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18. AU MÊME.

Potsdam, 23 avril 1781.

Le Roi n'est nullement embarrassé de sa lettre à l'impératrice de Russie. S. M. sait trop bien comment la rendre intéressante à S. M. I. Ce n'est pas non plus le moment actuel qu'elle redoute. Elle sent bien que ce premier pas de l'Impératrice vers l'Autriche ne sera pas décisif. Ce n'est uniquement que l'avenir qui lui présente une perspective alarmante. Ce premier pas fait, l'Empereur épiera bien l'occasion pour faire avancer la Russie et l'enfoncer imperceptiblement dans ce labyrinthe, qu'elle ne saura plus reculer, et sera à sa discrétion lorsque la Providence jugera à propos de disposer des jours de S. M. C'est là l'époque que l'Empereur paraît avoir fixée pour envahir les États de Prusse. Ce n'est pas tant pour elle-même que pour son successeur que S. M. appréhende le changement de système en Russie. En effet, son neveu le Prince de Prusse se trouverait alors bien isolé et dénué des secours stipulés par notre alliance. Le concours d'autres événements encore pourrait bien rendre sa position plus scabreuse. Voilà les vrais rompements de tête de S. M. Sa lettre à l'Impératrice n'y entre absolument pour rien. Mais les remèdes aux maux à venir, lorsqu'elle ne sera plus, voilà la pierre philosophale qu'il lui importe de déterrer, et que jusqu'ici elle n'a pas encore pu trouver.

Federic.a


a L'original de cette pièce, adressée au département des affaires étrangères, est, à la signature près, de la main de M. Müller, conseiller de Cabinet. Le comte de Finckenstein a écrit au haut : Praes. d. 23. April 1781.