je crois qu'elle s'y était bien attendue. S'il y avait des Suédois en Suède, ils seraient tous du même avis pour le bien du royaume; mais les corruptions étrangères ont trop perverti l'esprit national, et une des plus difficiles attentions de son règne sera de tempérer les deux partis, pour qu'ils ne s'entre-déchirent pas. Cette balance à tenir d'une main toujours sûre n'est pas aisée en politique, et c'est pourquoi elle est digne d'entrer dans les projets de V. M. Je serais très-content de moi-même, si j'avais pu parvenir à tranquilliser des esprits effarouchés de ce qu'ils imaginaient des desseins de V. M. sans les connaître. J'ai assuré, sur ce qu'elle m'a dit elle-même, qu'il n'y avait point de nouveau traité de conclu avec la France, que V. M. n'avait aucunement le dessein de renverser les constitutions de son royaume, et qu'elle m'avait paru dans la ferme intention de cultiver autant qu'elle pourrait la bonne amitié de ses voisins. J'ai écrit en Russie que son intention avait été de finir son voyage par Pétersbourg pour retourner à Stockholm, ce que la mort du défunt roi avait dérangé. Enfin j'ai tâché d'affaiblir toutes les impressions contraires à ses sentiments et à la vérité qui commençaient à se répandre,<83> et je n'ai fait en cela que ce qui est d'un honnête homme, dont la conduite doit tendre à concilier les esprits et non à les aigrir. J'espère que les petits nuages domestiques se dissiperont aussi insensiblement, et que V. M. jouira d'une fortune aussi douce que la position actuelle où elle se trouve le comporte. Mes vœux seront toujours pour toutes les choses qui pourront contribuer à sa prospérité, l'assurant des sentiments d'estime et de tendresse avec lesquels je suis, etc.

5. AU MÊME.

Le 3 juillet 1772.



Monsieur mon frère,

Le général de Spens vient de me rendre les lettres de Votre Majesté et de me remettre l'ordre du feu roi son père, ainsi que celui qu'elle destine à mon neveu, et qu'il se fera un plaisir de porter comme venant de V. M. V. M. voudra bien que je commence par la féliciter sur son couronnement; elle ne doutera pas, à ce que j'espère, des vœux sincères que je fais pour la prospérité de son règne et pour son contentement personnel. Ces vœux partent du cœur d'un parent qui lui est sincèrement attaché, et qui participe à toutes les fortunes qui peuvent lui arriver. La Reine sa mère, qui se trouve actuellement ici, a eu, ces jours passés, quelques incommodités qui nous ont alarmés, mais qui heureusement se sont passées; elle, ainsi que la princesse sa fille,2_83-a jouissent à présent d'une bonne santé. Elles se préparent pour un départ qui sera d'autant plus sensible, qu'il pour<84>rait bien être pour toujours; mais ce qui deviendra la cause de notre affliction sera celle du contentement de V. M.; ainsi je n'en parle plus. En la priant de croire qu'on ne saurait être avec plus de considération et de tendresse que je suis, etc.

6. AU MÊME.

Le 3 août 1772.



Monsieur mon frère,

Il me serait impossible de laisser partir la princesse votre sœur sans me servir de l'occasion pour faire parvenir cette lettre entre les mains de V. M. Je crois qu'elle partagera mon affliction de voir partir la Reine sa mère, dont il faut prendre un congé éternel. En attendant, je fais des vœux sincères pour la prospérité de V. M. et de toute sa maison, en la priant d'être persuadée que je m'y intéresse avec plus de sincérité que personne, étant avec autant d'attachement que de considération, etc.

7. AU MÊME.

Le 1er septembre 1772.



Monsieur mon frère,

Je vois par la lettre de Votre Majesté le succès qu'elle a eu dans le changement de la forme du gouvernement suédois. Mais croit-elle<85> que cet événement se borne à la réussite d'une révolution dans l'intérieur de son royaume? et ne se souvient-elle pas que la Russie et le Danemark, et moi-même, nous avons garanti cette forme de gouvernement? Que V. M. se souvienne de ce que j'ai eu la satisfaction de lui dire lorsque, à Berlin, j'ai joui de sa présence. Je crains bien que les suites de cette affaire n'entraînent V. M. dans une situation pire que celle qu'elle vient de quitter, et que ce ne soit l'époque du plus grand malheur qui peut arriver à la Suède. Vous savez, Sire, que j'ai des engagements avec la Russie;2_85-a je les ai contractés longtemps avant l'entreprise que vous venez de faire. L'honneur et la bonne foi m'empêchent également de les rompre, et j'avoue à V. M. que je suis au désespoir de voir que c'est elle qui m'oblige à prendre parti contre elle, moi qui l'aime et qui lui souhaite tous les avantages compatibles avec mes engagements. Elle me met le poignard au cœur, en me jetant dans un embarras cruel duquel je ne vois aucune issue pour sortir. J'ai écrit de même à la Reine sa mère; je lui expose les choses dans la plus grande vérité; mais la chose est faite, et la difficulté consiste à y trouver un remède. Je regarderais comme le plus beau jour de ma vie celui où je pourrais parvenir à rajuster ce qui s'est passé, ne pensant qu'aux véritables intérêts de V. M., et ne souhaitant que de pouvoir lui donner des marques de la haute estime et de l'attachement avec lequel je suis, etc.

<86>

8. AU MÊME.

Le 5 octobre 1772.



Monsieur mon frère,

Il est naturel de craindre quand on s'intéresse pour des personnes, surtout quand on les voit engagées dans des entreprises dont le danger est éminent; voilà comme j'ai pensé en apprenant la révolution de Suède et toutes les circonstances où se trouvait V. M. Quoique j'admire ses grands talents, je ne lui souhaite jamais de se trouver dans la situation où la fatalité m'avait mis durant la dernière guerre; c'est un souhait à faire à son plus cruel ennemi, et non pas à des parents auxquels leur mérite personnel autant que le sang nous intéresse; et si mes vœux sont exaucés, V. M. jouira d'une longue paix avec ses voisins, dont elle sait mieux que je ne puis le lui dire qu'il y en a qui méritent de sa part les plus grands ménagements. Elle a deux factions dans son royaume, ennemies depuis longtemps les unes des autres. Ce n'est pas l'ouvrage d'un jour que de les réunir cordialement. Sa prudence commencera cet ouvrage, mais il n'y a que le temps qui puisse le consolider. C'est sur cette réunion des esprits que V. M. peut établir et affermir son règne, et cette entreprise demande de la tranquillité et du repos, de sorte que je suis persuadé que V. M. fermera constamment l'oreille aux insinuations malignes de ceux qui voudraient la brouiller mal à propos avec ses voisins, et qu'elle ne pensera qu'à recueillir tranquillement les fruits des soins qu'elle se donne pour remettre l'ordre et la règle dans son royaume. Comme c'est ce qui contribuera le plus à sa gloire, je serai des premiers à l'applaudir, l'assurant de la haute estime et de la considération avec laquelle je suis, etc.

<87>

9. AU MÊME.

Le 8 décembre 1772.



Monsieur mon frère,

Le comte Dönhoff2_87-a m'a rendu la lettre que Votre Majesté a bien voulu m'écrire, qui m'a fait un plaisir sensible en me renouvelant les assurances de son amitié, dont je fais un cas infini. Je n'ai jamais changé de façon de penser vis-à-vis de V. M., mon cœur ne saurait se démentir; mais j'ai craint les suites de ses entreprises, et mes craintes ne sont pas encore calmées sur son sujet. Tout le monde n'envisage pas du même œil la révolution qui s'est faite dans le gouvernement de Suède; cela peut causer des guerres et répandre, Sire, de l'amertume sur le reste de votre règne. Il y a des moments de calme auxquels de forts orages succèdent. La Suède en est menacée, et je ne vois pas comment elle y pourra résister. J'ai cru que, en écrivant à V. M., ma probité demandait que je me servisse du pinceau de la vérité et non de celui de la flatterie pour lui exposer mes craintes sur l'avenir. Jamais je ne désirerais plus d'être trompé dans mes conjectures que dans les circonstances présentes; cependant j'ai tout lieu d'appréhender le contraire. V. M. vient de calmer l'alarme qu'elle a causée aux Danois, et je suis persuadé de ses sentiments pacifiques; sans doute qu'ils conviennent à sa situation, où son plus grand objet consiste à gagner, à réunir les esprits. Autant qu'il m'est revenu de la Russie, l'Impératrice, ayant éprouvé les embarras que souvent les ambassadeurs suscitent à sa cour, s'est, à ce qu'on m'a dit, déterminée à ne recevoir que des ministres du second ordre; je suppose donc que V. M. se conformera apparemment à cette règle pour le caractère qu'elle donnera au comte Posse. En attendant, je fais des vœux<88> pour que les affaires tournent selon l'avantage de V. M., en l'assurant de la tendresse pleine de considération avec laquelle je suis, etc.

10. DU ROI DE SUÈDE.

(Oerebro, janvier 1773.)



Monsieur mon frère et cousin,

C'est toujours avec la même satisfaction que je reçois les lettres que Votre Majesté veut bien m'écrire. J'ai actuellement à la remercier de celle qu'elle m'a fait parvenir, en date du 8 du mois passé. Les sentiments d'intérêt pour mon bonheur que V. M. y exprime me touchent sensiblement, et ils me seront toujours chers à conserver. Mais pour me servir de la même franchise dont V. M. me donne l'exemple, et dont le principe est gravé dans mon propre cœur, je lui demanderai de qui je dois avoir les malheurs à appréhender que V. M. semble m'annoncer; et qu'est-ce que les puissances étrangères ont à faire dans les choses qui ne regardent que l'intérieur de mon royaume? Quant au premier, je suis certain qu'il y a en Europe des souverains qui, bien loin de m'en vouloir, me donneront dans l'occasion toute l'assistance qui est en leur pouvoir, et mes voisins m'ont donné chacun séparément les assurances les plus fortes de leur amitié et de leur désir de vouloir vivre avec moi dans une bonne et parfaite harmonie. Je dois donc avoir trop de confiance en leur bonne foi pour pouvoir croire qu'ils soient occupés à former des projets pernicieux contre ma personne et mes États, dans le temps que je reçois des assurances du contraire de leur part. Et quant au second, V. M. sent parfaitement elle-même jusqu'à quel point le devoir m'impose la loi<89> de maintenir la gloire et l'indépendance de ma couronne. C'est un sujet sur lequel je ne puis ni ne dois jamais admettre de tempérament. La chose en elle-même n'en est point susceptible, et lorsque j'observe rigoureusement de ne me point mêler dans les affaires domestiques de quelque puissance que cela soit, j'ai lieu de prétendre à un retour également équitable de leur part. Le contraire établirait un simple droit de convenance dans le monde, qui peut aller à l'infini et qui n'a point de bornes. Mais, de plus, V. M. peut être persuadée que si le flambeau de la guerre s'allume dans le Nord, il s'étendra certainement plus loin, et, les événements une fois abandonnés au sort des armes, il sera bien difficile, malgré toutes les probabilités même, de prévoir ou de calculer quelles en seront les suites.

Telle est la manière sous laquelle j'envisage et ma propre situation, et celle des affaires en général. Je la confie à un oncle qui m'est cher, et à un souverain qui par ses qualités rares jouit de l'admiration de toute l'Europe. Sous l'un et l'autre de ces titres, son amitié me sera précieuse à conserver, tout comme je m'efforcerai toujours à convaincre V. M. du sentiment de la haute estime et de l'attachement parfait avec lesquels je serai toujours, etc.

11. AU ROI DE SUÈDE.

Le 23 janvier 1773.



Monsieur mon frère,

Je viens de recevoir la lettre que Votre Majesté m'écrit d'Oerebro, avec toute la satisfaction possible. Je vois que V. M. approuve ma franchise, même qu'elle veut que je la pousse plus loin. Je ne doute<90> pas que V. M. n'ait de bons alliés; mais je les trouve très-éloignés de la Suède, et par conséquent peu en état de l'assister. Elle me dit qu'elle est satisfaite des témoignages d'amitié que lui ont donnés ses voisins. Je me garderai bien de la troubler dans l'heureuse sécurité dont elle jouit, et, bien loin de me plaire à prophétiser des infortunes, j'aimerais mieux annoncer des prospérités. Cependant je déclare à V. M., comme à tout son royaume, que je ne me suis jamais cru prophète, ni voyant, ni inspiré; je ne sais que calculer l'avenir sur de certaines données2_90-a qui peuvent quelquefois tromper par la vicissitude des événements, et qui souvent répondent au pronostic qu'on en a porté. Je pourrais me servir de la réponse de ce devin qui avait pronostiqué des malheurs qui menaçaient César, ce grand homme, aux ides de mars; César lui dit en le rencontrant : « Eh bien, ces ides de mars sont venues. » Le devin lui répondit : « Elles ne sont pas encore passées. »2_90-b V. M. sait le reste. Mais le cas n'est pas exactement pareil; la catastrophe de César n'est point à craindre pour V. M., et si des présages de l'avenir lui font de la peine, je puis comme un autre couvrir de fleurs des précipices pour les cacher à ses yeux. Elle peut toutefois compter que s'il y a quelqu'un qui souhaite de la soustraire aux hasards des événements, c'est moi, et que si les choses tournent autrement, ce ne sera pas ma faute, étant avec toute la considération et toute l'amitié possible, etc.

<91>

12. AU MÊME.

Le 28 mars 1775.



Monsieur mon frère,

Quelque plaisir que me fassent pour l'ordinaire les lettres de Votre Majesté, je lui avoue que celle que je viens de recevoir m'a plongé dans la plus vive douleur, d'autant plus que le malheur qui nous menace était inattendu pour moi. Je voudrais savoir à tout moment des nouvelles de cette chère sœur, je voudrais voler moi-même à son secours; mais ce sont des choses impossibles. Il ne me reste qu'à faire des vœux pour sa conservation, et d'espérer, s'il est possible, que son bon tempérament surmonte le mal. Je remercie cependant infiniment V. M. de la bonté qu'elle a eue de me communiquer cette triste nouvelle et d'y avoir ajouté la consulte des médecins. Veuille le ciel et la nature la rendre à ses parents qui l'aiment! J'espère que mon sort ne sera pas que, aîné de la famille, j'aie la douleur de voir mourir mes cadets avant moi et d'enterrer ainsi toute ma famille. Que V. M. compatisse à mes alarmes, à mes angoisses, à mes inquiétudes; et si également il se trouve quelque confusion dans ma lettre, qu'elle daigne l'excuser, car ma surprise a été extrême. Veuille le ciel que j'aie la consolation d'apprendre par V. M. même que nos craintes ont été prématurées! Je la prie de me croire avec les sentiments de la plus haute estime et de la plus parfaite considération, etc.

<92>

13. AU MÊME.

Le 30 mars 1775.



