<101>

22. AU PRINCE DE PRUSSE.

(Potsdam) 4 mars 1748.



Mon cher frère,

Je vous envoie une petite provision de vin d'absinthe que j'ai reçu de Hongrie. C'est un présent aigre-doux et fort ridicule dans le fond; mais comme j'aime à partager tout ce que j'ai avec mes amis, et que je n'en ai point de meilleur que vous, je l'ai envoyé, au hasard de vous déplaire.

Je travaille ici comme un malheureux à polir un ouvragea qui, malgré toutes mes peines, ne veut pas encore prendre le tour que je voudrais. Vous me direz : Pourquoi ne le quittez-vous? C'est par l'inflexible opiniâtreté que j'ai de vouloir réussir, et qu'il n'y a de vrai plaisir dans le monde que de venir à bout des difficultés qui nous arrêtent.

Vous saurez sans doute que la Tettaub épouse le capitaine Saldern, de mon régiment; c'est un mariage sensé, et je crois qu'il sera accompagné de tout le bonheur que je leur souhaite.

Nos opéras-comiques commenceront cette semaine; les acteurs doivent arriver incessamment. Je vous embrasse mille fois, mon cher frère, vous assurant de la parfaite tendresse avec laquelle je suis. etc.


a Les Principes généraux de la guerre, appliqués à la tactique et à la discipline des troupes prussiennes. Voyez t. I, p. XXVI.

b Sophie-Antoinette-Catherine de Tettau, née à Ruppin le 31 décembre 1720 (voyez ci-dessus, p. 29); il a été fait mention de sa sœur cadette et de son père t. XVII, p. 240 et 271, et t. XVIII, p. 170. Quant à M. de Saldern, voyez t. V, p. 225.