<490>qu'un défaut, et l'ambition qui le domine s'évanouira bien, s'il goûte un peu de la vache enragée, et qu'il réfléchisse que ce n'est ni le rang ni les dignités qui rendent les hommes illustres, et qu'il vaut infiniment mieux mériter d'être ce que nous ne sommes point que d'avoir des grandeurs sans les qualités propres pour les soutenir. L'élévation donne du ridicule à quiconque n'a pas de la vertu, et il n'y a rien de plus impertinent que de voir un fat revêtu d'honneurs. A ce prix, il ne dépend que de nous-mêmes de nous rendre dignes des plus hautes charges auxquelles on peut aspirer dans le monde. Tel qui est honnête homme est gentilhomme, et les rois ne sont grands qu'autant qu'ils sont justes.

Voilà un long sermon, qui ne serait pas pardonnable en autre temps; mais il l'est aujourd'hui, jour où jusqu'au moindre idiot de village se mêle de sermonner ses ouailles; je puis même, sans trop d'amour-propre, vous assurer que mon bon vieux curé n'en dit pas autant que cette lettre, car il se borne à vous assurer que le péché est péché et reste péché. J'en suis persuadé et convaincu. Je voudrais que vous le fussiez autant de la véritable estime avec laquelle je suis, etc.

33. DU COMTE DE MANTEUFFEL.

Brandebourg, 28 septembre 1736.

Me voilà tout d'un coup transformé de campagnard en ecclésiastique. Je me rends justice, et me crois plus propre pour la première fonction que pour la dernière. Il faut, en attendant, tâcher de faire son devoir partout, sinon en tout, du moins en partie. Dieu veuille qu'après neuf mois l'air de campagne opère! Il est certain qu'un royaume ne reste jamais sans successeur, et que le mort saisit le vif. Mais un prince que Dieu destine au trône, et qui a trois frères, doit souhaiter des héritiers pour couper le chemin à mille inconvénients. La matière serait très-longue à déduire, quoique très-évidente. J'espère que la prédiction de