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10. DE LA PRINCESSE AMÉLIE.

Le 2 juin 1757.



Mon très-cher frère,

Je me trouve encore de nouveau dans la triste situation d'augmenter vos inquiétudes. La faiblesse de la Reine va toujours en empirant; elle a tous les soirs une petite fièvre; la nuit passée, elle a eu des transports au cerveau, et n'a pas discontinué de parler jusqu'au matin. J'ai déjà eu l'honneur de vous mander l'enflure de ses jambes; le corps commence aussi à se grossir, et même beaucoup, ce qui fait craindre l'hydropisie. Ses forces diminuent, pour ainsi dire, à vue d'œil, et tout l'état de sa santé menace ruine. Nous ne pouvons plus nous flatter, mon cher frère, de la conserver. Préparez-vous, de grâce, à ce coup affreux; il viendra plus tôt qu'on ne le pense; c'est un malheur inévitable, et qui s'avance à grands pas. J'ai tâché de me faire illusion, et cela, pendant longtemps; mais à présent j'ai perdu toute espérance, et tous ceux qui la voient et qui l'entourent sont dans le même cas. Je suis au désespoir, mon cher frère, de vous écrire une pareille nouvelle; j'en ai le cœur serré, mais j'y suis forcée. Daignez me continuer l'honneur de votre souvenir, c'est la seule consolation qui me reste, et soyez persuadé de l'attachement et du respect le plus soumis avec lequel je ne cesserai d'être, mon très-cher frère, etc.

11. DE LA MÊME.

Mardi, 28 juin 1757.



Mon très-cher frère,

Je suis au désespoir de vous écrire que nous n'avons plus de mère. La Reine vient d'expirer. Hier au soir, se sentant au plus faible, elle m'ordonna de vous remercier de toute l'amitié que