<369>les notes étaient très-instructives. Cet Ammien était un superstitieux personnage, qui croyait aux démons de l'air et aux sorciers, comme tout le monde y croyait de son temps, comme les Velches y ont cru du temps de Louis XIV, comme les Polonais y croient plus que jamais; car on dit qu'ils viennent de brûler sept pauvres vieilles femmes accusées d'avoir fait manquer la récolte par des paroles magiques.

Je ne sais, Sire, si je ne me suis pas démis à vos pieds de mon marquisat; je n'ai voulu accepter aucune récompense du peu de peine que j'ai pris pour le petit pays dont j'ai fait ma patrie.

J'ai quatre-vingt-deux ans, je n'ai point d'enfants; l'érection d'une terre en marquisat demande des soins au-dessus de mes forces; je ne désire à présent d'autres honneurs que celui d'être toujours protégé par le roi Frédéric le Grand, à qui je suis attaché avec le plus profond respect jusqu'au dernier moment de ma vie.

540. A VOLTAIRE.

Potsdam, 13 février 1776.

La fable du rat et de l'aigle vaut bien celle de l'âne et du rossignol. L'aigle troquerait volontiers avec le rat, si par ce troc il pouvait s'approprier les rares talents du dernier. Mais il n'est pas donné à tout le monde d'aller à Corinthe,a de même que n'est pas Protée qui veut.

Dans la Fable, jadis dans la Grèce inventée,
Nous admirons surtout le grand art de Protée,
Qui, toujours à propos sachant se transformer,
A tous les cas divers pouvait se conformer;
Mais, bien plus merveilleux encor que cette fable,
Voltaire la rendit de nos jours véritable.

En effet, il n'y a point de mutation dont vous ne soyez susceptible; et pour vous rendre entièrement universel, il ne nous


a Voyez t. XX, p. 310, et t. XXI, p. 205 et 377.