Monsieur mon frère,

J'ai mille obligations à Votre Majesté des bonnes nouvelles qu'elle a la bonté de me donner. Je lui avoue qu'elle me tire de cruelles angoisses, car je ne pouvais me cacher le danger où la Reine se trouvait, et comme il est impossible de savoir qui du mal ou du tempérament l'emportera, je n'ai pu calmer mes inquiétudes. Je bénis le ciel de ce qu'il nous a conservé une vie aussi précieuse, et V. M. d'avoir eu la bonté de me l'apprendre. Je souhaite que ceci soit le dernier chagrin domestique que V. M. éprouve de longtemps, et qu'elle jouisse de toutes les bénédictions que doivent lui mériter ses grandes qualités et, en cette occasion encore, les marques de l'attachement filial qu'elle a données à sa digne mère. Puissent les médecins se tromper toujours de même quand ils font les prophètes de malheur, et perdre, ainsi que le reste des charlatans sacrés et profanes, le peu de crédit que l'on ajoute à leurs paroles! Puissiez-vous, Sire, surtout n'avoir jamais besoin des secours de la pharmacie et jouir, pour la satisfaction de vos proches et de vos sujets, d'une santé toujours durable! C'est dans ces sentiments et ceux de la plus haute estime et considération que je suis à jamais, etc.

<93>

14. DU ROI DE SUÈDE.

Le 6 décembre 1775.

C'est à Votre Majesté que je m'adresse, non pas comme à un souverain qui m'est étranger, et avec qui toute relation, excepté celle qui passe par les ministres ordinaires, est interdite, mais à mon oncle, en qui j'ai placé ma confiance depuis longtemps, et avec qui je suis accoutumé à m'entretenir en particulier. Tout ministre qui se trouvera à ma cour de la part de V. M. me sera certainement agréable, et M. le comte de Nostitz l'est de même. Il est jeune, et je suis persuadé qu'il ne voudra pas me déplaire; mais il me semble qu'il s'est laissé un peu emporter dans une affaire qui, en vérité, n'en valait pas la peine. Il n'a été question que d'un de ses laquais qui n'a pas voulu rester à l'endroit où se tiennent tous les autres domestiques au bal de l'Opéra, qui a fait du train, qui a résisté à ma garde, et qui a pris l'officier qui la commandait par le collet, lorsqu'il voulait le faire sortir d'un vestibule où il était défendu à la livrée de demeurer, afin que les masques qui entraient et qui sortaient du bal n'en fussent point importunés. Ce domestique a été envoyé au corps de garde du château la nuit du vendredi au samedi, et il ne pouvait en sortir qu'à mon réveil, lorsqu'on m'eut fait rapport de ce qui s'était passé. Il le fut dans l'instant, et j'ordonnai à l'officier, quoique insulté, de se rendre auprès de M. de Nostitz pour lui faire excuse de cette méprise. Cela ne pouvait se faire que le lendemain dimanche, parce que le sous-introducteur devait préalablement aller chez M. de Nostitz savoir l'heure où ce ministre voulait rester chez lui pour recevoir la visite de l'officier. Tout cela a été exécuté dans la journée de dimanche; le comte de Cronstedt, qui est l'officier en question, y a été; il a été accompagné du même sous-introducteur, et il a fait à M. de Nostitz une excuse pareille à celle dont je joins ici la copie. C'était,<94> je crois, tout ce qu'on peut faire pour un laquais arrêté; mais ce qui m'a paru étrange, dans une affaire qui ordinairement ne fait pas de sensation dans aucune cour, c'est le ton et la manière dont M. de Nostitz l'a traitée. Il a fait passer dans ces entrefaites deux notes ministérielles à M. de Scheffer, dont j'envoie également des copies à V. M., afin qu'elle juge elle-même si elles se trouvent conformes aux sentiments que V. M. m'a toujours témoignés. Il ne pouvait pas ignorer que mon dessein ne fût de lui rendre toute justice possible. M. de Scheffer l'en avait assuré dans la réponse qu'il fit à sa première note, et je connais trop les égards que demande le caractère de ministre étranger, pour vouloir que personne dans mon royaume y manquât. Certes, ce ne sera pas par celui de V. M. que l'on commencera. Mais après vous avoir mis, mon cher oncle, au fait de cette affaire, je proteste que mon intention n'est point de me plaindre de M. de Nostitz; je serais même au désespoir si le moindre désagrément lui en arrivait. Tout ce que je désire, si V. M. même le juge à propos, c'est qu'il puisse être avisé de mettre un peu plus de douceur et de liant dans sa manière de traiter les affaires. Je suis persuadé que cela est conforme à l'amitié que V. M. m'a toujours témoignée, et dont elle ne voudra pas que celui qui est chargé de l'entretenir puisse s'écarter.

J'ai été alarmé un moment pour la santé de V. M.; je suis heureusement rassuré sur ce sujet, mais ma mère m'inquiète de nouveau par une fièvre dont elle ne peut pas être entièrement guérie. Tous ces sujets d'intérêt augmentent et fortifient les sentiments de la haute considération et de l'attachement parfait avec lesquels je serai pour toujours, etc.

<95>

15. AU ROI DE SUÈDE.

Le 22 décembre 1775.



Monsieur mon frère,

J'ai été fort fâché d'apprendre ce qui vient de se passer à Stockholm à l'occasion d'un domestique du comte Nostitz, mon ministre. L'usage est, dans les cours policées de l'Europe, qu'on n'arrête jamais un domestique d'un ministre étranger avant de l'en avertir; le contraire est regardé comme une insulte faite à son souverain. Je suis persuadé que V. M. terminera aimablement cette affaire, et comme l'insulte faite à mon ministre a été publique, il faut que la réparation le soit également. J'aimerais mieux n'avoir personne à Stockholm que de voir ceux qui y résident en mon nom exposés à de telles avanies. Mais je suis bien persuadé que ce qui s'est fait est arrivé sans la participation de V. M.; elle m'a témoigné trop d'amitié pour que j'aie le moindre doute sur ses sentiments.

Je suis charmé de ce que V. M. est satisfaite du calme qui règne à présent dans sa maison; si mes vœux sont exaucés, il sera inaltérable. J'attribue la maladie de la Reine douairière en partie à l'époque critique où elle se trouve, et j'espère que, ce mauvais pas une fois passé, nous pourrons encore la conserver longtemps. Pour moi, je relève du quatorzième accès de goutte2_95-a que j'ai eu presque sans intervalle depuis trois mois. Je ne puis qu'être sensible à l'intérêt que V. M. prend à ma santé; je l'assure que mes sentiments sont entièrement réciproques, la priant de me croire avec la plus haute estime, etc.

<96>

16. AU MÊME.

Breslau, 2 décembre 1778.



Monsieur mon frère,

La goutte dont j'ai été tourmenté pendant quelque temps m'a empêché de recevoir plus tôt, par l'aide de camp de V. M., la lettre qu'elle a la bonté de m'écrire. Je la félicite sur l'heureuse délivrance de la Reine, en souhaitant à V. M. toutes les prospérités qu'elle peut désirer elle-même. Le général Hordt2_96-a ne se trouve point ici; il est à l'armée de mon frère, et je ne l'ai pas vu depuis mon départ de Berlin. Mais comme il ne me convient pas d'entrer dans de certains détails, il ne me reste qu'à désirer que la bonne harmonie et l'union puisse toujours se conserver entre des personnes qui me sont chères et précieuses, et que les liens du sang unissent le plus étroitement ensemble. C'est ma façon de penser invariable; c'est de quoi je prie V. M. d'être persuadée, ainsi que de la singulière considération avec laquelle je suis, etc.

17. AU MÊME.

Le 15 mai 1780.



Monsieur mon frère,

J'embrasse toutes les occasions avec plaisir qui se présentent pour donner à V. M. des marques de mon amitié et de ma considération. M. de Lilljehorn pourra voir ici ce qu'il jugera à propos, quoique je<97> doute qu'il trouve des objets dignes d'exciter sa curiosité. V. M. a bien de la bonté de s'intéresser aux restes de mon existence, que l'âge et les infirmités minent journellement; mais tant que je conserverai la vie, je me ferai un plaisir de lui donner des marques de la considération et de l'attachement avec lequel je suis, etc.

18. AU MÊME.

Le 30 juillet 1782.



Monsieur mon frère et neveu,

La mort inattendue de ma sœur la reine douairière de Suède m'a été d'autant plus accablante, que je n'y étais aucunement préparé. Je la connaissais trop pour n'être pas persuadé qu'elle conserverait toujours le tendre cœur d'une mère, et qu'elle respecterait en toute occasion les liens indissolubles par lesquels la nature l'avait unie à sa famille. J'avoue à V. M. que j'ai le cœur déchiré de cette perte; j'en suis trop vivement touché pour m'étendre davantage sur ce triste sujet. Je fais des vœux pour que V. M. n'éprouve de longtemps des pertes semblables, en la priant de me croire avec les sentiments les plus distingués, etc.

<98>

19. AU MÊME.

Le 7 septembre 1782.



Monsieur mon frère,

La lettre dont Votre Majesté a eu la bonté de charger M. de Piper a renouvelé le sujet de ma douleur et de mes justes regrets. Ce sont de ces plaies ressenties qui saignent aussitôt qu'on y touche. Je souhaite que V. M. soit préservée à jamais d'aussi justes sujets d'affliction, et qu'elle n'ait que des sujets de contentement, étant avec tous les sentiments de considération possibles, etc.

20. AU MÊME.

Le 27 octobre 1783.



Monsieur mon frère et neveu,

J'ai appris par mes parents de Brunswic que Votre Majesté avait pris ce chemin pour se rendre en Italie, et qu'elle s'est souvenue de moi en parlant à ma sœur, de même qu'au duc de Brunswic. Je souhaite que le grand voyage qu'elle entreprend ne lui fasse aucune peine, et que son bras se guérisse, sans que les Alpes et les mauvais chemins y portent préjudice. Elle verra en Italie un exemple célèbre des vicissitudes humaines, les ruines d'une monarchie qui, dans ses beaux jours, avait subjugué une partie du monde connu, des cardinaux<99> au lieu de sénateurs, et un pape assis sur le trône des Césars. Chez nous, elle n'a vu que du sable et des soldats, et un vieillard qui maintenant s'achemine à grands pas vers son tombeau. Je lui souhaite toute sorte de bonheur pour son voyage et pour son retour, étant avec autant de considération que d'attachement, etc.

<100><101>

VIII. LETTRES DE FRÉDÉRIC A LA PRINCESSE SOPHIE-ALBERTINE DE SUÈDE. (12 JANVIER 1772 - 9 NOVEMBRE 1782.)[Titelblatt]

<102><103>

1. A LA PRINCESSE S.-A. DE SUÈDE.

Berlin, 12 janvier 1772.



Madame ma nièce,

J'ai été charmé au possible de voir par votre lettre le plaisir que vous avez eu des étoffes dont vous y faites mention. Je vous prie d'être très-persuadée que je ressentirai toujours une grande satisfaction de pouvoir vous prouver l'estime et la tendresse avec lesquelles je suis,



Madame ma nièce,

de Votre Altesse Royale
le fidèle oncle,
Federic.

2. A LA MÊME.

Le 10 août 1772.



Ma chère nièce,

Je vous ai vue partir avec bien de la douleur; je me suis séparé de votre chère mère, que j'aime si tendrement et peut-être que je ne verrai plus de ma vie, et de sa chère fille, qui possède son cœur. Ce sont des moments douloureux, et qui ne s'effaceront jamais de mon souvenir. N'oubliez pas un vieil oncle, ma chère nièce, qui vous aime<104> bien, mais qui sent lui-même que son âge ne le rendait pas propre à vous amuser. Faites souvenir quelquefois votre respectable mère d'un frère qui l'adore, et soyez persuadée du tendre attachement avec lequel je suis, etc.

3. A LA MÊME.

Le 11 août 1782.



Ma très-chère nièce,

Le coup funeste dont vous avez été atteinte m'a frappé également, ma chère nièce; cet événement fatal est arrivé lors même que toute la famine se flattait que nous pourrions encore conserver longtemps cette sœur si tendrement aimée. Je vous plains de tout mon cœur d'avoir perdu une mère si digne de votre attachement et de votre affection, d'autant plus que personne ne réparera cette perte. Les enfants sont destinés à porter leurs parents au tombeau; mais j'étais plus âgé que ma sœur, je devais la précéder, et c'est malheureusement moi qui lui paye le tribut de mes larmes. Ah! ma chère nièce, je ne suis guère en état de vous consoler; j'ai besoin de secours moi-même. Il faut, malgré qu'on en ait, que la raison étouffe la voix de la nature, et que le temps nous habitue à des privations aussi sensibles que sont celles de nos plus proches parents, qui ont sur nous les droits que le sang et leur mérite personnel leur donnent. Je vous embrasse, ma chère nièce; je prendrai toujours part à tout ce qui vous regarde, étant avec le plus tendre attachement, etc.

<105>

4. A LA MÊME.

Potsdam, 9 novembre 1782.



Madame ma nièce,

Je suis très-sensible au souvenir que vous avez bien voulu me témoigner par votre lettre, et à l'envoi du cachet du Grand Électeur qui s'est trouvé parmi les effets de feu votre chère mère, ma sœur. Je vous ai bien de l'obligation de l'un et de l'autre. Je conserverai le dernier, plus comme une marque de souvenir de cette sœur chérie, qui l'a possédé si longtemps, que non par aucune autre considération. La douleur si profondément gravée dans votre cœur de la perte de cette tendre mère, je la partage, soyez-en persuadée, bien vivement avec vous. Mes dispositions, et mon empressement à vous faire plaisir dans toutes les occasions qui se présenteront, vous en donneront des preuves non équivoques, ainsi que de l'amitié et de l'attachement parfait avec lequel je suis, etc.

<106><107>

IX. LETTRES DE FRÉDÉRIC AU PRINCE GUILLAUME V D'ORANGE. (18 OCTOBRE 1767 - 1772.)[Titelblatt]

<108><109>

1. AU PRINCE GUILLAUME V D'ORANGE.

Sans-Souci, 18 octobre 1767.



Monsieur mon cousin,

C'est avec une sensible peine que j'ai vu partir Votre Altesse.2_109-a Apprendre à la connaître, c'est apprendre à la regretter. Il me reste toutefois la consolation de la revoir à Loo, où je me flatte de la trouver dans la prochaine espérance de devenir père de famille. J'aurais souhaité de pouvoir lui rendre agréable le séjour qu'elle a fait ici; au moins puis-je l'assurer qu'elle en a emporté l'estime et la considération universelle, et qu'elle a rendu bons Hollandais tous ceux qui ont eu l'avantage de l'approcher. Il ne me reste, mon cher prince, qu'à faire des vœux pour que votre voyage se finisse sous d'aussi heureux auspices qu'il s'est annoncé, que vous conserviez quelque souvenir des absents qui vous sont attachés, et que vous rendiez justice aux sentiments d'estime et de considération avec lesquels je suis,



Monsieur mon cousin,

de Votre Altesse
le fidèle cousin et oncle,
Federic.

<110>

2. AU MÊME.

Le 11 novembre 1767.



