<201>rêts de V. M. et pour ceux du public, va proposer à V. M. un projet qui évitera la ruine de beaucoup de familles, et qui ne sera à charge ni à vous, ni à l'État; et je ne doute pas que vous ne l'approuviez. Il est certain que, s'il faut que la contribution soit payée ainsi que celle qu'on a déjà payée au général Hadik, plus de six ou sept mille personnes quitteront Berlin; car on a supputé qu'un ouvrier qui gagne six ou sept écus par mois sera obligé de payer plus de quarante écus. Quand même on viendrait à bout d'empêcher ces gens de sortir de Berlin, il faudra leur faire vendre une partie de leurs effets pour payer leur taxe. Tout cela sera évité par le plan que les principaux citoyens et les magistrats ont formé, et qui ne peut manquer d'être approuvé par un roi qui aime ses sujets et qui en est adoré. Vous aurez vu, Sire, ce que je vous ai marqué dans ma dernière lettre à ce sujet, et je puis vous jurer sur ce qu'il y a de plus sacré que la flatterie n'a aucune part à ce discours; c'est la pure et simple vérité.

Voilà tout le Canada pris; les Anglais peuvent faire revenir de l'Amérique quarante vaisseaux de guerre et douze à quinze mille hommes, car ils n'ont pas à craindre sûrement que les Français, qui n'ont plus de flotte, envoient une nouvelle armée dans l'Amérique. Nous verrons ce qu'ils feront. V. M. sait mieux que moi si elle doit s'en louer, ou non. Quant à moi, il me paraît que dix mille hommes des alliés en Saxe nous auraient évité l'irruption des Autrichiens, et nous auraient conservé la Saxe, que vous reprendrez bientôt malgré tous vos ennemis. J'ai l'honneur, etc.

152. AU MARQUIS D'ARGENS.

(Kemberg) 28 octobre 1760.

Vous appellerez, mon cher marquis, mes sentiments comme il vous plaira. Je vois que nous ne nous rencontrons point dans nos pensées, et que nous partons de principes très-différents. Vous faites cas de la vie en Sybarite; pour moi, je regarde la