<501>et il faut un peu de baume même aux plus grands hommes.a Je vous crois à présent en route pour l'Italie, et moi, je viens de terminer une course longue et vive, que j'ai expédiée assez promptement. Je vais prendre un peu de repos, après quoi je compte de répondre à votre lettre très-philosophique que je viens de recevoir, et je vous réponds, parce qu'un sorbonniqueur m'a appris que le plus grand affront que puisse essuyer un théologien est de n'avoir rien à répliquer. Il faut donc dire quelque chose, et je trouve à propos dans mon magasin un amas de distinctions et de subtilités capables de fournir matière à une duplique, après laquelle, s'il plaît au ciel, nous ne nous entendrons plus ni les uns ni les autres, et dès ce moment la dispute deviendra intéressante. D'ailleurs, je suis fort de votre sentiment, que, après avoir longtemps discuté ces matières abstruses, on est obligé de recourir au Que sais-je? de Montaigne. Du reste votre contrôleur des finances m'a assuré qu'il avait pourvu à votre voyage, ainsi que pour le buste de Voltaire; Mettrab comptera deux cents écus pour cet objet, de sorte que son crâne et sa cervelle seront sûrement à moi, et le reste pour les autres souscripteurs.

Adieu, mon cher Anaxagoras; revenez sain et sauf à Paris, et que votre médecin, pour l'année prochaine, vous prescrive pour régime l'air de Berlin. Sur ce, etc.

86. DE D'ALEMBERT.

Lyon, 12 octobre 1770.



Sire,

Je viens de passer quinze jours à Ferney, chez M. de Voltaire;a il m'a paru pénétré de reconnaissance des bontés de V. M., et les sentir avec un vif attendrissement. Il m'a souvent parlé avec le


a Voyez t. X, p. 58; t. XII, p. 215; t. XIII, p. 91; et t. XIV, p. 113.

b Banquier de Frédéric à Paris. Voyez t. XIX, p. 449.

a Voyez t. XXIII, p. 192.