<184>d'avouer que vous aviez raison, et que, hors de Paris, on ne trouve que ce gros sens commun qui ne mérite pas qu'on en parle. Peut-être que le poëte duquel sont les vers adressés au cardinal de Bernis avait la tête pleine des Réflexions de La Rochefoucauld, et qu'il juge ainsi que nos actions n'ont d'autre principe que l'amour-propre et la vanité.b Le cardinal pourrait lui répondre que la critique est aussi aisée que l'art est difficile. Pour moi, qui suis grand partisan de l'indulgence, parce que je sens que souvent j'ai besoin de la rencontrer chez le public, je crois qu'il ne faut condamner personne sans l'avoir entendu; de plus, vous savez qu'il ne convient pas que le supérieur soit jugé par l'inférieur; or, la dignité d'un cardinal l'élève au-dessus de tous les rois de la terre; donc ...

Je suis actuellement occupé à faire la tournée des provinces; ces occupations tumultuaires continueront jusqu'au 15 du mois prochain, où, de retour en mon petit ermitage, je pourrai vous écrire à tête reposée et plus gaîment. Sur ce, etc.

235. DE D'ALEMBERT.

Paris, 8 juin 1781.



Sire,

M. l'abbé de Boismont, homme de beaucoup d'esprit et de mérite, mon confrère à l'Académie française, me prie de mettre aux pieds de V. M. son profond respect, en lui présentant de sa part cette oraison funèbre de l'Impératrice-Reine. V. M. verra, à la page 20 de ce discours, et à la page 29, le juste hommage que l'éloquent orateur a rendu aux rares talents et au génie du grand Frédéric en tout genre. Quoique le discours ait été prononcé dans une chapelle, la présence de Dieu, Sire, n'a pas empêché l'auditoire d'applaudir avec transport à l'endroit qui regarde


b Le Roi cite souvent les Pensées, maximes et réflexions du duc de La Rochefoucauld. Voyez par exemple t. VII, p. 119, et t. IX, p. 105.