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A LA MÊME.

Schweidnitz, 6 décembre 1744.



Madame ma sœur,

J'ai appris avec bien de la douleur les intrigues artificieuses dont se servent mes ennemis pour détruire la bonne union qui règne avec la Russie et la Prusse.a J'espère que V. M. I. n'ajoutera pas foi aux insinuations malicieuses de la Saxe, et qu'elle apprendra à connaître la perfidie de cette cour, qui, n'étant assurément pas attachée au gouvernement de V. M. I., ne désire que de la brouiller avec ses véritables et fidèles amis. L'électeur de Saxe manque dans celte occasion à tous ses devoirs envers l'Empereur; il manque à ce qu'il doit à sa pairie, en jetant de l'huile dans le feu de la guerre, et bien loin d'entrer avec moi dans l'œuvre de la pacification de l'Allemagne, il s'efforce à augmenter ce malheureux incendie. Il est sur le point de m'attaquer, et je dois compter en ce cas sur l'assistance de V. M. I., qui me l'a si solennellement promise. Mes intentions n'ont été, dans cette guerre, que de tirer l'Empereur du triste état où l'avait mis la reine de Hongrie en lui enlevant son électorat, de venger la façon injurieuse dont cette princesse en a agi envers V. M. I. par le ministère du marquis de Botta,b et de rétablir la paix en Allemagne; sans quoi le joug de la maison de Hongrie serait devenu plus dur et plus insupportable qu'il ne fut du temps de Charlemagne et de Charles-Quint. Je suis sûr que V. M. I. entrera dans un plan aussi salutaire, et que l'intrigue des Saxons ne l'abusera pas sur un but aussi juste et équitable qu'est le mien. J'estime l'amitié et l'alliance de V. M. I. au-dessus de toute autre liaison, et je me flatte qu'elle sera de plus en plus convaincue qu'elle ne peut avoir de plus fidèle allié que, etc.


a Voyez t. III, p. 26.

b L. c., p. 23 et suivantes.