<81>que le gouvernement anglais n'a pas écoutées. Il s'acharne à cette guerre d'Amérique, qui ne lui réussira pas, et nous a donné le temps de mettre notre marine en état de résister à la sienne. Les dernières nom elles qu'on a reçues n'annoncent pas une campagne brillante de la part des Anglais. Je désirerais bien de savoir, s'il n'y a point d'indiscrétion à faire de pareilles questions à V. M., ce qu'elle pense de celte guerre, de la conduite politique et militaire des Anglais, et des manœuvres de Washington; je n'oserais pas lui demander son avis, si je n'étais bien sûr qu'en une phrase elle m'en dira plus que d'autres ne feraient en un volume. La netteté, la brièveté, la précision, caractérisent tous ses jugements politiques, militaires et littéraires, et l'avocat vénitien lui dirait comme à ses juges : È sempre bene. Mais il me semble que ce même avocat, s'il lisait cette longue lettre, me dirait, à moi, de me taire et de respecter les moments précieux de V. M. Je finis donc, en la priant d'agréer avec sa bonté ordinaire la tendre vénération avec laquelle je serai jusqu'à la fin de ma vie, etc.

188. A D'ALEMBERT.

Le 13 août 1777.

Je commence ma lettre par des vers de Chaulieua qui sont une leçon pour les vieillards de notre âge :

Ainsi, sans chagrins, sans noirceurs,
De la fin de mes jours poison lent et funeste.
Je sème encor de quelques fleurs
Le peu de chemin qui me reste.

En pensant ainsi, les nuages de l'esprit se dissipent, et une douce tranquillité succède aux agitations qui nous troublent. Ce


a Chaulieu dit dans son

Épître à M. le chevalier de Bouillon

(1713) :

Ami, voilà comment, sans chagrin, sans noirceurs
De la fin de nos jours poison lent et funeste, etc.


     Voyez t. XX, p. 80 de notre édition.