<133>du maréchal de Belle-Isle de les employer en Bohême, pour y couvrir l'aile gauche des alliés. J'ai plus fait : pour dégager M. de Ségur bloqué dans Linz, le zèle pour la cause commune me transporta en Saxe, et, à force d'importunités, j'obtins du roi de Pologne que ses troupes, de concert avec les miennes, fissent une diversion en Moravie. On se porta sur Iglau, dont M. de Lobkowitz se retira en hâte. Cette diversion aurait eu un effet décisif, si M. de Ségur avait eu la patience d'attendre les suites de cette opération, et si M. de Broglie avait été assez en force sur la Wotawa pour seconder mes efforts; mais la précipitation du premier, le peu de troupes de l'autre, la mauvaise volonté des généraux saxons, enfin le manque d'artillerie pour assiéger Brünn, ont fait échouer cette entreprise, ensuite m'ont obligé de quitter une province que les Saxons devaient posséder, et qu'ils n'avaient pas la volonté de conquérir. De retour en Bohême, j'ai marché contre le prince de Lorraine; je l'ai attaqué pour sauver la ville de Prague, qu'il aurait assiégée s'il n'avait été mis en déroute; je l'ai poursuivi autant que les vivres m'ont permis de le suivre. Aussitôt que j'appris que le prince de Lorraine prenait le chemin de Tabor et de Budweis, j'en avertis M. de Broglie, en lui conseillant d'expédier M. de Lobkowitz, qu'il venait de battre à Sahay, avant que l'armée de la reine de Hongrie pût le joindre : M. de Broglie ne jugea pas à propos de prendre ce parti, et au lieu de retourner à Pisek, où le terrain le favorisait, il partagea ses troupes en différents détachements. Vous êtes informé quelles en furent les suites, et tout ce qu'il en a résulté de fâcheux. Maintenant la Bavière est coupée de la Bohême, et les Autrichiens, maîtres de Pilsen, interceptent en quelque sorte les secours que le maréchal de Broglie peut attendre de la France. Malgré les promesses que les Saxons ont faites au maréchal de Belle-Isle, loin qu'ils se préparent à les remplir et à se joindre aux Français, j'apprends qu'ils quittent la Bohême et retournent dans leur électorat. Dans cette situation, où la conduite des Saxons est plus que suspecte, et où il n'y a rien à espérer de M. de Harcourt, l'avenir ne me présente qu'une guerre longue et interminable, dont le principal fardeau retomberait sur moi. D'un côté, l'argent des Anglais met toute la Hongrie en armes; d'un autre côté,