Monsieur mon cousin,

J'apprends, mon cher prince, avec bien du plaisir votre heureuse arrivée en Hollande. Si j'ai pu contribuer à votre bonheur, vous devez bien être persuadé que je l'ai fait avec plaisir; et si mes vœux sont exaucés, ce bonheur aura un cours intarissable. J'apprends que ma nièce a été bien haranguée, et que vous avez eu la bonté de répondre pour elle. Cela est certainement embarrassant pour tout le monde, surtout lorsqu'on n'entend pas la langue de ceux qui pérorent. Je la crois quitte à présent de ces compliments jusqu'à ses premières couches, où je m'imagine que l'éloquence hollandaise ne laissera pas échapper cette occasion pour se signaler, et que quelque bon bourgmestre l'assurera que l'enfant qu'elle aura mis au monde est déjà un très-grand homme tout formé. La mort a bien fait des ravages en Europe tandis que nous avons célébré des noces : la reine de Naples est expirée le jour où l'on devait célébrer ses épousailles, et la bonne duchesse de Gotha, un des ornements de l'Allemagne,2_110-a est allée dans ce pays d'où ni postes ni courriers ne reviennent au nôtre. Mais je ne dois pas vous entretenir de réflexions noires; un jeune prince qui se marie n'a que des idées couleur de chair. Puissiez-vous les garder longtemps, et ne point oublier les connaissances que vous avez faites en ce pays-ci, où votre mémoire ne périra pas, tant que nous l'habiterons.

Je suis avec une parfaite estime, etc.

<111>

3. AU MÊME.

Berlin, 29 décembre 1767.



Monsieur mon cousin,

Rien ne pouvait m'être plus agréable que d'apprendre par votre lettre, mon cher prince, les nouvelles de la convalescence de ma nièce. J'avoue que son état dangereux m'avait jeté dans les plus grandes inquiétudes, et vous ne pouviez me faire des étrennes plus agréables que de m'en délivrer. Je vous remercie bien sincèrement de l'intérêt que vous prenez à mon individu, et des vœux que vous daignez faire pour la nouvelle année. Je vous assure, mon cher prince, que ces sentiments sont très-réciproques de mon côté. Puissiez-vous voir réunis sur vous tous les avantages dont ont joui les princes d'Orange, vos illustres prédécesseurs, avec une santé inaltérable et un contentement d'esprit parfait! Ce sont les sentiments, joints à ceux de la plus haute estime, avec lesquels je serai à jamais, etc.

Je vous prie de dire à la princesse d'Orange qu'elle ne peut rien me souhaiter de plus agréable pour la nouvelle année que son entière convalescence.

4. AU MÊME.

Berlin, 21 janvier 1768.



Monsieur mon cousin,

J'ai eu le plaisir de recevoir la lettre que Votre Altesse a eu la bonté de m'écrire du 15 de ce mois, et je regrette beaucoup qu'une indis<112>position qui m'est survenue m'empêche de vous écrire de main propre pour vous remercier des vœux tout à fait obligeants que vous m'adressez à l'occasion du prochain retour de mon anniversaire. Je prie en même temps Y. A. d'être bien persuadée de la part sincère que je prendrai invariablement à sa précieuse conservation, et que je ne cesserai d'être avec la plus parfaite estime et amitié, etc.

5. AU MÊME.

Le 23 mai 1768.



Monsieur mon cousin,

Si vous n'aviez pas voulu avoir mon portrait, je me serais bien gardé de l'envoyer à V. A. Il n'a d'autre mérite que de vous faire souvenir d'une personne qui est remplie d'estime pour vous, et qui se fera un plaisir de donner en toutes les occasions des preuves à V. A. de la haute estime et de la considération avec laquelle je suis, etc.

6. AU MÊME.

Wésel, 10 juin 1768.



Monsieur mon cousin,

Rien ne pouvait m'être plus agréable que l'invitation que Votre Altesse veut bien me faire, et l'espérance qu'elle me donne de l'embrasser<113> dans peu. Je profiterai de l'une et de l'autre, comme vous le voulez bien, aussi charmé de vous revoir et de vous entretenir que du plaisir de trouver ma nièce dans son nouvel établissement. J'ai tout arrangé pour mon voyage de Loo, où j'aurai la satisfaction de vous embrasser le 13,2_113-a et de vous assurer de vive voix de la haute estime et du tendre attachement avec lequel je suis, etc.

7. AU MÊME.

Le 30 juin 1768.



Monsieur mon cousin,

C'est à moi de remercier Votre Altesse du temps agréable qu'elle m'a fait passer à Loo. J'en ai regretté la courte durée, et si je n'étais pas comme un forçat enchaîné à mon ouvrage, j'aurais volontiers prolongé mon séjour dans ce charmant lieu. Je souhaite que V. A. y jouisse longtemps de tous les agréments qu'elle mérite si bien de goûter, et que dans peu la maison soit si remplie par de petits citoyens qui vous devront le jour, qu'il faudra l'agrandir et l'étendre. C'est la seule chose qui vous manque; et comme je m'intéresse sincèrement à tout ce qui peut contribuer au bonheur de V. A., elle ne trouvera pas étrange que mes vœux s'attachent à cet objet, étant avec la plus haute estime, etc.

<114>

8. AU MÊME.

Le 30 juillet 1768.



Monsieur mon cousin,

La bonne nouvelle que Votre Altesse vient de m'apprendre ne pouvait être communiquée à personne à qui elle fût plus agréable, ni qui s'y intéressât plus vivement que moi. Je suis charmé de voir votre succession établie, et déchoir de leurs espérances ceux qui, formant différents partis, fondaient les espérances de leur fortune sur l'attachement qu'ils n'avaient point voué à V. A. Je vous prie, mon cher prince, de témoigner à ma nièce toute la joie que j'ai de l'espoir de fécondité qu'elle nous donne. Regardez-moi, je vous prie, comme le meilleur et le plus fidèle ami de votre maison, charmé si je puis vous convaincre de la parfaite estime et de tous les sentiments avec lesquels je suis, etc.

9. AU MÊME.

Le 19 décembre 1768.



Monsieur mon cousin,

Je prends part à la désagréable scène que vient de vous donner M. de Breteuil.2_114-a Il mériterait certainement pis, mon cher prince, que d'être privé de vous voir chez lui, et je crois qu'il ne serait pas mauvais que les États généraux se mêlassent un peu de cette affaire pour rabattre son excessive présomption. Cet homme a fait l'impertinent<115> dans toutes les cours de l'Europe où il a eu des missions, et je vous plains des tracasseries qu'il vous fera essuyer; car, du caractère dont il est, il ne faut pas croire que celles-ci seront les dernières. Cela ne mène pas à grand' chose; il est ridicule qu'un ambassadeur français se targue ainsi à la Haye, pendant que les armées de son maître sont si maltraitées par Paoli.2_115-a C'est vis-à-vis de Paoli qu'ils devraient faire les fiers, et soutenir cette fierté par des victoires; mais tout ce que je pourrais dire de plus ne rendra pas raisonnable un homme affolé d'orgueil. Il n'y a que des humiliations personnelles qui puissent le corriger. Souffrez, mon cher prince, que je vous félicite sur les heureuses espérances que nous donne ma nièce. Je souhaite qu'elle accouche d'un fils pour assurer votre succession, et pour faire tomber tout esprit de cabale qui pourrait se former contre vous. Je vous souhaite en même temps mille prospérités pour la nouvelle année et bien d'autres suivantes, étant avec une tendre affection et toute l'estime possible, etc.

10. AU MÊME.

Le 1er janvier 1769.



Monsieur mon cousin,

Je souhaite à Votre Altesse pour la nouvelle année tout ce que je désire pour elle chaque jour de ma vie, savoir, de la santé, du contentement et toutes les prospérités qu'elle mérite. Je la remercie de la part obligeante qu'elle prend à ma personne. Du moins pouvez-vous être persuadé, mon cher prince, qu'on ne saurait s'intéresser plus<116> à ce qui vous regarde que je le fais. Vous vous plaisez à excuser la cour de France des insolences de son ambassadeur; cependant Choiseul2_116-a est un original qui ne le cède pas au sieur de Breteuil, et je crois que, en fait de prétentions, de chimères, de hauteur et de fierté, Choiseul est très-capable d'endoctriner M. son ambassadeur. Si mon approbation peut être de quelque poids, j'avoue que je la donne sans réserve à la conduite que vous avez tenue vis-à-vis de ce singulier personnage. Je désirerais encore, pour que cela fût parlait, que la république épousât la cause de son chef, et qu'elle fît connaître à la cour de France qu'elle ne voyait point avec des yeux indifférents les étranges procédés de son ambassadeur. Je suis persuadé qu'une déclaration pareille ferait son effet à la cour de Versailles, et que l'ambassadeur mettrait de l'eau dans son vin; car c'est s'abuser de penser que la France se trouve dans une situation à donner des lois à l'Europe. Jamais elle n'a été plus bas; ses finances ruinées, sa marine peu rétablie, ses forces de terre réduites à quatre-vingt mille hommes, est-ce là un épouvantail pour la république de Hollande? Il n'y a qu'à parler avec fermeté et dignité, et vous verrez ces bouffées d'orgueil se dissiper comme une vapeur légère que le vent emporte.

Je me réjouis des heureux progrès que ma chère nièce fait dans sa grossesse, et je fais des vœux pour que le dénoûment réponde à d'aussi beaux commencements. Je vous prie, mon cher prince, de compter toujours sur mon amitié, sur ma tendresse, sur mon estime, étant, etc.

<117>

11. AU MÊME.

Le 6 janvier 1769.



Monsieur mon cousin,

Je suis certainement reconnaissant autant que possible, mon cher prince, de l'empressement que vous avez de me donner des nouvelles qui me sont aussi intéressantes qu'agréables. Je souhaite que notre correspondance ne roule jamais que sur de pareils sujets, et que le ciel ne vous fournisse que des sujets de joie et de contentement. A présent que ma nièce a surmonté la violence d'une maladie dangereuse et cruelle, je ne suis pas en peine de son rétablissement; elle a deux ressources excellentes, le bon tempérament et la jeunesse, et celles-là mènent loin. Elle ne devrait pas s'étonner sans doute de la part que nous prenons ici à ce qui la regarde, car elle doit bien être persuadée qu'elle est tendrement aimée. A présent elle n'a besoin de ménagement que pour les yeux, qui se trouvent ordinairement affaiblis par de pareilles maladies, et si elle m'en écrit un peu plus tard, je n'en serai que bien aise, afin qu'elle y risque moins. En attendant. en vous remerciant encore mille fois, mon cher prince, des attentions obligeantes que vous avez eues pour moi durant cette maladie, je vous prie d'être persuadé de la tendresse infinie et de la parfaite estime avec laquelle je suis, etc.

<118>

12. AU MÊME.

(Janvier 1769.)



Monsieur mon cousin,

La part que Votre Altesse prend à mon vieux jour de naissance ne peut que lui attirer des remercîments de ma part. Je souhaite que la continuation de mon existence puisse vous être de quelque utilité; du moins sera-ce d'une personne qui prend un intérêt bien tendre, mon cher prince, à tout ce qui vous touche. Par une suite de ces sentiments, je ne puis qu'applaudir aux mesures que vous avez prises pour éluder les insolences de l'ambassadeur de France. J'avoue que j'aurais désiré de la république qu'elle donnât quelque signe de vie en cette occasion, et qu'il parût qu'elle prenait part à la dignité de la première personne de son corps. Dans la situation où se trouve actuellement la France, une déclaration des États généraux aurait fait sensation en France, et je garantirais presque que M. l'ambassadeur aurait rabattu de son impertinence. Mais je m'ingère à parler à un stadhouder de ce qui regarde une république dont il connaît cent fois mieux que moi et l'esprit, et les ressorts; je vous en demande excuse, mon cher prince, et ne vous prie de l'attribuer qu'à l'amitié et à l'intérêt que je prends à tout ce qui vous regarde, étant avec une parfaite estime, etc.

<119>

13. AU MÊME.

Le 30 mars 1769.



Monsieur mon cousin,

Je me préparais à féliciter Votre Altesse sur les bonnes nouvelles que j'espérais recevoir de la Haye; je suis bien affligé d'en venir aux condoléances.2_119-a Toutefois, pourvu que ma nièce conserve la vie et la santé, je me flatte que dans peu elle pourra réparer le malheur qui vient d'arriver, et je crois que, à la première fois qu'elle sera enceinte, on pourra prévenir un pareil malheur en lui faisant prendre moins de nourriture, pour que l'enfant ne soit pas trop grand et trop gros. Je hasarde cette idée, et la soumets au jugement de vos médecins, qui doivent en savoir davantage sur ce sujet; mais je crois, mon cher prince, qu'à la première fois on pourra prendre de si bonnes mesures, qu'un pareil cas n'arrive plus. L'intérêt sincère que je prends à tout ce qui vous regarde me fait désirer que vous ayez une nombreuse postérité, et que tout réussisse selon vos souhaits, étant avec le plus tendre attachement, etc.

14. AU MÊME.

Le 3 avril 1769.



Monsieur mon cousin,

Je prends comme une véritable marque de votre amitié les nouvelles, mon cher prince, que vous me donnez de l'état de ma nièce. Je ne<120> vous nierai pas que j'ai été dans de grandes inquiétudes pour elle, et je vous ai l'obligation de m'en avoir tiré. Le ciel soit loué qu'elle nous est rendue! Cette malheureuse couche me fait souvenir qu'autrefois madame votre mère se trouva trois fois de suite dans le même cas, et que, étant grosse la quatrième fois, se trouvant alors en Frise, les douleurs de l'enfantement la prirent. Elle fut obligée de recourir à l'assistance d'une paysanne, qui l'accoucha heureusement de la princesse de Weilbourg d'à présent.2_120-a Si cette femme vit encore, je ne crois pas qu'on ferait mal, à la première occasion, de l'employer. Je crois aussi que ma nièce sera obligée de se ménager davantage lorsqu'elle redeviendra grosse, mangeant plus sobrement, et prenant le plus d'exercice qu'elle pourra. Le tendre intérêt que je prends, mon cher prince, à tout ce qui vous regarde me fait hasarder des réflexions sur un sujet aussi intéressant que celui de l'augmentation de votre maison, quoique je ne sois pas grand grec en ces sortes de connaissances. J'ai été charmé d'apprendre l'intérêt que le peuple a pris au malheur domestique qui vient de vous arriver, ce qui prouve bien que les princes, pourvu qu'ils soient bons, seront toujours aimés. Je suis avec le plus tendre attachement, etc.

Je vous prie d'assurer l'accouchée de ma plus tendre amitié.

<121>

15. AU MÊME.

Le 6 avril 1769.



Monsieur mon cousin,

Je ne saurais assez remercier Votre Altesse de l'attention qu'elle veut bien avoir de m'informer de la santé de son épouse. Sans doute que personne ne s'y intéresse plus que moi. Je suis ravi de la savoir hors de tout danger, et je me flatte qu'elle réparera avec usure la perte qui vient de se faire; et je me flatte, mon cher prince, que tout tournera à votre satisfaction et à votre contentement, vous assurant que j'y prends une part plus particulière que personne, étant avec tous les sentiments de tendresse et d'estime, etc.

