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3. AU MÊME.

Potsdam, 10 novembre 1772.

On parlait naguère du vieux sorcier. J'ai une nièce assez ingénieuse, qui dit à ce propos : « Mon cher oncle n'est pas sorcier. » Si je l'étais, j'aurais créé des têtes et des ventres, comme vous le dites, autant qu'il en aurait été besoin per far corpo. Sa sacrée Majesté le Hasard, qui va plus loin que la prudence des hommes, me paraît mériter plutôt que moi les félicitations que vous me faites. La différence qu'il y a du pays où vous êtes à celui où je me trouve, c'est que depuis longtemps les Français ont atteint le but auquel ils pouvaient prétendre, quand nous autres étions bien éloignés de jouir d'une situation aisée. Cependant j'attribue surtout les fortunes qui me sont arrivées aux dévotes prières des sectateurs de Ferney. Leur vieil apôtre est mon saint. Comme je lui suppose beaucoup de crédit dans la cour céleste, où il n'y a que des esprits qui doivent aimer leurs semblables, j'ose croire que c'est lui qui m'a attiré leurs bénédictions. Du reste, je vous remercie de la part que vous prenez aux succès que nous avons eus; je ne les croirai parfaits que quand la paix générale sera rétablie. Je compte bien agir en cela conformément à la doctrine des encyclopédistes, et leur témoigner, par le soin que je prends de la paix, l'attention que j'ai de leur plaire. Sur ce, etc.

4. AU MÊME.

Potsdam, 20 février 1774.

Votre lettre du 5 février me parvint avant-hier. Je vous remercie de l'intérêt que vous prenez à ce qui me regarde et mes parentes du calendrier chrétien; ma sainte n'approuvera pas l'application de la remarque de Jean-Jacques, peut-être judicieuse, sur l'orchestre de Paris. Quoi qu'il en soit, il faudra tirer parti des