<165>driez en moi un frère qui vous aime bien tendrement; mais, ma chère sœur, ce sont de ces choses dont il faut s'en remettre à la Providence, en cas qu'elle se mêle de ce monde. Du reste, on n'y saurait faire grand' chose; les hommes naissent pour faire des extravagances dans leur jeunesse, quelque bien dans l'âge mûr, pour se reproduire, pour jouir de quelques plaisirs entremêlés d'amertumes, et pour se dissoudre à la fin. C'est là le train des jours de cette espèce qui raisonne sur ce qu'elle sait et ne sait pas, qui marche sur deux pieds, et qui n'a point de plumes. Je vous demande pardon des balivernes dont je vous entretiens; je pourrais les grossir en vous annonçant l'arrivée de deux jeunes princes de Cobourg, du général Schulenbourg, des Sardois, et de quelques autres étrangers encore; mais vous avez tant d'originaux dans votre voisinage, que ce serait une œuvre surérogatoire de vous entretenir de ceux-ci. Je fais des vœux sincères pour votre santé, pour qu'elle ne se ressente point des fatigues du voyage, qui ne laisse pas que d'être rude pour une personne délicate, vous priant de me croire avec les sentiments de la plus vive tendresse, ma très-chère sœur, etc.

191. A LA MÊME.

Potsdam, 5 octobre 1747.



Ma très-chère sœur,

Je souhaite que vous vous divertissiez bien à la maison de chasse où vous êtes à présent; mais je tremble que l'arrière-saison n'y dérange votre santé précieuse. Nous avons ici depuis quelques jours des pluies et des brouillards qui nous pronostiquent la chute prochaine des feuilles. J'aimerais mieux que Folichona vous amusât au coin de votre cheminée qu'à courir les lapins;


a Chien favori de la Margrave, qui aimait beaucoup ces animaux, comme la Reine sa mère et comme Frédéric lui-même. Voyez les Mémoires, t. I, p. 91, et t. II, p. 243.