16. AU MÊME.

Le 9 avril 1769.



Monsieur mon cousin,

Je vous embrasse de tout mon cœur, mon cher prince, des bonnes nouvelles que vous avez la bonté de me donner de ma chère nièce. Je bénis le ciel que ce danger se soit si heureusement passé; mais je crois que, pour l'avenir, avec un peu de précaution on pourra prévenir que pareil malheur n'arrive. Il faudra que ma nièce se ménage beaucoup, pour ne pas trop nourrir le fruit qu'elle portera; il faudra qu'elle prenne plus d'exercice, surtout sur la fin de sa grossesse, et je crois encore que, sans tant raffiner sur l'art des sages-femmes, une bonne paysanne de la Frise lui serait plus avantageuse que ces cé<122>lèbres sages-femmes. Toutefois il faudrait un bon chirurgien en réserve, en cas d'accident étrange. Je vous dis, mon cher prince, tout naturellement ce que je pense, parce que je m'intéresse on ne saurait davantage à ce qui vous concerne, ainsi que ma nièce. Je vous prie d'y faire quelques réflexions; et quant à ce qui regarde le régime de ma nièce, je me flatte qu'elle sera assez raisonnable pour faire ce petit effort pendant sa grossesse, afin de mettre des enfants bien conditionnés au monde. Voilà ce qu'il vous faut à tous deux, et qui vous sera du plus grand avantage pour vos intérêts et pour fixer la succession. Combien d'intrigues cesseront alors! Combien de sourdes pratiques détruites! Enfin, mon cher prince, c'est votre bien qui me fait parler, et qui m'engage dans ce détail, quoique étranger à mes occupations. Mais rien ne l'est lorsqu'il s'agit de vous donner des marques du tendre attachement avec lequel je suis, etc.

17. AU MÊME.

Le 12 avril 1769.



Monsieur mon cousin,

J'ai toutes les obligations possibles à Votre Altesse des bonnes nouvelles qu'elle me donne de ma chère nièce. S'il plaît à Dieu, il n'y a plus rien à craindre pour cette fois. A la première occasion, cela sera à recommencer, et je crois que, avec quelques sages précautions prises à temps, l'accouchement pourra se passer fort heureusement. Je vous embrasse de tout mon cœur, mon cher prince, ainsi que votre épouse, vous assurant de toute l'étendue de l'estime et de la considération avec laquelle je suis, etc.

<123>

18. AU MÊME.

Le 23 avril 1769.



Monsieur mon cousin,

Je suis charmé que Votre Altesse trouve tant de prudence à ma nièce; c'est un caractère qui l'a toujours distinguée des personnes de son âge. Je suis persuadé que c'est l'inexpérience qui l'a peut-être trop livrée à son appétit les derniers temps de sa grossesse. Les femmes prétendent que ces temps méritent les plus grands ménagements. Je ne juge pas en connaisseur de ces choses : mais je croirais manquer au tendre attachement que je vous ai voué, si je négligeais de vous rendre compte du sentiment de femmes d'expérience, et qui sont routinées dans un métier où ma nièce n'est qu'à peine sortie du noviciat. Je souhaite de tout mon cœur qu'elle se remette bientôt, pour réaliser une autre fois les espérances que V. A. a perdues pour cette fois, personne ne participant plus que je le fais à tout ce qui vous regarde. Ce sont les sentiments avec lesquels je suis, etc.

19. AU MÊME.

Neisse, 23 août 1769.



Monsieur mon cousin et neveu,

Il suffit que Votre Altesse croie qu'il peut être utile à ses intérêts et à ceux de la république que M. van der Hoop assiste à nos manœuvres, pour qu'il n'appréhende point d'être refusé. Il est ici, et assistera à tous les camps et manœuvres qu'il voudra voir. Vous savez, mon<124> cher prince, combien votre personne et vos intérêts me sont chers, et vous pouvez compter qu'il ne tiendra jamais à moi de vous être utile en tant que s'étend la sphère de mon activité. Nous attendons l'Empereur le 25,2_124-a ce qui m'oblige à faire toutes sortes de préparatifs et à prendre tout plein d'arrangements pour le recevoir sur le pied qu'il a prescrit. C'est ce qui m'empêche aujourd'hui de m'étendre davantage, et ce qui me borne à vous assurer de la parfaite estime et de la sincère tendresse avec laquelle je suis, etc.

20. AU MÊME.

Le 10 septembre 1769.



Monsieur mon cousin,

Depuis la réception de la lettre de Votre Altesse, M. van der Hoop a été de toutes nos tournées militaires; il a assisté à l'entrevue de l'Empereur, et veut encore s'arrêter ici quelques jours, pour voir encore des mouvements de troupes. Je félicite V. A. d'avoir vu ce Paoli2_124-b si fameux, et qui a soutenu si longtemps en bon citoyen les droits et la liberté de sa patrie. Les Français sont bien lâches d'inviter d'autres puissances à opprimer un peuple qu'ils ont subjugué. Ils ne se sont point adressés à moi pour ce sujet, sans doute parce que mes barques de rivière ne me donnent aucune prétention à l'empire de la mer. Je m'en rapporte à M. Thulemeier2_124-c pour les nouvelles<125> qui nous viennent de Pologne, et qu'il vous rendra fidèlement. Vous verrez, mon cher prince, il y a bien à rabattre des triomphes imaginaires que les Français annonçaient des Turcs. Je me borne, en finissant cette lettre, d'assurer V. A. de l'estime infinie et de la considération avec laquelle je suis, etc.

21. AU MÊME.

Le 6 novembre 1769.



Monsieur mon cousin,

Je suis très-obligé à Votre Altesse de la part qu'elle prend à l'augmentation de notre famille.2_125-a Je n'ai pas douté, connaissant ses sentiments, de ce qu'elle ne se fût réjouie de tout ce qui contribue au bonheur de notre famille. J'aurais sans doute désiré beaucoup de pouvoir la revoir et l'embrasser, ainsi que ma chère nièce, et je m'en remets, mon cher prince, aux raisons que vous pouvez avoir relativement à la république pour choisir, quand vous le jugerez à propos, un moment convenable pour me procurer cette douce satisfaction. Je suis avec tous les sentiments d'estime et d'amitié, etc.

<126>

22. AU MÊME.

Le 17 décembre 1769.



Monsieur mon cousin,

Votre Altesse comprendra, sans que je le lui marque, combien je suis alarmé de la nouvelle qu'elle vient de me communiquer; je crains que ma nièce ne soit menacée d'une forte ébullition de sang, ou, ce que le ciel préserve! d'une fièvre pourprée. Ce sont ces assoupissements qui désignent qu'une matière acre et tenace engourdit les nerfs, qu'on n'en peut détacher que par des transpirations fortes, ou, si quelque pourpre s'en mêlait, il n'y aurait que l'usage réitéré du quinquina et des toniques qui pourrait la sauver. Je fais mille vœux pour sa conservation, de même que pour la vôtre, mon cher prince, en vous assurant de la parfaite estime et de tous les sentiments avec lesquels je suis, etc.

23. AU MÊME.

Le 21 décembre 1769.



Monsieur mon cousin,

J'avoue à Votre Altesse que la nouvelle de ma nièce qu'elle me mande m'a étrangement frappé. J'ai été dans la ferme persuasion que ma nièce avait déjà eu la petite vérole, et que par conséquent cette funeste maladie n'était plus à craindre pour elle. Ce qui fait une plus forte impression sur mon esprit, c'est que son frère en est mort,2_126-a et qu'en vérité le plus habile médecin ne peut donner des espérances,<127> dans cette affreuse maladie, que lorsque la fièvre de suppuration est passée. Je vous avoue, mon cher prince, que, aimant ma nièce comme si c'était ma fille unique, je suis dans d'étranges inquiétudes sur son sujet, dont je ne pourrai être tiré que dans huit jours. Je ne puis faire que des vœux, c'est où se borne toute l'assistance qu'elle peut tirer de moi; mais ces vœux sont bien ardents et bien sincères. Je vous remercie, mon cher prince, de la peine que vous vous donnez de m'informer de ces tristes circonstances; cela redouble, s'il se peut, la tendresse, l'estime et l'attachement avec lequel je suis, etc.

24. AU MÊME.

Le 25 décembre 1769.



Monsieur mon cousin,

Rien ne peut me consoler davantage que les bonnes nouvelles que V. A. me donne de ma chère nièce. Je commence à bien espérer et à me flatter que son tempérament surmontera l'âpreté de la maladie. J'avoue que, après toutes les assurances qu'on m'avait données qu'elle avait déjà eu cette maladie, j'ai été extrêmement frappé en apprenant qu'elle en était atteinte; mais enfin, pourvu qu'elle en réchappe, j'oublierai de bon cœur mes inquiétudes et mes angoisses, le principal étant de la conserver. C'est l'unique chagrin de sa vie qu'elle m'a donné, et c'est certainement bien malgré elle. Je souhaite, mon cher prince, que, tout ceci passé, rien dorénavant ne trouble votre repos ni votre contentement, personne ne s'y intéressant davantage que je le fais, étant avec autant d'estime que de tendresse, etc.

<128>

25. AU MÊME.

Le 29 décembre 1769.



Monsieur mon cousin,

Je vous dois bien des obligations, mon cher prince, des nouvelles que vous me donnez de ma pauvre nièce. Je commence à espérer bien à présent, et comme aucun mauvais symptôme n'a paru, je me flatte, pour cette fois, que nous la conserverons encore. Puissent toutes les bénédictions célestes vous combler tous les deux de tout ce que vos cœurs désirent, et puissiez-vous être aussi heureux que je souhaite que vous le soyez du fond de mon âme! Je suis avec la plus haute estime, etc.

26. AU MÊME.

Le 31 décembre 1769.



Monsieur mon cousin,

Enfin, le ciel soit loué! vous nous tirez, mon cher prince, des inquiétudes et des angoisses où nous mettait l'incertitude de la situation de ma chère nièce. Je vous remercie mille fois des obligeantes attentions que vous avez eues de me donner si souvent des nouvelles de sa santé et de sa maladie. Veuille le ciel que ce soit la dernière crainte qu'elle nous donne, et qu'elle se conserve en santé une longue suite d'années! Ces mêmes vœux s'étendent, mon cher prince, sur votre personne, et je souhaite que, dans l'année où nous allons entrer, vous jouissiez de toutes les prospérités dont la Providence puisse combler<129> les hommes. Je vous remercie de la part que vous prenez à la grossesse de ma nièce de Prusse,2_129-a et je vous prie d'être persuadé de l'estime infinie avec laquelle je suis à jamais, etc.

27. AU MÊME.

Le 1er janvier 1770.



Monsieur mon cousin,

Je remercie Votre Altesse et pour les bonnes nouvelles qu'elle me mande de ma nièce, et pour ce qu'elle a la bonté de me dire pour la nouvelle année. Je vous assure, mon cher prince, qu'on ne saurait plus s'intéresser que je le fais à votre bonheur et à celui de votre épouse. Je souhaite qu'il soit parfait, et que vous en jouissiez pendant une longue suite d'années sans inquiétude et sans traverses, vous priant de me croire avec une estime et une tendresse infinie, etc.

28. AU MÊME.

Le 8 janvier 1770.



Monsieur mon cousin,

Je suis bien obligé à Votre Altesse des bonnes nouvelles qu'elle me donne encore de ma nièce. J'ai bien cru qu'on lui interdirait encore<130> l'écriture par rapport à l'affaiblissement de ses yeux, et j'aime mieux recevoir de ses lettres plus tard par ménagement pour sa santé. Je suis avec toute l'estime et l'amitié possible, etc.

Je vous prie d'assurer ma chère nièce de ma plus tendre amitié.

29. AU MÊME.

Le 15 janvier 1770.



Monsieur mon cousin,

Je vous félicite, mon cher prince, et je me félicite moi-même d'être enfin à l'abri des inquiétudes et des angoisses où nous avait jetés2_130-a l'affreuse maladie de votre épouse. J'espère que dorénavant elle n'aura plus d'autre incommodité que de celles qui se guérissent au bout de neuf mois. Je prendrai une part sincère à tout ce qui pourra contribuer à l'avantage de votre famille et au contentement de votre personne, étant avec toute l'estime possible, etc.

<131>

30. AU MÊME.

Le 22 janvier 1770.



Monsieur mon cousin,

Je remercie infiniment Votre Altesse de la part qu'elle prend à mon vieux jour de naissance. Il a donné la vie à une personne qui vous aime bien cordialement, et qui prend un intérêt bien vif atout ce qui vous regarde. Je suis d'ailleurs charmé d'apprendre, par les lettres mêmes de ma nièce, l'entière conviction de sa convalescence, en vous assurant, mon cher prince, de la tendresse et de l'estime infinie avec laquelle je suis, etc.

31. AU MÊME.

(Août 1770.)



Monsieur mon cousin,

Je remercie Votre Altesse de la part qu'elle prend à la naissance de mon arrière-neveu.2_131-a Je souhaite de pouvoir vous féliciter bientôt de même sur la naissance d'un fils, prenant toute la part possible à ce qui vous regarde. J'ai été bien aise de pouvoir vous être de quelque utilité dans les différends que la république a eus avec l'Électeur palatin, me faisant un plaisir, dans toutes les occasions, de vous donner des marques de l'estime et de l'amitié parfaite avec laquelle je suis, etc.

<132>

32. AU MÊME.

Le 24 septembre (1770).



Monsieur mon cousin,

Si j'ai tardé de répondre à Votre Altesse, c'est que je n'ai point voulu l'importuner, et que j'ai attendu le retour du prince de Hesse2_132-a pour le prier de se charger de ma lettre. J'ai été charmé de trouver quelques occasions, mon cher prince, où je pouvais vous obliger, et j'en ai profité avec l'empressement que l'on éprouve à faire plaisir aux personnes qu'on estime. J'espère que ce ne seront pas les dernières occasions qui se présenteront; toutefois pouvez-vous être persuadé que je n'en laisserai échapper aucune pour vous prouver combien je suis avec estime et tendresse, etc.

33. AU MÊME.

Le 5 décembre 1770.



Monsieur mon cousin,

Votre Altesse ne pouvait me donner une plus agréable nouvelle que celle que je viens de recevoir.2_132-b Je bénis le ciel que tout s'est si bien passé, et je crois, comme les vieilles femmes, que les garçons courent après les filles, et qu'ainsi cette couche de ma nièce en sera suivie par<133> une autre, qui sera d'un mâle. Je félicite V. A. sur ce commencement de postérité, et je m'intéresse, mon cher prince, à tout ce qui peut faire le bonheur de vos jours, étant avec toute l'estime et l'attachement, etc.

34. AU MÊME.

Le 10 décembre 1770.



Monsieur mon cousin,

Vous pouvez bien juger, mon cher prince, combien je participe à votre joie et contentement de l'heureuse délivrance de votre épouse. J'avais écrit par M. de Heyden2_133-a pour vous en marquer ma satisfaction; mais comme il se trouve encore arrêté ici, je suppose qu'il sera devancé par cette lettre. Je souhaite que les affaires de votre famille, de même que tout ce qui vous intéresse, aillent en s'accroissant et vous comblent de prospérités, étant avec toute l'estime imaginable, etc.

