<313>est si persuadé que vous pouvez tout, et j'ai si peu de bonnes raisons à opposer à cette persuasion, que je n'aurais pu décliner sa demande, quand les domaines de ses ancêtres eussent été sous la domination de la Chine, comme ils sont sous celle du Grand Seigneur. Il assure que tout est prouvé par une belle généalogie en latin, que je n'ai point lue, attendu que je lis peu les généalogies. V. M. ne la lira pas davantage; c'est bien assez qu'elle emploie quelques moments à s'occuper de mes lettres, et à recevoir l'hommage de la haute estime et de la considération infinie avec laquelle je ne cesserai d'être, etc.

214. A L'ÉLECTRICE MARIE-ANTONIE DE SAXE.

Schönwalde, 1er mai 1778.



Madame ma sœur,

Je viens de recevoir avec bien de la satisfaction la lettre que Votre Altesse Royale a la bonté de m'écrire; quelles que soient mes occupations, madame, le temps que j'emploie à lire les pensées que vous daignez me communiquer est toujours le plus agréable pour moi. Il est sûr que des lois générales et éternelles qui dirigent tout l'univers nous font présumer avec fondement qu'il en est également de particulières, et que ce qu'on nomme le hasarda n'a aucune part dans les événements de la vie. Il est certain que les hommes agissent sur des plans qu'ils se forment, sans qu'ils puissent prévoir où le jeu des causes secondes les mènera. Ainsi, en appréciant exactement les choses, nous ne sommes que des marionnettes mues par des mains divines qui dirigent nos volontés et nos actions à un certain but que nous ignorons, mais qui tient nécessairement à l'enchaînement général des causes de l'univers. Pour moi, qui ne suis qu'une des plus petites de ces marionnettes, je me confie au bras tout-puissant


a Voyez ci-dessus, p. 142.