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374. AU MÊME.

Le 9 novembre 1782, jour de naissance de ma sœur Amélie.



Mon très-cher frère,

Pour vous simplifier mon raisonnement, je le réduirai, mon cher frère, en peu de paroles. Il faut nécessairement des alliés à la Prusse, moins dans l'espérance d'en tenir des secours que pour les empêcher de lui nuire. Dans la situation présente, la Prusse n'a pas le choix de ses alliés, parce que le traité de Versailles et le pacte de famille joint la race lorraine d'Autriche avec toutes les branches de Bourbon existantes; or l'impératrice de Russie marque, de plus, une haine contre tout ce qui est français et une prédilection décidée pour l'Angleterre; il s'ensuit donc que l'impératrice de Russie, conservant encore le nom d'alliée de la Prusse, doit être soigneusement ménagée, qu'après cette guerre, à moins de quelque révolution à Pétersbourg, cette princesse se joindra certainement à l'Angleterre, et qu'ainsi, faute de pouvoir arranger à notre gré ces alliances, nous serons dans la nécessité d'y acquiescer; c'était ce que j'avais à prouver. Vous me demandez, mon cher frère, ce que l'Empereur a promis à la pantocratrice. Il doit l'avoir assurée verbalement de son assistance, dès qu'elle entreprendrait son projet favori de placer son petit-fils Constantin sur le trône de Constantinople.a La grande Catherine fait maintenant chasser les Tartares de la Crimée; les troupes sont toutes en mouvement, et, le printemps prochain, la campagne doit s'ouvrir par le siége d'Oczakow. Ce n'est donc pas le moment présent qui dessillera les yeux de l'Impératrice; elle ne s'apercevra d'être jouée que lorsqu'elle sera dépourvue des secours et de l'assistance du César Joseph; mais ce sera un peu tard pour sa gloire.

Vous jugez très-sagement, mon cher frère, qu'il faut garder les plus grands ménagements envers la France; c'est ce que je fais, toutefois sans négliger les intérêts de l'État, ce qui est la


a Voyez t. XXV, p. 276.