<134>

35. AU MÊME.

Le 17 décembre 1770.



Monsieur mon cousin,

Je vous suis très-obligé des bonnes espérances que vous me donnez du prompt rétablissement de ma chère nièce. Je me flatte qu'à présent elle sera plus aguerrie à ce métier, et qu'elle vous donnera, mon cher prince, une nombreuse postérité. Il n'y a que les commencements qui coûtent, et ceux-là sont, Dieu merci, passés. Je suis avec toute l'estime et la tendresse possible, etc.

36. AU MÊME.

Le 20 décembre 1770.



Monsieur mon cousin,

Je suis extrêmement obligé à Votre Altesse des bonnes nouvelles qu'elle me donne encore; j'espère que vous n'aurez, mon cher prince, que de la joie et du contentement de l'accroissement de votre famille, et qu'elle se multipliera comme les sables de la mer.2_134-a Ma nièce m'a mandé aujourd'hui elle-même la joie qu'elle a de se trouver mère de famille, et la bonne santé dont elle jouit. Puissiez-vous ainsi jouir tous deux de toutes les prospérités que la fortune peut accumuler sur la tête des hommes, personne n'y prenant plus de part que moi, étant avec toute l'estime et la tendresse, etc.

<135>

37. AU MÊME.

Le 31 décembre 1770. Monsieur mon cousin,

Je remercie Votre Altesse de ce que, à l'occasion de la nouvelle année, elle veut bien se souvenir de moi. Je l'assure qu'il n'est point de vœux plus sincères que les miens pour sa conservation et pour tout ce qui regarde sa prospérité. Vous me trouverez toujours le même, mon cher prince, dans toutes les occasions qui se présenteront où je puis vous être de quelque utilité. L'affaire du prince de Nassau n'est qu'une bagatelle; mais il se présente une occasion actuellement où je compte de vous être plus utile, et je vous ferai avertir de tout ce que j'aurai fait, mais sous le sceau du secret et à condition même que les hauts et puissants seigneurs n'en soient aucunement informés. Je suis avec autant de tendresse que d'estime, etc.

38. AU MÊME.

Berlin, 17 janvier 1771.



Monsieur mon neveu,

C'est avec un plaisir bien sensible que j'ai appris, tant par votre lettre du 11 de ce mois que par les dernières dépêches de mon envoyé de Thulemeier, la manière affectueuse dont vous avez accueilli ma dernière confidence. Si je n'avais pas gagné un gros rhume, je me ferais un devoir bien agréable de le faire connaître de ma propre main à V. A. S., et je l'assurerais de nouveau de cet empressement vif<136> et sincère avec lequel je saisirai toutes les occasions qui se présenteront pour lui rendre des services agréables. Ces sentiments, cependant, pour lui être renouvelés par une plume étrangère, ne sont pour cela pas moins sincères. Un cœur qui lui est entièrement attaché en est la source et le garant, et personne ne saurait être plus parfaitement, etc.

39. AU MÊME.

Le 24 janvier (1771).



Monsieur mon cousin,

Je reçois avec bien de la reconnaissance la lettre pleine de la part que vous daignez prendre à ce qui me regarde, et je vous assure que ma façon de penser envers vous, mes sentiments et l'attachement pour votre personne, mon cher prince, sont parfaitement réciproques. Il ne me manque que les occasions pour vous en donner plus fréquemment des marques, et si mon existence est bonne à quelque chose, elle le sera en vous conservant un ami qui, mon cher prince, vous témoignera en toute occasion l'estime et la tendresse avec laquelle il est, etc.

<137>

40. AU MÊME.

Ce 27 (1772).



Monsieur mon cousin,

Je félicite Votre Altesse de tout mon cœur de la grossesse de ma nièce.2_137-a Je fais des vœux pour que ses couches soient heureuses, et je crains que si on ne la saigne pas à moitié terme, l'enfant, trop bien nourri et trop robuste, ne cause une scène pareille à celle que ma nièce a éprouvée à ses premières couches. Je crois que c'est une chose à laquelle les médecins devraient penser plus sérieusement qu'ils ne font, car une même récidive vous serait aussi fâcheuse, mon cher prince, que cruelle pour tous ceux qui, comme moi, s'intéressent sincèrement au bien et à la conservation de ma nièce. J'embrasse toutes les occasions qui se présentent pour vous donner des preuves de ma tendre amitié. Mes vœux sont remplis si je puis vous être de quelque utilité, vous assurant, mon cher prince, que personne ne s'intéresse plus à votre prospérité, ni ne vous aime plus tendrement que, etc.

<138><139>

X. LETTRE DE LA PRINCESSE WILHELMINE D'ORANGE A FRÉDÉRIC. (23 JUILLET 1769.)[Titelblatt]

<140><141>

DE LA PRINCESSE WILHELMINE D'ORANGE.

Loo, 23 juillet 1769.



Sire,

La gracieuse lettre de Votre Majesté m'a causé la joie la plus vive. On nous avait donné des inquiétudes sur sa précieuse santé; mais comme mon cher oncle m'a fait l'honneur de m'écrire, nos inquiétudes n'ont, Dieu merci, pas duré longtemps. Toutes les lettres que je reçois de Berlin me disent du bien de ma nouvelle belle-sœur; ainsi j'espère que ce mariage sera plus heureux, et ne donnera pas de chagrins à V. M. La gracieuse permission que mon cher oncle m'accorde d'oser lui écrire quand je verrais la possibilité de pouvoir faire un voyage dans ma patrie me comble de joie, et je profiterai sûrement de cette faveur aussitôt que cela se pourra. Le prince Ferdinand de Brunswic est ici depuis lundi, et il part ce soir; il a passé déjà quinze jours à la Haye. Son arrivée a été une surprise pour tout le monde, et même son frère ne l'a apprise que la veille qu'il est venu à la Haye. Nous avons hier représenté la tragédie de Mithridate; j'ai fait le rôle de Monime, le prince celui de Mithridate.2_141-a Les dames et les messieurs ont joué pour petite pièce l'Impromptu de campagne.2_141-b On dit que l'Électeur palatin viendra à la Haye incognito, mais j'ignore si cette nouvelle est fondée. V. M. me fait l'honneur de me<142> dire dans sa lettre que la princesse Charlotte de Lorraine2_142-a avait été fort belle et aimable. Pour ce qui regarde la beauté, elle n'en a pas conservé beaucoup de restes; dans le Brabant elle passe pour fort haute, et on ne l'aime pas beaucoup; vis-à-vis de nous elle a été très-polie, mais du reste j'avoue qu'elle ne me paraît guère amusante. Son frère est plus aimé; il paraît être un bon homme.

C'est avec l'attachement le plus tendre et le plus respectueux que j'ai l'honneur d'être,



Sire,

de Votre Majesté
la très-humble et très-obéissante
nièce et servante,
Wilhelmine.

Le prince se met aux pieds de V. M.

<143>

XI. LETTRES DE FRÉDÉRIC AU PRINCE GUILLAUME IV D'ORANGE. (12 JANVIER 1735 ET 27 MARS 1740.)[Titelblatt]

<144><145>

1. AU PRINCE GUILLAUME IV D'ORANGE.

Berlin, 12 janvier 1735.



Monsieur mon cousin,

Jamais je n'ai tant eu d'obligation au changement d'année que je lui en ai pour cette fois, me procurant le plaisir de recevoir de vos lettres, mon cher prince, dans un temps où je craignais le plus d'être effacé de votre souvenir. Je vous suis infiniment redevable des vœux que vous faites pour ma personne, et je puis vous assurer en revanche que ceux que je fais pour la vôtre sont aussi réciproques que sincères, car il n'y a qu'à vous avoir vu pour vous aimer, et à vous connaître pour ne pouvoir vous refuser une entière estime. Ce sont des choses que j'ai apprises par expérience, et des sentiments dont je ne changerai de ma vie sur votre sujet. Il ne me reste qu'à vous faire mes remercîments, et à vous témoigner ma gratitude des soins que vous vous êtes donnés, tant pour donner de l'emploi au jeune Knobelsdorff que pour obtenir la détention2_145-a du pauvre Osten. Ce sont deux actions où vous avez fait également paraître votre naturel généreux et compatissant, et l'amitié que vous avez pour moi. Je ne me contente pas de vous dire que je me ferai un plaisir de vous être<146> utile à mon tour, mais je me réserve de vous prouver par les effets comme je suis avec une estime toute particulière,



Monsieur mon cousin,

Votre parfaitement affectionné
ami et cousin,
Frederic.

2. AU MÊME.

Berlin, 27 mars 1740.



Mon cher prince,

Vous entrez aussi bien dans ma situation que j'entre dans la vôtre. Ce sont ici chagrins domestiques, ce sont chez vous dissensions intestines, avec cette différence que mes désagréments finiront d'une ou d'autre manière, et que la léthargie de vos flegmatiques seigneurs et maîtres pourrait bien finir par une apoplexie causée par la politique du cardinal. Je plains les Hollandais de leur aveuglement, et il est bien honteux de dire que les petits-fils de ces héros de la liberté qui secouèrent généreusement le joug de l'esclavage espagnol ont si fort dégénéré, qu'ils rampent actuellement sous la naissante monarchie française. Ce serait à vous de réveiller dans leur Vergadering2_146-a ces pilotes assoupis auprès de la boussole et du gouvernail. Il faut remuer tous les ressorts de la politique dans les grands dangers, et prévenir par une résolution vigoureuse la perte totale que l'on prévoit et les malheurs qu'il est encore temps d'empêcher. Faites retentir<147> la voix de la liberté; alarmez l'intérêt prêt à faire naufrage; représentez aux négociants leur prochaine banqueroute, leur commerce enlevé par les Espagnols et les Français, et par conséquent le bouleversement inévitable de toute la Hollande. Mais ce n'est point à moi de vous donner des conseils dans des choses où vous en savez tout autant et plus que moi. Je me contente de faire des vœux pour vous en particulier, et pour votre république en général. Soyez persuadé, mon cher prince, que je prends une part sincère à ce qui vous regarde, et que je me ferai toujours un sensible plaisir de vous prouver l'estime avec laquelle je suis à jamais, etc.

<148><149>

XII. CORRESPONDANCE DE FRÉDÉRIC AVEC LA LANDGRAVE CAROLINE DE HESSE-DARMSTADT. (30 OCTOBRE 1757 - 27 MARS 1774.)[Titelblatt]

<150><151>

1. DE LA LANDGRAVE DE HESSE-DARMSTADT.

Berlin, 30 octobre 1757.



Sire,

Il y a de la témérité d'oser écrire à Votre Majesté, je le sens; j'ai hésité longtemps, mais mon attachement l'emporte. Recevez, Sire, avec bonté et indulgence le premier et peut-être le dernier hommage que je prends la liberté de vous offrir. Je pars, parce que la démarche que le prince de Darmstadt a faite2_151-a l'exige ainsi; mais je quitte avec mille regrets les États de V. M. Pénétrée de respect et de vénération pour le héros et le grand homme, mon zèle m'accompagnera partout, et je ne serai occupée qu'à faire des vœux pour la conservation de V. M. et pour le succès de ses armes. J'ai l'honneur d'être avec le plus profond respect,



Sire,

de Votre Majesté
la très-humble et très-obéissante servante,
Caroline de Hesse,
née des Deux-Ponts.

<152>

2. A LA LANDGRAVE DE HESSE-DARMSTADT.

Potsdam, 2 avril 1767.



Madame ma cousine,

La lettre tout à fait obligeante de Votre Altesse, par laquelle elle me fait la proposition de faire entrer à mon service son neveu le prince de Waldeck, m'a été d'autant plus agréable, qu'elle m'est une marque bien sensible de son souvenir; et je serai véritablement charmé, madame, de me prêter là-dessus à vos vues, pourvu que le susdit prince déclare par revers que, dans le cas que la cour impériale vînt un jour à publier des avocatoires, il n'en resterait pour cela pas moins attaché à mon service. Il ne s'agira donc là-dessus que de ce préliminaire, après la conclusion duquel je me ferai un vrai plaisir d'accueillir le prince votre neveu à mon service et de l'y placer convenablement, ne souhaitant d'ailleurs que de trouver des occasions sans nombre où je puisse prouver à V. A. les sentiments d'estime et de la parfaite amitié avec lesquels je suis, madame ma cousine, etc.

3. DE LA LANDGRAVE DE HESSE-DARMSTADT.

Darmstadt, 4 juin 1769.



Sire,

Je suis touchée et pénétrée de la plus respectueuse reconnaissance de la faveur dont V. M. me comble, et ma famille, par le choix qu'elle<153> a daigné faire de ma fille Frédérique pour épouse de S. A. R. M. le Prince de Prusse. Élevée dans les mêmes sentiments qui m'animent pour V. M., j'ai lieu d'espérer que ma fille se rendra digne de votre protection, Sire, et de vos bonnes grâces. J'ose réclamer dès à présent l'indulgence de V. M. pour des fautes que l'inexpérience et le manque d'usage peuvent faire commettre à une jeune personne qui n'a jamais vécu dans le grand monde. Le colonel comte de Bohlen2_153-a m'a dit, par ordre de V. M., qu'elle désirait que j'accompagne ma fille. Vos volontés, Sire, feront toujours ma loi; je ne doute pas du consentement du Landgrave, dès que V. M. croit ma présence de quelque utilité à ma fille. Combien de raisons, d'ailleurs, qui me font désirer ce voyage! Je ne m'étendrai point sur mon attachement pour V. M.; il n'a jamais varié. Vous désirez, Sire, que je hâte les apprêts pour le départ de ma fille; je vous supplie d'être persuadé que je ferai l'impossible pour qu'elle soit rendue à Charlottenbourg vers le temps que V. M. l'ordonne. Qu'elle se rende digne de vos bontés, Sire, et je serai la mère du monde la plus heureuse. Je supplie V. M. de m'accorder la continuation de sa bienveillance, en faveur de mes sentiments pleins de vénération, de respect, et de mon attachement le plus inviolable. Je suis, Sire, etc.

<154>

4. A LA LANDGRAVE DE HESSE-DARMSTADT.

Le 12 juin 1769.



Madame ma cousine,

Je vous avoue franchement, ma chère landgrave, que l'impression du mérite de la mère a entièrement influé sur le choix que nous avons fait de la princesse votre fille. Je vous remercie sincèrement du plaisir que vous voulez me faire de conduire vous-même la promise ici. J'ose croire que cela était nécessaire et utile pour une jeune personne qui, tombant dans un pays nouveau pour elle, aurait besoin d'être guidée par une princesse de votre expérience. Il est d'ailleurs, madame, tout plein de choses que l'on peut se dire, et qui ne doivent point être confiées au papier, dont je pourrai vous entretenir. Si vous voulez bien, outre ces raisons, que j'en allègue une non moins forte, c'est, madame, la satisfaction que je sens de voir une princesse pour laquelle j'ai été pénétré en tout temps de la plus haute estime, et de laquelle je ne cesserai d'être, madame ma cousine, etc.

