<133>sophe (car bien des faquins usurpent aujourd'hui ce nom) ait imprimé dans une brochure ignorée des sottises absurdes contre le patriotisme; mais croyez, Sire, que tous les philosophes vraiment dignes de ce nom désavoueraient cette brochure, s'ils la connaissaient, ou plutôt se rendraient assez de justice pour ne daigner pas même se justifier d'une imputation si injuste. Je ne saurais trop, Sire, le répéter à V. M., ce ne sont point les philosophes, ce sont les prêtres qui sont les vrais ennemis de la patrie, des lois, du bon ordre, et de l'autorité légitime. Je ne serais pas embarrassé de le démontrer, si j'avais trente ans de moins; mais j'en ai soixante et deux, et il faut finir en paix, si je puis, le peu de jours qui me restent à vivre. Je voudrais surtout, Sire, ne point finir ces tristes jours sans aller encore une fois mettre aux pieds de V. M. le tendre et respectueux hommage que je lui dois à tant de titres. Quoique ma santé s'affaiblisse de jour en jour, quoique ma tête ne soit presque plus capable de rien, quoique je dorme et digère assez mal, je ne puis renoncer tout à fait à la douce espérance d'entendre encore V. M., comme ces dévots qui se flattent d'entrer un jour en paradis pour y voir Dieu face à face. Que ce Dieu me donne ou me rende un peu de force, et j'en profiterai avec l'ardeur d'un bienheureux pour renouveler à V. M. les expressions les plus vives de tous les sentiments d'admiration, de reconnaissance et de vénération tendre et profonde avec lesquels je serai jusqu'au dernier soupir, etc.

211. A D'ALEMBERT.

Le 3 décembre 1779.

J'étais dans quelque inquiétude sur le sort de mes lettres et du paquet qui les accompagnait; je soupçonnais les postes d'infidélité; je poussais même le soupçon jusqu'à croire qu'on ne vous avait rendu ni ma lettre, ni les exemplaires, parce qu'on y avait