<402>façon vous avez lu ma lettre, il m'est impossible d'y trouver ce qui vous y a pu offenser; je vous assure toutefois que personne ne m'a parlé de vous, et que Pöllnitz est le seul à qui j'aie dit que je vous avais écrit cette badinerie. Je mériterais d'en être puni, car l'équivoque n'est pas une pointe que l'on doive chercher; ce n'est qu'un jeu de mots, et la base de la pensée, d'ordinaire, y est fausse. Voilà qui est fait, il ne sera plus question du diable, et moi qui de mon naturel suis assez incrédule pour douter de son existence, je vais le mettre dans un oubli éternel.

J'espère d'avoir le plaisir de vous voir demain, et de vous assurer de vive voix de la parfaite estime avec laquelle je suis, etc.

5. DU COMTE DE MANTEUFFEL.

Berlin, 12 décembre 1735.

M'étant douté que Votre Altesse Royale serait curieuse de voir la brochure dont le Roi parla hier à table, je me rendis d'abord chez moi pour en chercher un exemplaire et pour vous l'envoyer, monseigneur; mais celui que j'en avais chargé m'ayant rapporté que V. A. R. était allée à Ruppin, je prends la liberté d'en joindre un à ces lignes. J'y ajouterai, avec sa permission, le tome trentième de la Bibliothèque germanique. V. A. R. y trouvera non seulement l'extrait de la première partie de l'Histoire de Manichée,a mais aussi quelques autres pièces qui pourront l'amuser un moment, et faire diversion aux inspirations d'Apollon, desquelles je crains qu'elle ne se dégoûte, à force de s'y adonner avec trop d'application. J'ai expérimenté autrefois que, en s'y abandonnant avec trop de ferveur, on peut d'abord y prendre tant de goût, qu'on ne s'en sent plus aucun pour d'autres occupations plus sérieuses, et que la réflexion qu'on fait tôt ou tard sur cet inconvénient nous dégoûte enfin de la poésie même. Le remède que j'y ai apporté, c'est que j'ai fait des efforts (car il en faut vé-


a Par J. de Beausobre. Voyez t. XVI, p. 129.