5. A LA MÊME.

(26 juillet 1769.)



Madame ma cousine,

Je sens toute l'incongruité de mon entreprise; je suis très-persuadé qu'il n'y a rien de plus ridicule qu'un vieillard blanchi sous le harnois et chargé d'années, qui conçoit l'idée d'envoyer son portrait à une grande princesse. Ce procédé serait inexcusable, si l'on ne<155> m'avait assuré que cette grande princesse voulait avoir le portrait de ce vieillard. Je vous l'offre donc, madame, tel qu'il est. S'il savait s'exprimer, il vous dirait combien l'original vous estime et vous respecte; plus hardi ou téméraire que je ne suis, il ajouterait une infinité de choses que je supprime pour ménager, madame, l'extrême modestie dont vous faites profession. Puisse cette faible représentation de ma décrépitude vous faire souvenir d'un homme qui connaît tout le prix de votre amitié, et qui se fait un devoir de la mériter! Puissiez-vous accepter le tout avec indulgence, et ne point douter des sentiments distingués et de la considération infinie avec laquelle je suis, etc.

6. DE LA LANDGRAVE DE HESSE-DARMSTADT.

(26 juillet 1769.)



Sire,

Votre Majesté recevra-t-elle avec bonté mes remercîments très-humbles pour le magnifique présent qu'on vient de me remettre de sa part, et pour la lettre dont il a été accompagné, qui me le rend d'un prix inestimable? Rien au monde n'aurait pu me faire plus de plaisir que le portrait du plus grand des humains. Je ne me plains, Sire, que de la richesse de l'entourage; je n'ambitionnais que le portrait. Il me rappellera sans cesse l'original que je respecte et, j'ose ajouter, que j'adore. Oui, Sire, comblée de vos bontés, j'en sens tout le prix, et je regarde comme le temps le plus heureux de ma vie ces jours-ci, où j'ai eu le bonheur de vous voir et de vous entendre. J'emporterai avec moi le souvenir de ces mêmes bontés; rien<156> ne les effacera jamais de ma mémoire. Je supplie V. M. de rendre justice aux sentiments de vénération et de respect et à l'attachement absolu que je lui ai voués pour la vie. Je suis, Sire, etc.

7. A LA LANDGRAVE DE HESSE-DARMSTADT.

Le 10 juin 1770.



Madame ma cousine,

Je n'entre point dans les secrets de la Princesse de Prusse; Votre Altesse me fait des remercîments que je ne mérite pas. Je n'en conviens pas moins, madame, que votre présence est impayable pour ceux qui ont le bonheur d'en jouir. Je me réjouis sincèrement de votre arrivée, et je puis vous assurer, madame, que jusqu'ici la princesse votre fille se porte à merveille, et qu'il ne s'agit plus que de bien terminer le dernier acte de la scène, auquel je me flatte que votre présence mettra le comble. Je suis avec toute l'estime imaginable, madame ma cousine, etc.

8. A LA MÊME.

(Sans-Souci, 13 juin 1770.)



Madame ma cousine,

Je suis charmé, ma chère landgrave, de vous savoir arrivée en bonne santé, et j'ose vous prier d'honorer, ce midi, ma vigne de votre pré<157>sence. J'aurai le plaisir de pouvoir vous entretenir moi-même, et de prévoir avec vous ce que d'heureux destins vous annoncent. Vous priant de me croire avec autant d'attachement que de considération, madame ma cousine, etc.

9. A LA MÊME.

(3 août 1770.)



Ma chère grand' maman,

Je vous ai tant d'obligation du jour que je vois, que je ne puis m'empêcher de vous en témoigner ma reconnaissance. Voici ce que je vous ai apporté de je ne sais d'où je viens; conservez-le, je vous prie, ma bonne maman-grand, pour vous ressouvenir de moi. Quand je pourrai parler, je vous en dirai davantage.

Le nouveau venu.2_157-a

<158>

10. A LA MÊME.

(11 août 1770.)



Madame ma cousine,

Si je n'avais été accablé d'affaires aujourd'hui, je m'étais proposé, madame, de vous prier à dîner; mais quelqu'un me fit apercevoir de mon indiscrétion, en remarquant qu'une mère, sur le point de quitter sa fille, préfère sa société à toute autre. Je me suis rendu, madame, à cette raison; je l'ai trouvée si vraie, que j'ai cru devoir sacrifier mon agrément à votre tendresse. Je vous ai les plus grandes obligations; vous êtes venue assister la Princesse de Prusse dans ses couches, et souffrez que j'attribue, comme de raison, à votre courage et à votre résolution le salut de la mère et de son fils. Ce sont des droits, madame, que le temps ne saurait effacer de mon souvenir. Mais qu'importe le souvenir d'un vieillard qui doit d'un jour à l'autre disparaître de la face de la terre? Je vous renvoie, madame, le billet que je viens de recevoir, coté selon votre intention, en vous assurant que personne n'est plus pénétré de vos admirables qualités, ne vous aime plus et ne vous estime plus que, madame ma cousine, etc.

11. A LA MÊME.

Le 5 décembre 1770.



Madame ma cousine,

Rien ne m'a fait plus de plaisir, madame, que les marques de souvenir que vous me donnez. Vous avez la bonté de penser à moi, à l'oc<159>casion d'un célèbre maître de ballets de Mannheim. J'ai vu de ces ballets de Noverre en Moravie;2_159-a ils sont beaux et préférables en tout aux anciens; mais ils exigent une grande dépense par le nombre de figurants et d'habits qu'ils demandent, et, pendant sept années consécutives, les Autrichiens, Russes et Français nous ont fait tant danser, que nous avons un peu perdu le goût de la danse théâtrale, ou du moins que nous en bornons la dépense. Ce sont les raisons, madame, qui nous bornent à ce que nous avons; ni plus ni moins, je vous ai autant d'obligation, madame, que si de vos bontés je tenais les plus beaux ballets de l'univers. Il me suffit de votre intention, à laquelle je réponds par une estime parfaite et l'attachement avec lequel je suis, madame ma cousine, etc.

12. A LA MÊME.

Potsdam, 7 mai 1772.



Madame ma cousine,

Il se présente une occasion favorable, madame, pour l'établissement d'une des princesses vos filles. J'ai cru, comme de raison, qu'avant tout il fallait consulter sur cet article la volonté d'une mère respectable. Il ne s'agit pas, madame, d'une bagatelle, mais de placer, ou non, une de vos filles sur le trône de Russie. La chose est très-faisable. J'avoue que ces grandes fortunes sont toujours sujettes à quelques hasards. Cependant il y a plutôt à parier que les choses tourneront bien, qu'elles prennent un tour fâcheux. V. A. jugera<160> elle-même quel avantage sa maison pourrait retirer d'un pareil établissement. Je la prie de vouloir se consulter là-dessus, et de me faire savoir ensuite sa résolution. Il n'y a point de temps à perdre, et je suis presque sûr de faire réussir la chose, si, madame, vous l'approuvez. Je me trouverai heureux si, en saisissant cette occasion qui se présente, je puis, madame, vous rendre quelques services et vous donner des marques de l'estime et de la considération avec laquelle je suis, etc.

13. DE LA LANDGRAVE DE HESSE-DARMSTADT.

Darmstadt, 18 mai 1772.



Sire,

Je sens tout le prix des bontés dont Votre Majesté m'honore; elle m'en donne dans ce moment-ci une preuve bien forte en daignant s'intéresser à l'établissement d'une de mes filles. Cette affaire ne m'est point absolument inconnue, et, V. M. me faisant l'honneur de m'en parler comme d'une chose faisable, je lui répondrai avec toute la franchise de mon caractère que je ne refuserai point un établissement aussi brillant que je le vois avantageux pour moi et pour ma famille. Outre la satisfaction que j'aurai de voir une de mes filles appartenir à l'impératrice de Russie, mes sentiments pour cette grande princesse me rendront cette alliance d'autant plus précieuse. Je me confie entièrement à V. M., touchée de ses bontés et heureuse de pouvoir compter sur son suffrage. Que ne puis-je soumettre toutes les actions importantes de ma vie à la décision de V. M., à qui<161> j'ai voué la confiance la plus absolue, un attachement inviolable et le plus profond respect! Je suis, Sire, etc.

14. A LA LANDGRAVE DE HESSE-DARMSTADT.

Le 24 mai 1772.



Madame ma cousine,

Je suis charmé, ma chère landgrave, de m'être rencontré dans votre façon de penser. A présent que je suis sûr de votre consentement, je mettrai les fers au feu pour pousser cette affaire et la mener à sa conclusion. Cela me procurera sûrement le plaisir de vous revoir, car j'imagine que vous voudrez conduire vous-même la princesse votre fille dans sa nouvelle patrie. Je crois que cette affaire pourra se conclure plus vite que vous ne le croyez, et que vous aurez, madame, lieu d'en être satisfaite. Je me souviens que lorsque je proposai un parti semblable au défunt prince de Zerbst,2_161-a j'eus bien de la peine à vaincre ses scrupules de religion; il répondit à toutes mes représentations par : Meine Tochter nicht griechisch werden. Je me flatte que de pareils scrupules n'auront pas lieu dans l'affaire présente, d'autant plus qu'on lui prouva que la religion grecque était précisément la luthérienne. Il fut assez bon pour le croire, et c'est ce qui a fait que sa fille est actuellement impératrice de Russie. Voilà, madame, à quoi tient souvent l'origine des plus grandes fortunes. Je souhaite que mes soins aient toute la réussite possible, et que j'aie la satisfaction, madame, de vous l'annoncer bientôt. Je suis avec autant d'estime que d'amitié, madame ma cousine, etc.

<162>

15. DE LA LANDGRAVE DE HESSE-DARMSTADT.

Darmstadt, 5 juin 1772.



Sire,

Combien dois-je être pénétrée de reconnaissance de la bonté avec laquelle V. M. s'occupe du sort de ma famille! J'ai mille grâces très-humbles à lui rendre d'avoir daigné me faire part, par sa lettre du 24, qu'elle va mettre les fers au feu. V. M. seule pourra faire pencher la balance en faveur d'une de mes filles; plusieurs princesses sont sur les rangs, et je n'ai point assez d'amour-propre pour croire que mes filles les égalent en charmes et en agréments. Je n'ose demander laquelle pourrait être choisie, mais je réponds que ma fille Wilhelmine acceptera sans aucune difficulté;2_162-a les hasards et la religion grecque ne l'effrayent point. Je suis sûre de l'aveu du Landgrave; je l'ai sondé sur ce mariage. Il est vrai que je ne lui ai point dit dass seine Tochter sollte griechisch werden; mais j'ai lieu de croire, vu les avantages qu'il se promet de cette alliance, qu'il lui pardonnera cette démarche, qui pourra rester ignorée jusqu'après le départ. Si quelque chose peut me faire désirer de conduire ma fille dans sa nouvelle patrie, c'est la permission que V. M. me donne de la lui présenter à Potsdam et d'avoir le bonheur de vous faire ma cour; ces moments ont été et seront toujours les plus heureux de ma vie. V. M. connaît toute l'étendue des sentiments que je lui ai voués; pleine de zèle, d'attachement et du plus profond respect, je suis, Sire, etc.

<163>

16. A LA LANDGRAVE DE HESSE-DARMSTADT.

Le 13 juin 1772.



Madame ma cousine,

Je suis bien aise, madame, de m'être si bien rencontré avec vos idées sur l'établissement d'une des princesses vos filles, qu'à présent je puis regarder cette affaire comme presque terminée. Quant au choix de ces princesses qu'on pourra faire, je crois qu'on se décidera pour celle dont l'âge est le plus conforme à celui du grand-duc; et d'ailleurs, madame, cela revient au même, pourvu que vous deveniez belle-mère d'un empereur de Russie. Vous me faites grand plaisir de m'apprendre que la communion grecque ne mettra aucun obstacle à cet établissement. Mon bon prince de Zerbst était plus rétif sur ce point, et quelque prêtre que je sus gagner en ce temps fut assez complaisant pour lui persuader que le rite grec était pareil à celui des luthériens, et il répétait sans cesse : Luthersch griechisch, griechisch luthersch, das gehet an. Après quelques momeries et quelques misères de cette espèce, sa fille partit pour la Russie, et la voilà à présent impératrice, et grande impératrice. Je souhaite, madame, que les obscures destinées répondent aux vœux que je fais pour votre personne et pour les heureuses suites de cette grande affaire. Mon maquerellage sera bien récompensé, si, en menant votre fille pour la placer sur ce trône, vous me faites le plaisir de passer chez moi, et de me mettre à même de vous réitérer de vive voix les assurances d'amitié et de la véritable estime avec laquelle je suis, madame ma cousine, etc.

<164>

17. A LA MÊME.

Le 3 août 1772.



Madame ma cousine,

Je vois, madame, que vous vous forgez des monstres pour les combattre; soyez sûre ou que je n'ai aucun crédit, ou qu'une de vos filles épousera le grand-duc. Je sais en gros qu'on demande de la future de la douceur, un maintien honnête et de la fécondité. Quant au dernier point, il faut s'en rapporter aux probabilités; les expériences ne seraient pas admissibles sur un sujet aussi délicat. J'espère donc de vous voir passer chez nous, menant votre fille en triomphe au trône qui l'attend. Assebourg est un garçon qui m'est fort attaché, et qui ne gâtera rien dans cette affaire. Il est à Francfort ou dans ses environs; je ne saurais vous dire positivement, madame, quand il commencera sa tournée. Il se peut qu'il aille dans le Würtemberg; mais à cela ne tienne, il passera chez vous sans faire semblant de rien. Je suis sûr, madame, que, en voyant les princesses vos filles, et surtout en jugeant d'elles par leur respectable mère, vous aurez gain de cause. D'ailleurs, vous pouvez vous en fier à mes soins; je travaille pour vous plus que si j'étais dans votre service; ou la chose réussira, ou je n'y entends rien. Vous serez avertie de tout ce que j'apprendrai d'essentiel, et je me confie en cela entièrement à votre discrétion. Je vois, madame, qu'on gagne à être vu de loin; je ne m'attendais pas à avoir un enthousiaste dans la personne du jeune prince de Rheinfels; je crains qu'il ne se repente en voyant de près des objets que son imagination lui peint en beau. Cependant je ne saurais haïr des personnes qui me veulent du bien, et si un instinct le porte au service prussien, je ne saurais le refuser. Il dépendra donc de lui de prendre les arrangements qu'il trouvera convenables pour entrer dans une nouvelle carrière. Souvent le hasard<165> va plus loin que la prudence; je vous devrai peut-être, madame, un bon sujet,2_165-a et ce sera ajouter aux obligations que je vous ai déjà, mais non à l'estime distinguée que je vous ai vouée dès longtemps. C'est avec ces sentiments que je suis, madame ma cousine, etc.

18. A LA MÊME.

Le 2 décembre 1772.



