<188>à l'extrémité. Ce serait dommage s'il mourait, car il est très-aimable, et a le meilleur ton du monde. Algarotti est de retour d'Italie; il ne sait pas plus sur Herculanum que nous autres; il n'a presque bougé de Bologne, où il a étudié comme je crois qu'il aurait pu le faire de même ici.

On a beaucoup de fêtes et de bals ici, où la jeunesse danse jusqu'à quatre heures du matin. Pour moi, je laisse à chaque saison son avantage; la mienne est déjà un peu avancée; mes cheveux grisb m'avertissent qu'il faut prendre congé de la folie, des illusions et des plaisirs; mais ils me laissent une carrière libre pour l'amitié. Vous savez, ma très-chère sœur, que rien ne peut approcher de celle que j'ai pour vous, ni de l'estime et de la tendresse avec laquelle je suis, ma très-chère sœur, etc.

Je prends la liberté de vous envoyer des ananas.

215. A LA MÊME.

Potsdam, 15 mars 1749.



Ma très-chère sœur,

Vous avez la malice de me mettre à l'épreuve sur une matière délicate, et dont je ne sais pas comme je me tirerai. Il faut cependant vous satisfaire, ma très-chère sœur; tout ce que je puis faire de mieux est de métaphysiquer la constance. II en est, selon moi, de deux sortes; savoir : celle en amour, et celle de l'es-


b Voltaire assistait avec Maupertuis à la toilette du Roi, lorsque ce prince leur fît remarquer qu'il avait des cheveux blancs. Le poëte fit alors l'impromptu suivant, qu'il adressa à Maupertuis :
     

Ami, vois-tu ces cheveux blancs
Sur une tête que j'adore?
Ils ressemblent à ses talents :
Ils sont venus avant le temps,
Et comme eux ils croîtront encore.

Œuvres de Voltaire

, édit. Beuchot, t. XIV, p. 412, no CCI.