<73>s'ouvrir. On dit que les Anglais dépeuplent l'Allemagne pour envoyer des troupes en Amérique;a il me semble qu'il n'est pas fort honnête, et encore moins honorable à tous ces petits souverains germaniques, d'envoyer ainsi leurs sujets se faire égorger à deux mille lieues pour procurer un opéra à leurs maîtres. Aussi dit-on que la plupart restent en Amérique, et il me semble que c'est encore leur meilleur parti.

Voilà donc le tyran du Portugal disgracié.b Tout ce qu'on raconte de sa tyrannie fait horreur; mais peut-être tout cela est-il exagéré. Quant à l'Espagne, on dit que l'inquisition y continue ses vexations, et elle fait son métier, puisque le Roi la laisse faire.

Recevez, Sire, avec votre bonté ordinaire tous les regrets que je ne puis vous exprimer assez de ne pouvoir assurer que par écrit V. M. du tendre et profond respect avec lequel je serai jusqu'à la fin de ma vie, etc.

184. DU MÊME.

Paris, 23 mai 1777.



Sire,

Je crois devoir rendre compte à Votre Majesté de la conversation que j'ai eu l'honneur d'avoir avec M. le comte de Falkenstein, et dans laquelle V. M. est intéressée. Il vint samedi dernier, 17 de ce mois, à l'Académie française, et, après avoir entendu les différentes lectures qui lui furent faites, il eut la bonté de s'approcher de moi. Il me dit d'abord des choses très-obligeantes, et ajouta : « On dit que vous nous proposez d'aller cette année en Allemagne; on ajoute même que vous allez devenir tout à fait Allemand. » Je répondis que j'avais en effet formé le projet de faire ma cour cette année à V. M., et d'aller passer auprès d'elle


a Voyez t. VI, p. 131 et 132; t. XXIII, p. 429; et ci-dessus, p. 44.

b Sébastien Carvalho, comte d'Oeyras, marquis de Pombal, fut renvoyé, après la mort du roi Joseph-Emmanuel, le 25 février 1777.