<60>santé fait notre philosophie, dit l'Anacréon du Temple.b J'espère que l'usage des diaphorétiques, des martiaux, beaucoup d'exercice et une diète fort sévère, en redonnant à la circulation du sang toute sa vivacité, m'affermiront plus que jamais dans la philosophie aimable de Sans-Souci, que V. M. sait prêcher en nouvel Horace, avec toutes les grâces de l'imagination aussi bien qu'avec toute la force du raisonnement.

45. DU MÊME.

Berlin, 31 août 1749.



Sire,

Ayant eu, ces jours passés, deux faiblesses, M. de La Mettrie, Sire, a bien voulu rester ici pour avoir soin de moi. Mais, ne voulant pas abuser de son temps, je l'ai prié moi-même de se rendre à Potsdam, après avoir concerté avec lui les remèdes les plus convenables à ce qui demande chez moi un plus prompt secours. Ce sont les bouillons de vipère, que je commencerai demain; je ne discontinuerai pas les eaux, mais ce seront celles de Selters, que je mêle avec un peu de vin à mon dîner. M. de Lieberkühna avait opiné pour celles d'Éger; mais il me faudra, avant tout, tâcher de remettre de la vigueur dans la machine, qui est totalement abattue. Les pouls sont bas, le sang comme engourdi, la respiration la plupart du temps embarrassée. Je demande pardon à V. M. de lui présenter des idées aussi tristes; mais j'ai cru,


b

Bonne ou mauvaise santé
Fait notre philosophie.

Ces vers sont les deux derniers de l'Ode de Chaulieu Sur la première attaque de goutte que l'auteur eut, en 1695. Voyez ci-dessus, p. 36.

a Jean-Nathanaël Lieberkühn naquit à Berlin en 1711. De retour de ses voyages vers la fin de 1740, il fut bientôt recherché et consulté comme le plus habile médecin de la capitale. Il est surtout célèbre par ses travaux sur l'anatomie. Il mourut en 1756. Voyez t. II, p. 39 et 40, t. XIII, p. 70, et ci-dessus, p. 8. Voyez aussi la lettre de Frédéric à Voltaire, du 4 décembre 1739.