<39>montré pour les intérêts de leurs alliés : il n'y avait que la nécessité qui pût amener cette nouvelle liaison. Il fallait se préparer aux oppositions qu'on éprouverait de la part de l'Angleterre, gouvernée par un roi vindicatif et un ministre fougueux. Le parlement avait accordé au Roi toutes les sommes qu'il lui avait demandées : soutenu de ces richesses, le Roi pouvait faire sortir des armées de terre, et porter la guerre jusqu'au bout du monde. Cependant ces premières propositions d'alliance ne furent pas reçues à Versailles avec l'accueil auquel on devait s'attendre. On continua néanmoins à négocier, pour déterminer cette crise politique à une heureuse fin. Deux pédants, l'un Français et l'autre Allemand, s'étaient avisés de former un projet d'association pour les cercles de l'Empire; l'un était le sieur de Chavigni, et l'autre, le sieur de Bünau : ils y procédèrent avec toutes les ressrictions des formalités, selon les lois de l'Empire et la bulle d'or; cet ouvrage lourd et pesant fut aussitôt oublié que lu. Au lieu de penser à cette association, la cour de Versailles prit, moyennant des subsides, les troupes hessoises au service de l'Empereur. Cela dérangea les mesures du roi d'Angleterre, qui comptait de les joindre à son armée. On essaya encore de dissuader le duc de Gotha de donner ses troupes aux puissances maritimes; cela ne réussit pas, car le duc avait déjà reçu des subsides.

Ce ministère de Versailles était nouveau; il s'était peu mis au fait des affaires, de sorte qu'il attribuait la paix séparée que le Roi avait faite avec la reine de Hongrie à la légèreté de son esprit. Il était nécessaire et comme un préalable, voulant se lier avec la France, de rectifier les idées des ministres sur ce point. Le baron de Chambrier, depuis vingt ans ministre de Prusse à la cour de Versailles, étant âgé, et n'ayant pas assez de liaisons avec les gens en place pour se servir auprès du Roi de leur crédit, avait d'ailleurs peu traité de grandes choses, et était scrupuleusement circonspect, Cela fit juger au Roi qu'il fallait envoyer quelqu'un à cette cour qui fut plus délié et plus actif, pour savoir à quoi s'en tenir avec elle. Son choix tomba sur le comte de Rottembourg.a En 1740 il avait passé du service de France à celui de


a Frédéric-Rodolphe comte de Rottembourg était alors général-major, mais le 18 mai 1745 il fut promu au grade de lieutenant-général. Né en 1710 à Polnisch-Netkow, dans la Nouvelle-Marche, il fut l'ami intime de Frédéric, et mourut à Berlin en 1751.