<106>bientôt à une heureuse conclusion, je voudrais encore que nos grosses perruques n'eussent pas la liberté de se livrer aux chicanes trop ordinaires dans leur métier. Daignez diriger les vôtres par vos lumières supérieures, et les contenir par des ordres précis. Je consens de bon cœur qu'elles prennent pour règle invariable le bien de votre État, et je demande seulement qu'elles sachent voir ce bien dans ce qui est avantageux aux deux parties. Les nôtres seront munies d'instructions dans ce même goût. Je ne puis trop remercier V. M. des sentiments qu'elle veut bien me témoigner; mais veuillez, Sire, y faire participer mes enfants. Vous mettrez par là un nouveau degré de vivacité dans ceux avec lesquels je serai toute ma vie, etc.

59. A L'ÉLECTRICE MARIE-ANTONIE DE SAXE.

Potsdam, 8 février 1766.



Madame ma sœur,

Je ne manquerai pas d'entrer dans les idées de Votre Altesse Royale pour tâcher d'inspirer des sentiments conciliants à l'avocat des conférences. Vous avez grande raison, madame, de condamner cet esprit opiniâtre et contentieux dans lequel la plupart des gens d'affaires font consister leur mérite. Il serait heureux qu'on pût se passer d'eux; il ne faut les considérer que comme des mâtins de basse-cour qu'on ne déchaîne que pour les laisser poursuivre le voleur. Tous les hommes devraient naturellement vivre en intelligence; la terre est assez grande pour les contenir, pour les nourrir et les occuper. Deux malheureux mots ont tout gâté, le mien et le tien; de là sont nés l'intérêt, l'envie, l'injustice, la violence, et tous les crimes. Si j'avais eu le bonheur de naître particulier, je n'aurais eu de procès avec personne, parce que j'aurais cédé jusqu'à ma chemise, et que j'aurais trouvé des ressources dans une industrie honnête. Il en est autrement des princes; une opinion s'est établie dans l'esprit des hommes, que,