<374>lieu qu'en quittant aujourd'hui il perdrait dix-huit ans de sa vie employés dans l'espérance de cette retraite. Mais V. M. pourrait aplanir cet obstacle. Les professeurs qui voyagent par ordre du Roi peuvent conserver leur titre, en se faisant remplacer; et si V. M. paraissait y prendre quelque intérêt, cet ordre ne serait pas difficile à obtenir. Par là elle acquerrait un très-bon professeur de grammaire, un académicien d'une érudition très-distinguée, et qui a su y porter de l'esprit et une philosophie très-rare parmi cette classe de savants. Je pourrais proposer à V. M. d'autres hommes de mérite, mais aucun qui fût du même ordre. D'ailleurs, une longue habitude d'enseigner, et une conduite exempte de reproches dans un corps où ses opinions et son mérite lui ont fait des ennemis et des jaloux, semblent des avantages que bien peu d'hommes de lettres auraient au même degré.

M. Beauzée, dont V. M. m'a fait l'honneur de me parler, est âgé, assez dévot, très-flatté de siéger à l'Académie française, et, quoique peu riche, il a pour lui-même et pour ses enfants des espérances qui le retiennent ici.

J'espère pouvoir bientôt remplir les intentions de V. M. pour un professeur de philosophie et de belles-lettres : mais elle connaît trop bien l'état de notre littérature et de notre philosophie pour ne pas me pardonner un peu de lenteur dans l'exécution de cette partie de ses ordres. Je suis avec le plus profond respect, etc.

4. AU MARQUIS DE CONDORCET.

Potsdam, 11 mai 1785.

Je vous suis très-obligé des Éloges que vous avez eu la bonté de m'envoyer; et, pour vous parler avec toute la sincérité possible, j'avoue que je les trouve bien supérieurs à ceux de M. d'Alembert, qui avait pris un style trop simple et trop familier qui ne s'adapte pas trop à ce genre d'écrire, qui exige quelque élévation, sans enflure. La manière de M. de Fontenelle était peut-être trop