Madame ma cousine,

Je n'ai rien de plus pressé, ma chère landgrave, que de vous prier fort d'accepter sans délai ce que l'Impératrice vous offre. N'ayez point de scrupules, et rejetez sur mes mauvais conseils tout ce qui vous embarrasse. Vous n'avez qu'à me marquer quand il vous sera séant de venir ici, et je vous inviterai tout de suite, après quoi nous délibérerons ensemble pour trouver un prétexte plausible pour votre voyage de Russie. Toutefois il faut y aller et assister au jugement du beau Paris, qui donnera la pomme à une de vos trois déesses. Vous voyez, madame, que mes pressentiments sont assez certains, et que vous triompherez du cœur d'un jeune prince qui fera un sort très-avantageux à une de vos princesses. Je ne veux point arrêter le courrier; je vous embrasse, ma chère landgrave, en vous assurant du plus parfait attachement avec lequel je suis, madame ma cousine, etc.

<166>

19. A LA MÊME.

Le 19 décembre 1772.



Madame ma cousine,

Je vous assure, ma chère landgrave, que personne ne participe plus sincèrement à votre satisfaction que votre très-humble serviteur, et je ne me repens point du conseil que je vous ai donné. Je comprends que ce voyage vous embarrasse un peu; mais vous avez ici une fille et des amis qui se feront un plaisir de vous assister, et qu'à cela ne tienne, tout le reste ira de soi-même. Vos princesses sont sans doute timides; voudriez-vous donc qu'à leur âge elles eussent une hardiesse qui tient de l'effronterie? Eh! ne craignez rien, madame; selon que je connais la carte du pays, on les aimera mieux douces que hardies. Vous savez, d'ailleurs, combien une année de mariage délie les langues des jeunes dames; j'en ai vu (et l'Impératrice même) qu'on aurait prises pour des saintes Mitouches,2_166-a et qui dans la suite en ont bien donné à garder à d'autres. J'attendrai vos ordres pour préparer ici votre réception, et je ne vous écrirai qu'après que vous m'en aurez averti. En attendant, je jouirai de deux époques : celle de votre passage en allant, et celle de votre retour; ce sera mon Kuppelpelz.2_166-b Je vous prie, ma chère landgrave, de me croire avec toute la considération et l'amitié possible, madame ma cousine, etc.

<167>

20. A LA MÊME.

Le 19 février 1773.



Madame ma cousine,

Comme il y a bien longtemps que la Princesse de Prusse ni tout le troupeau de vos fidèles adorateurs n'a eu le bonheur de vous voir, je ne sais, ma chère landgrave, si ce ne sera pas vous importuner que de vous prier de nous réjouir par votre présence. Je ne sais s'il m'est permis d'ajouter que le commencement de mai serait peut-être le temps le plus propre pour ce voyage, le moins incommode pour vous, et en même temps le plus favorisé par la saison. La Princesse de Prusse se réjouira d'avance sur ce moment, et si vous vouliez rendre la satisfaction complète, vous lui amèneriez ses sœurs, qu'elle aime tendrement. Vous serez la maîtresse, ma chère landgrave, de partager votre temps, comme vous le jugerez le plus convenable, entre Berlin et Potsdam, et de favoriser ainsi alternativement de votre présence des amis qui vous sont sincèrement attachés. J'espère que vous me comptez à leur tête, étant avec la plus parfaite estime et l'amitié la plus sincère, madame ma cousine, etc.

21. A LA MÊME.

Le 19 mai 1773.



Madame ma cousine,

Il m'a paru que c'est dans les besoins où nous devons nous attendre au secours de nos amis, et que c'est dans ces occasions où leur atta<168>chement doit le plus se manifester. Persuadé de cette assertion, je regarde comme un de mes devoirs d'en agir ainsi envers ceux que j'estime et considère. Mais, madame, la Princesse de Prusse pense de même, et je ne prétends point lui dérober le mérite des marques d'attachement qu'elle vous a données; au contraire, je l'en applaudis, et suis persuadé que, si le cas s'en présente, elle ne laissera pas manquer sa respectable mère de ressources dans un pays où elle se trouve dans la nécessité de faire des dépenses qui surpassent ses facultés. En attendant, madame, soyez persuadée que mes vœux vous accompagneront partout, et que rien ne vous arrivera dont je ne participerai comme votre véritable ami. Je suis avec autant d'estime que de considération, etc.

22. DE LA LANDGRAVE DE HESSE-DARMSTADT.

Berlin, 31 mai 1773.



Sire,

Le prince Dolgorouki vient de m'annoncer l'arrivée des frégates à Lübeck; elles y sont depuis le 28, et partirent le 17 de Cronstadt. Il m'a remis l'incluse, que je prends la liberté de mettre sous les yeux de V. M. J'ai fixé mon départ d'ici au 4, vendredi matin. Je partirai pénétrée de toutes les grâces dont V. M. m'a comblée, et mes enfants. Je la supplie de nous continuer sa protection et de croire que dans le monde entier, et je n'exagère point, personne ne peut vous être, Sire, plus fidèlement dévoué que je vous le suis; mon attachement est<169> à toute épreuve, et mon âme pénétrée des sentiments de la plus vive reconnaissance. Je suis avec le plus profond respect, Sire, etc.

23. A LA LANDGRAVE DE HESSE-DARMSTADT.

Le 3 août 1773.



Ma chère landgrave,

Ce qui me fait le plus grand plaisir de votre lettre est de vous savoir satisfaite et contente. On nous avait alarmés sur votre sujet, en nous mandant que vous aviez pris la maladie que la Néwa donne aux étrangers. Je me flatte qu'elle est passée actuellement, et que vous avez payé le tribut que les étrangers payent à cette sphère, ma chère landgrave, que vous habitez présentement. Je crois que toutes les choses grandes et nouvelles que vous voyez là-bas doivent vous faire grand plaisir, surtout si vous faites réflexion que, au commencement de ce siècle, cette capitale pompeuse que vous voyez, et où tant de milliers d'âmes subsistent, n'était qu'un désert marécageux où ne vivaient que des bêtes sauvages. Je fais mille vœux pour que la princesse Wilhelmine soit aussi heureuse que le comporte la condition humaine; elle retrouve dans la personne de l'Impératrice une nouvelle mère, et vous la laissez en de si bonnes mains, que vous n'en devez avoir aucune inquiétude après votre départ. Le prince votre fils est à présent à Rheinsberg, chez mon frère, qui donne quelques fêtes à ma nièce d'Orange avant son départ. Le prince attend avec impatience le moment de rejoindre sa digne mère; nous lavons vu ici, en attendant, avec bien du plaisir; mais ce qui m'en fait encore davantage, c'est l'assurance que vous daignez me donner de repasser par ici.<170> Quel plaisir, ma chère landgrave, de vous entendre conter tout ce que vous avez vu, surtout ce qui regarde la personne de l'Impératrice! Vous devez vous attendre d'avance à toutes les questions que l'intérêt que je prends à cette grande princesse me feront vous faire. C'est un tribut que les voyageurs sont obligés de payer à ceux qui n'ont pas autant vu qu'eux, et j'attends de votre complaisance que vous me le payerez. J'ai bien senti que vos affaires domestiques vous obligeraient à presser votre retour, madame votre mère et M. le Landgrave ne pouvant se passer si longtemps, madame, de votre présence. Je fais des vœux d'avance pour que votre voyage soit heureux, et que j'aie la satisfaction de vous embrasser ici en parfaite santé. Je suis avec la plus haute estime, etc.

24. DE LA LANDGRAVE DE HESSE-DARMSTADT.

Saint-Pétersbourg, 21 octobre (n. st.) 1773.

.... Mon fils a été nommé brigadier. L'Impératrice envoie par le courrier prince Dolgorouki l'ordre de Sainte-Catherine à la Princesse de Prusse. Elle m'a dit qu'elle espérait que V. M. permettra que ma fille porte cet ordre.

<171>

25. A LA LANDGRAVE DE HESSE-DARMSTADT.

Le 27 mars 1774.



Madame ma cousine,

Je ne vous importunerais pas par mes lettres, ma chère landgrave, si l'on ne m'avait étrangement alarmé sur le sujet de votre santé. Je suis trop de vos amis, trop attaché à votre personne, pour recevoir une nouvelle pareille avec indifférence, et c'est moins à vous que j'adresse ma lettre qu'à votre médecin, que je prie de vouloir m'informer de l'état de votre santé.2_171-a C'est à lui à me répondre, mais non pas à vous, ma chère landgrave, que cela pourrait incommoder dans l'état de faiblesse où vous vous trouvez. Ayez la bonté de m'envoyer sa consulte pour toute réponse, et veuille le ciel que j'y trouve les sujets de consolation que je désire! Vous assurant que de tous vos plus proches parents il n'en est aucun qui vous estime, respecte et aime plus que, madame ma cousine, celui qui est

de Votre Altesse
le fidèle cousin et ami,
Federic.

<172><173>

APPENDICE.2_173-a

1. LA LANDGRAVE DE HESSE-DARMSTADT A SON MARI.

Potsdam, 3 août 1770.



Mon cher landgrave,

Je vous annonce que vous êtes grand-père d'un prince de Prusse. La joie du prince est inconcevable, ainsi que celle de notre chère fille, qui a souffert comme une damnée de huit heures et demie du soir à deux et demie du matin, mais avec un courage et en travaillant comme un forçat. Elle sentait déjà des douleurs toute la nuit du 1er au 2. Elle vous baise les mains, et recommande son fils à vos bontés. Adieu, chérissime landgrave. Le 24 je serai chez vous, à Pirmasens. Aimez-moi toujours, et croyez que je vous adore. Votre fidèle, etc.

2. LA MÊME AU MÊME.

Potsdam, 3 août, le soir, 1770.

Grâce à Dieu, notre fille se porte aussi bien et beaucoup mieux même que les circonstances d'un accouchement aussi rude pouvaient faire espérer. Elle a eu<174> plus de cent fortes douleurs, et a travaillé sans relâche. C'est à Henckel2_174-a que l'on doit la vie de votre petit-fils. Le Roi a une joie parfaite de sa naissance. Il vint voir à onze heures ma fille, lui a dit les choses les plus gracieuses, et s'est beaucoup occupé de l'enfant, dont il a mesuré la grandeur avec sa canne, et a paru satisfait de ses grands yeux, avec lesquels il le fixait. Je reçus le Roi au haut de l'escalier; il m'embrassa, et marqua sa joie. Le Roi a envoyé une magnifique aigrette de diamants à sa nièce, pour le joli poupard qu'elle a donné, écrit-il à madame de Morrien2_174-b ....


2_109-a Le prince d'Orange et sa jeune femme étaient partis, le 14, de Potsdam pour la Hollande. Voyez t. XXIV, p. 156 et 157.

2_11-a Le mot befolgen, ou tel autre mot équivalent, est omis dans le texte que nous suivons.

2_11-b Le margrave Henri avait succédé en 1711 à son père, comme chef du 12e régiment d'infanterie, en garnison à Prenzlow. Il devint général-major le 22 juin 1740.

2_110-a Voyez t. XVIII, p. VI et VII, art. V, et p. 187-294.

2_113-a Frédéric arriva à Loo le 13 juin, et en repartit le 10 pour Wésel. Voyez t. XXIV. p. 174 et 175, et t. XXVII. I, p. 389.

2_114-a Voyez t. XXIII, p. 432.

2_115-a Voyez t. XIV, p. XVI, art. XLV, et p. 200.

2_116-a Voyez t. XIV, p. 200-210.

2_119-a Voyez t. XXIV, p. 496.

2_120-a La princesse Caroline de Nassau-Weilbourg était née le 28 février 1743, et mourut le 28 novembre 1788.

2_124-a Voyez t. VI, p. 27, et t. XXIV, p. 196 et 510.

2_124-b Paoli avait quitté la Corse le 3 juin, pour se réfugier en Angleterre. Voyez t. XVIII, p. VIII et 305.

2_124-c Envoyé de Prusse à la Haye.

2_125-a Il s'agit du prince Frédéric-Henri-Émile-Charles, fils du prince Auguste-Ferdinand, né le 21 octobre 1769, mort le 9 décembre 1773. Voyez t. XXVI, p. 640, 653 et 654.

2_126-a Le jeune prince Henri de Prusse était mort le 26 mai 1767. Voyez t. VII, p. 52 et 53.

2_129-a La Princesse de Prusse accoucha, le 3 août 1770, du prince Frédéric-Guillaume.

2_130-a Le mot jetés manque dans l'autographe.

2_131-a Voyez ci-dessus, p. 129. Le prince Frédéric-Guillaume régna plus tard sous le nom de Frédéric-Guillaume III.

2_132-a Le prince Frédéric de Hesse-Cassel.

2_132-b La princesse d'Orange accoucha, le 28 novembre, de la princesse Frédérique-Louise-Wilhelmine, qui épousa en 1790 le duc Charles-George-Auguste, fils aîné du duc régnant Charles de Brunswic. Voyez t. XXVI, p. 385 et 389.

2_133-a Le comte Reinhard-Adrien-Charles-Guillaume de Heyden (t. XXVI, p. 389) remplaça plus tard, en qualité d'envoyé de Hollande, le comte de Verelst (t. XIX, p. 222), mort à Berlin le 25 janvier 1774. Ce fut le 25 juin de la même année que M. de Heyden présenta ses lettres de créance au Roi, à Potsdam.

2_134-a Genèse, chap. XXXII, v. 12.

2_137-a La princesse d'Orange accoucha, le 24 août 1772, du prince Guillaume, qui depuis fut roi des Pays-Bas, et mourut à Berlin le 12 décembre 1843.

2_141-a Voyez t. XXIV, p. 85 et 92.

2_141-b L'Impromptu de campagne, comédie en un acte et en vers, de Philippe Poisson, représentée pour la première fois au Théâtre français le 21 décembre 1733.

2_142-a La princesse Anne-Charlotte, abbesse de Mons, et sœur de l'empereur François Ier; elle était née le 17 mai 1714, et mourut le 7 novembre 1773.

2_145-a Le mot détention est mis ici pour élargissement, comme au tome XVI, p. 55, 60 et 80. Voyez aussi t. VI, p. 46.

2_146-a Mot hollandais qui signifie l'assemblée des états.

2_151-a Le prince héréditaire de Hesse-Darmstadt, lieutenant-général au service du Roi (t. IV, p. 131), venait de donner sa démission, probablement par suite des lettres avocatoires de la cour impériale. Voyez J.-D.-E. Preuss, Urkundenbuch zu der Lebensgeschichte Friedrichs des Grossen. t. II, p. 3 et 4, nos 1 et 2.

2_153-a Il s'agit probablement du colonel prussien Philippe-Chrétien de Bohlen, qui parvint plus tard au grade de lieutenant-général.

2_157-a Voyez t. VI, p. 25; t. XX, p. 197; t. XXIV, p. 222 et 225; t. XXVI, p. 367; et ci-dessus, p. 129 et 131. Voyez aussi l'Appendice de cette correspondance.

2_159-a Voyez t. XXVI, p. 371.

2_16-a Voyez t. IV, p. 230.

2_16-b Voyez t. XXIII, p. 241.

2_161-a Voyez t. XXV, p. 637 et suivantes.

