<146> vos ruses à lui faire faire des détachements, et, dès qu'il les a faits, profitez du moment pour le battre. Il y a des ruses pour surprendre des places, exemple : prince Eugène, lorsqu'il surprit Crémone; des ruses pour que l'ennemi ne devine pas votre but; pendant l'hiver, par exemple, celui qui rassemble le premier ses troupes et tombe sur le quartier des ennemis a toujours gain de cause; alors la ruse va à cacher l'assemblée de vos troupes ou à y donner d'autres motifs, comme de relever la Postirung,a ou de changer quelques régiments de quartiers. L'exacte disposition de la marche des troupes pour le moment de leur réunion décidera de votre entreprise. Les retranchements peuvent aussi être comptés parmi les ruses de guerre quand on en tourne l'usage à cette fin; cela ne doit servir que pour rendre un ennemi plus hardi et l'induire à hasarder des manœuvres indiscrètes vis-à-vis de votre armée, comme de lui prêter le flanc, de faire des marches sans précaution, de passer une rivière dans votre voisinage. Alors il est temps de quitter ce retranchement pour punir l'ennemi de sa sottise. Afin donc de diriger toutes vos démarches vers le but où vous tendez, il faut faire nombre d'ouvertures à ce retranchement, pour que vous en puissiez sortir sans embarras. On fait de faux détachements, que l'on rappelle peu de temps après; on commande des fourrages pour induire l'ennemi d'y envoyer sa cavalerie, on les contremande, et ensuite on tombe sur cette armée affaiblie par l'absence de ses fourrageurs. Dans ses marches, quand on est près de l'ennemi, on fait paraître de fausses têtes de colonnes pour lui donner le change. Enfin je ne finirais jamais, si je voulais faire l'énumération de toutes les inventions que l'occasion fournit, et dont on se sert à la guerre pour tromper son ennemi.

J'en viens aux ruses pour les dispositions. Notre marche par co-


a Au lieu du mot Postirung (Winter-Postirung), Frédéric a mis dans ses Règles de ce qu'on exige d'un bon commandeur de bataillon en temps de guerre : « la chaîne des quartiers d'hiver, » et dans son écrit, Des marches d'armée : « le cordon qui doit couvrir les quartiers d'hiver. »