<403>L'on peut dire avec autant de vérité des Français :

Français contre Français, parents contre parents,
Combattre follement pour le choix des pédants.

J'ai écrit à d'Alembert, et je n'ai pas manqué de lui dire le passage de Molière : Que diable allait-il faire dans cette galère?b En vérité, Sire, outre les obligations que j'ai à V. M., j'en ai encore de très-grandes à tous les Allemands. C'est en vivant chez eux que je me suis dépouillé de cet esprit turbulent qui semble inséparable du génie français. Qu'a de commun la philosophie avec la bulle Unigenitus, et qu'importe à un disciple de Bayle ou de Gassendi l'état des jansénistes ou des molinistes? Que dirait-on d'un homme sage, ou qui voudrait passer pour l'être, qui s'occuperait du rang que doivent tenir les fous dans l'hôpital qu'ils habitent? Jansénistes, jésuites, calvinistes, luthériens, anabaptistes, quakers, tous ces gens-là, ne sont- ce pas des fous pour un philosophe?

J'ai reçu une lettre, il y a quelques jours, de Voltaire, qui m'a envoyé ses ouvrages, et qui ne manque pas de me dire que, lorsque je passerai à Lyon, il serait honteux que le frère Isaac ne vînt pas voir le frère Voltaire; qu'il voulait, à l'exemple des ermites Antoine et Paul, recevoir ma bénédiction avant de mourir. Mais je ne passerai pas par Genève, si je n'en ai une permission expresse de V. M., et tous les ermites et Pères du désert, sans l'ordre de V. M., ne pourront rien sur moi. J'ai l'honneur, etc.

300. DU MÊME.

Éguilles, 4 janvier 1766.



Sire,

J'ai eu l'honneur d'écrire à Votre Majesté il y a quelques jours pour avoir le bonheur de lui souhaiter une bonne année, sans


b Molière, Les Fourberies de Scapin, acte II, scène II.