2_162-a Le choix de l'Impératrice tomba sur la princesse Wilhelmine, qui, arrivée à Saint-Pétersbourg, prit le nom de Natalie-Alexiewna, le 26 août (nouveau style) 1778.

2_165-a Ce n'était pas la Landgrave, mais le prince de Birkenfeld son cousin, qui avait recommandé à Frédéric le prince de Rheinfels.

2_166-a Voyez t. XI, p. 120.

2_166-b Courtage.

2_171-a La landgrave Caroline mourut le 30 mars.

2_173-a Voyez ci-dessus, p. 157.

2_174-a Joachim-Frédéric Henckel, accoucheur. Voyez J.-D.-E. Preuss, Friedrich der Grosse, eine Lebensgeschichte, t. III, p. 292.

2_174-b Voyez t. XIII, p. 10.

2_18-a La croix de Malte. Voyez t. XVI, p. 18.

2_19-a Frédéric fit la campagne de 1734; mais le Roi ne lui permit pas de faire celle de 1735. Voyez t. I, p. 191 et suiv.; t. XI, p. 77-79; t. XVI, p. 141-143 et 144; t. XXVII. I, p. 14 et suiv.; ci-dessus, p. 10; Correspondance familière et amicale de Frédéric II avec U.-F. de Suhm, t. I, p. XVIII-XX; Mémoire sur le roi de Prusse Frédéric le Grand, par Msgr. le P. de L .... (Ligne), Berlin, 1789, p. 47 et suiv.; voyez enfin la correspondance de Frédéric avec son père, en tète de la troisième partie de ce volume.

2_19-b De la main de Frédéric.

2_19-c Fils cadet du Grand Électeur. Il était né en 1677, et mort en 1734, sans avoir été marié.

2_22-a Frédéric parle de l'action de Jägerndorf, qui avait eu lieu la veille du jour où cette lettre fut écrite. Voyez t. III, p. 11-119.

2_22-b L. c., p. 119.

2_23-a George-Frédéric de Schweinichen, lieutenant depuis 1740, et capitaine, depuis 1756, au régiment d'infanterie du margrave Charles (no 19), était né en Silésie en 1719. Il fut blessé mortellement à la bataille de Leuthen, et mourut à Neumarkt le 12 décembre 1757.

2_24-a Le margrave Charles avait eu de Régina Wilke deux enfants naturels, nommés Charles et Caroline. Ils furent anoblis en 1744, sous le nom de Carlowitz. Caroline de Carlowitz. née en 1731, épousa, le 13 septembre 1747, le capitaine comte Albert de Schönbourg-Glauchau.

2_25-a Le comte de Gessler, nommé général de cavalerie le 26 mai 1747, fut élevé au grade de feld-maréchal le 21 décembre 1751, et Hans de Lehwaldt, général d'infanterie depuis le 29 mai 1747, parvint à la même dignité le 22 décembre 1751. Le margrave Charles avait été fait général d'infanterie le 24 mai 1747.

2_26-a Cette coutume subsiste encore. Les généraux de Gneisenau et de Zieten, nommés feld-maréchaux en 1825 et en 1839, ont passé devant les princes Henri, Guillaume et Auguste de Prusse, dont les brevets de généraux de cavalerie ou d'infanterie étaient de plus ancienne date. De même les généraux de Müffling, de Boyen et de Knesebeck, nommés feld-maréchaux en 1847, ont passé devant le prince Guillaume, général de cavalerie depuis le a avril 1814, et inhumé, le 2 octobre 1851, par ordre spécial de Sa Majesté le Roi, avec les honneurs qu'on rend aux feld-maréchaux, comme le prince Auguste l'avait été le 29 juillet 1843. Frédéric lui-même se refusa en 1766, par égard pour son frère Henri, le plaisir de créer feld-maréchaux les généraux baron Fouqué et duc Auguste-Guillaume de Bevern (J.-D.-E. Preuss, Friedrich der Grosse mit seinen Verwandten und Freunden, p. 337 et 338); et cette considération l'empêcha aussi de conférer à Seydlitz et à Zieten la première dignité militaire. Frédéric-Guillaume Il n'eut pas les mêmes égards pour le prince Henri, et il donna, en 1787, le grade de feld-maréchal au duc régnant de Brunswic, mort en 1806.

2_28-a Cet ouvrage, intitulé : Die General-Principia vom Kriege, appliciret auf die Tactique und auf die Disciplin derer Preussischen Truppen, 1753, fut distribué dès le 23 janvier de la même année.

2_29-a Le mot mouvement est omis dans l'autographe.

2_29-b Les margraves Frédéric et Henri de Brandebourg-Schwedt, disgraciés. Voyez t. XXVI, p. 636, et, ci-dessus, l'Avertissement de l'Éditeur, article II.

2_3-a Voyez t. II, p. 85, et t. XXVII. I, p. 113.

2_30-a Ce projet de lettre est de la main de M. Eichel, conseiller intime de Cabinet. Voyez t. XX, p. 308, et t. XXVI, p. 276.

2_33-a Voyez t. XVI, p. 145 et 146.

2_33-b Allusion au voyage que le Roi venait de faire à Wolfenbüttel. Voyez, dans la troisième partie de ce volume, la lettre de Frédéric-Guillaume Ier au Prince royal, du 24 octobre 1735, no 102. Ce dernier se sert quelquefois du mot Gast pour désigner son père, par exemple, t. XXV, p. 528.

2_33-c Voyez t. I, p. 189.

2_34-a Voyez t. I, p. 189.

2_34-b L. c., p. 193.

2_34-c Voyez t. XXVII. I, p. 34.

2_38-a Frédéric désirait prendre à son service treize cents Brunswicois, pour en former un régiment que le duc Ferdinand commanderait. Voyez t. XXVI, p. 13.

2_39-a Une magnifique tabatière, comme le Duc s'exprime dans sa réponse du 17 juin 1740.

2_39-b Voyez t. VII, p. 12 et 13; t. XVII, p. III, IV, 297-330; t. XXV, p. 557; et t. XXVII. I, p. 383.

2_41-a Cette pièce est la réponse à une lettre du duc de Brunswic, du 22 juin 1740.

2_41-b Le régiment d'infanterie du prince Léopold d'Anhalt-Dessau (no 27), en garnison à Gardelegen, avait enlevé un dragon du Duc.

2_43-a De la main d'un secrétaire.

2_43-b De la main du Roi.

2_44-a Cet officier est probablement celui dont il a été fait mention t. XXVII. I, p. 387.

2_44-b De la main d'un secrétaire.

2_45-a Voyez t. XXVI, p. 27 et 61; t. XXVII. I. p. 390.

2_46-a Voyez t. II, p. 62 et 63.

2_46-b L. c., p. 64 et suivantes.

2_46-c De la main d'un secrétaire.

2_47-a Voyez t. III, p. 155, et t. XXVI, p. 27 et 28, nos 37 et 38.

2_51-a Voyez, t. XXVI, p. 332 et suivantes, les lettres de Frédéric au prince Henri son frère, du 22 et du 26 octobre, du 3, du 14 et du 21 novembre 1763.

2_53-a Cette date a été mise au bas de la lettre par le prince Frédéric-Auguste.

2_53-b Voyez t. XX, p. 108, et t. XXII, p. 244.

2_53-c La loge des trois globes, inaugurée le 13 décembre 1740. Voyez Beschreibung der Säkular-Feier der Aufnahme Friedrichs des Grossen in den Freimaurer-Bund (par le général d'Etzel). Berlin, 1838, p. 127 et 128. Voyez aussi notre t. XVIII, p. 17.

2_55-a Le prince Frédéric de Brunswic possédait l'hôtel situé rue Guillaume, no 70, qui appartient aujourd'hui à M. Rodolphe Decker, imprimeur du Roi.

2_55-b Voyez t. XXIII, p. 364 et 373.

2_55-c Ce post-scriptum est de la main du Roi. - Le prince Ferdinand de Brunswic avait été élu, en 1772, grand prieur de toutes les loges allemandes de la stricte observance, et c'était à la même époque que le prince Frédéric-Auguste avait été élu grand prieur pour les États prussiens. Voyez Geschichte der Grossen National-Mutterloge der Preussischen Staaten genannt zu den drei Weltkugeln (par le général d'Etzel), Berlin, 1840, p. 47.

2_56-a De la main d'un secrétaire.

2_56-b De la main du Roi.

2_57-a Voyez t. XXVII. I, p. 395.

2_58-a Cette date a été mise au bas de la lettre par le prince.

2_59-a Cette note ne concernait pas la femme du prince Frédéric, mais celle du Prince de Prusse, Frédérique-Louise, née princesse de Hesse-Darmstadt.

2_60-a De la main d'un secrétaire.

2_60-b De la main du Roi.

2_61-a Les mots les sauterelles de Goeuren, que nous avons exactement copiés sur l'autographe, font probablement allusion aux grandes pertes qu'avaient causées au Roi la mauvaise administration et les malversations du ministre d'État Frédéric-Christophe de Goerne, pertes qui montaient à plus d'un million d'écus. M. de Goerne fut arrêté le 19 janvier 1782, et conduit le 1er mai suivant à Spandow, où il devait subir une réclusion perpétuelle. Il fut gracié par Frédéric-Guillaume II. Voyez le recueil intitulé : Patriotisches Archiv für Deutschland (publié par Frédéric-Charles baron de Moser), Francfort et Leipzig, 1784, t. I, p. 409-482.

2_61-b Les mots de Votre Altesse Sérénissime sont écrits en gros caractères dans l'autographe, probablement par plaisanterie.

2_66-a Voyez t. IV, p. 198.

2_66-b De la main d'un secrétaire.

2_66-c De la main du Roi.

2_67-a George-Louis, duc de Holstein-Gottorp, lieutenant-général, né en 1719. Voyez t. IV, p. 211.

2_67-b Ce billet et le précédent sont des post-scriptum ajoutés par le Roi à des lettres officielles.

2_68-a Voyez t. IV, p. 210.

2_68-b Voyez t. XXVI, p. XI.

2_70-a A Zorndorf. Voyez t. IV, p. 229 et suivantes.

2_70-b L. c., p. 212 et suivantes.

2_73-a Il s'agit de l'action qui eut lieu près du village de Bergen. Voyez t. V, p. 2 et 3.

2_73-b Le duc Ferdinand a mis de sa main au bas de cette lettre : « Je ne connais ce terme sous-rayé. » - Le mot bibus signifie bagatelle.

2_73-c Post-scriptum ajouté par Frédéric à une lettre officielle.

2_75-a De la main du Roi.

2_75-b Voyez t. XV, p.136.

2_75-c L. c., p. 89.

2_83-a La princesse Sophie-Albertine de Suède. Voyez ci-dessous les lettres que Frédéric lui a écrites.

2_85-a Voyez t. VI, p. 26, 53 et 54; t. XXVII. I, p. 47 et suivantes.

2_87-a Envoyé de Prusse à Stockholm depuis le mois de mai 1771 jusqu'au mois de juin 1775.

2_90-a Voyez t. XXV, p. 93.

2_90-b Valère Maxime, livre VIII, chap. II; Suétone, Vie de Jules César, chap. LXXXI; Plutarque, Vie de Jules César, chap. LXIII.

2_95-a Voyez t. XXIII, p. 405, et t. XXVI, p. 426.

2_96-a Voyez t. V, p. 14; t. XIX, p. 338; et t. XXVI, p. 273.

2_II-a Voyez Blüsching, Character Friedrichs des Zweiten, p. 20.

2_III-a Voyez t. II, p. 85; t. III, p. 63; t. XVIII, p. 157; et ci-dessous, p. 3.

2_III-b Voyez t. XVI, p. 18 et 132.

2_III-c Voyez ci-dessous, p. 25-28, nos 15, 16 et 17.

2_III-d Voyez t. XVI, p. 18, 101 et 102, et ci-dessous, p. 18.

2_III-e Voyez t. XXVI, p. 285.

2_IV-a Voyez t. XIX, p. 373.

2_IV-b Voyez t. VI, p. 248.

2_IX-a Voyez, t. XXVI, p. 647-649, les lettres de Frédéric a son frère le prince Ferdinand, du 8 et du 12 août 1772, et ci-dessous, p. 83 et 84, les lettres de Frédéric à Gustave III, du 3 juillet et du 3 août de la même année.

2_IX-b Voyez t. VI, p. 19, 246 et 250, §. 15; t. XX, p. 178 et 246; t. XXIII, p. 156 et 282; t. XXIV, p. 85, 92, 156, 174, 209, 248 et 283; t. XXVI, p. 323 et 593; t. XXVII. 1, p. 458; ci-dessous, p. 109 et suivantes.

2_V-a Nous ne savons si Frédéric a jamais été en correspondance avec le prince héréditaire de Brunswic, qu'il aimait et estimait beaucoup. Voyez t. IV, p. 157 et 209; t. V, p. 6-11 et 35; t. VI, p. 246 et 251, §. 18; t. XII, p. 25-32; t. XIX, p. 137; t. XX, p. 148; t. XXVI, p. 235, 332, 333, 335, 338 et 339; t. XXVII. 1, p. 393; et ci-dessous, p. 33.

2_V-b Voyez t. XXVII. I, p. 387.

2_V-c Voyez t. V, p. 164 et 165.

2_V-d Voyez t. XXVI, p. 316 et 329.

2_V-e Voyez t. XX, p. 330; t. XXIV, p. 85 et 140; et t. XXVII. I, p. 458.

2_V-f Voyez t. XX, p. 248, et t. XXIV, p. 178.

2_VI-a Voyez t. XIII, p. 6-9.

2_VI-b L. c., p. 137.

2_VI-c Les numéros 2, 3, 4, 7, 8, 9, 10 et 13.

2_VI-d Les numéros 1, 11, 12, 14, 15 et 16.

2_VI-e Voyez t. IV, p. 177 et 178; t. VI, p. 246 et 251, §. 24; et ci-dessous, p. 40 et suivantes. Voyez aussi J. Mauvillon, Geschichte Ferdinands, Herzogs von Braunschweig-Lüneburg. Leipzig, 1794, deux volumes.

2_VII-a Voyez t. XXVI, p. 560. Frédéric écrit à son frère Henri (lettre inédite du 15 octobre 1782) : « Le prince Ferdinand, qui a été chez sa sœur, à Schönhausen, repasse aujourd'hui par ici pour retourner à Brunswic. » Voyez de plus J.-D.-E. Preuss, Friedrich der Grosse, eine Lebensgeschichte, t. II, p. 357.

2_VII-b Voyez t. XII, p. 9-16.

2_VIII-a Les enfants de la reine Ulrique. Quant à Gustave III, voyez t. XXIII, p. 220 et 221; t. XXIV, p. 597; et t. XXVI, p. 451. Son frère cadet le prince Charles, duc de Südermanie, est mentionné t. XXVI, p. 376.

2_X-a Voyez t. XVI, p. 222; t. XXI, p. 251, 294, 295 et 368; et t. XXII, p. 35.

2_XI-a Voyez Lettres familières et autres, de M. le baron de Bielfeld, t. II, p. 307.